Hannah avait hâte qu'ils la rejoignent. Elle savait qu'elle déclencherait tôt ou tard une bousculade. Elle avait hâte qu'elle se produise. Depuis son "rendez-vous" avec le Roi en personne, elle se savait l'un des principaux sujets de conversation des vampires. Les hommes comme les femmes voudraient l'approcher, pas la toucher, non, elle était en quelque sorte devenue la propriété privée du Roi. Bizarrement, elle avait bien envie d'être approchée, touchée, et plus si affinités. Elle n'avait plus peur des vampires. Après ce qu'elle avait vécu dans les serres d'Augustus, elle n'avait plus peur de rien. De la mort ? Pff. Ce serait presque une récompense pour elle.
Non, elle ne mourrait pas. Ils étaient derrière elle. Les vampires qu'Augustus avaient dépêché derrière ses pas, toujours, pour la surveiller et l'empêcher de faire des c*nneries justement.
Pourtant, elle aurait bien aimé un peu de réconfort, quel qu'il soit. Elle s'était préparée, avait revêtu une tenue plus que sexy, et elle se sentait plutôt bien.
Elle avait envie que des regards la déshabillent. Elle se sentait un peu folle ce soir. Elle les entendait murmurer sur son passage ; elle captait des regards, des envies. Elle commanda un cocktail et s'assit sur un des canapés lounge. Devant elle, il y avait un couple vampire-humain qui s'embrassait et se mordait tour à tour. Ils durent sentit son regard sur eux, car ils s'arrêtèrent et la dévisagèrent. Finalement le vampire cracha :
"Tu es la Servante humaine du shérif Raybrandt ? Regarde, Amy, c'est celle qui est passée dans le lit du roi. Ca te fait quoi, Badenov, d'avoir trahi ton vampire et ton Roi en même temps ?"

"Vas en enfer", répliqua Hannah. Oh non, elle n'avait pas peur. Elle se sentait d'humeur à affronter tous les vampires de la terre. Elle devait se montrer au grand jour, ou plutôt à la grande nuit, montrer qu'elle n'avait pas pour autant perdu la face. Elle était détruite à l'intérieur mais personne ne devait le penser. A part bien sûr Augustus, Krystel qui savait toujours tout, et bien sûr William. Elle but une longue gorgée tout en regardant d'un air effronté son vis à vis. C'était un vampire avisé : il se contenta d'un "'Pff"' et il entraîna sa partenaire plus loin. Elle était de nouveau seule. Elle ferma un instant les yeux, certaine que quelqu'un d'autre viendrait bientôt la rejoindre sur le canapé. Elle n'eut pas longtemps à attendre.

Camille ne savait pas vraiment ce qui l'avait amené dans les quartiers des nocturnes rouges. Il revenait du manoir et ce qu'il ressentait le désarçonner. Il ne parvenait à identifier son état. Il n'était pas vraiment mal, ni particulièrement bien. C'était étrange. Pour se défaire de ce sentiment, il avait décidé de marcher par ci, par là avant de regagner ses quartiers et la chaleur de son lit. Au hasard des rues, il tomba sur une silhouette familière. Il lui sembla connaître son nom mais c'était flou dans sa mémoire. Elle avait été au service de sa maîtresse, assurément. Il pouvait presque entendre la voix de Krystel prononcer son prénom. Qu'était-elle devenue depuis ? Camille la détailla alors qu'elle changeait de cap pour atterrir au « Damned Angel ». Sa démarche incohérente alerta le jeune homme. Elle ne semblait pas savoir où elle allait mettre les pieds. Le métamorphe la suivit instinctivement et entra à son tour dans le bar. Il n'appréciait pas vraiment cet endroit, voir pas du tout. Il se posta dans un coin de la pièce et observa les réactions naissant autour de la jeune femme. Beaucoup de chuchotements, des regards pour le moins haineux et enfin une altercation verbale. Qu'avait-elle fait pour mériter pareil accueil ? De là où il était, il pouvait voir à quel point elle était chamboulée. Mais ça n'était pas ses affaires et il ne la connaissait pas. Si sa curiosité l'avait mené jusqu'ici, son instinct de survie le poussait à sortir aussi sec. Seulement, il avait une conscience et si elle s'était éteinte à plusieurs reprises ses derniers mois, elle décida de se rattraper.

Prudemment, il s'approcha du canapé et s'y installa silencieusement, tout en veillant à ne pas effleurer accidentellement la brunette. Si de loin, elle lui était apparue comme perturbée par quelque chose, de près, cette sensation était bien pire. Elle semblait être sur le point d'exploser ou de s’effondrer. Le riche héritier ne savait par où commencer. Il n'avait rien à faire là à la base et à vrai dire, elle le détestait. Bon, ils ne s'étaient jamais parlés ouvertement. Mais il n'était pas aveugle. La façon dont elle l'avait toiser à l'époque était significative. Ses yeux étaient de vrais lance-flammes. Désormais, il n'y avait plus aucune lueur dans son regard. Plus rien. Comme si le néant avait grignoté ses teintes noisettes. Camille préférait largement le feu à ça. Pris au dépourvu par l'absence d'étincelles dans ses prunelles, la première chose qui atteignit ses lèvres fut d'une banalité des plus déconcertantes.

« Est-ce que ça va ? »

Bien sûr que non ça n'allait pas. Il connaissait déjà la réponse. Mais comment l'atteindre autrement ? Une foule de vampires les fixaient & Camille comprit qu'ils étaient là pour elle. Dans quel guêpier venait-il encore de se fourrer ? Il se trouvait au cœur d'un conflit qui le dépassait. Mais ça n'était pas la première fois. Il devait passer maître dans l'art de se foutre dans des situations chaotiques. Il doutait qu'elle ait envie de parler avec lui, encore moins de ce qu'elle ressentait. Mais depuis qu'il avait capté la détresse dans ses yeux, il ne pouvait pas se lever et l'ignorer. Elle ne devait pas rester seule et encore moins dans cet endroit immoral. Dieu seul savait ce qu'elle subirait en restant ici. Tant pis, si elle lui crachait des insultes ou l'envoyait sur les roses, il ne voulait pas être hanté par ce regard les nuits qui suivraient.

Enemy of mine
I’ll fuck you like the devil
Violent inside
Beautiful and evil
I’m a ghost
You’re an angel
One and the same
Just remains of a name

Hannah jouait avec le feu. Mais quelle importance ? Les vampires la dévisageaient ouvertement, leurs regards se posaient sur son décolleté, son cou, ses jambes. Elle n'en avait cure. Que pouvaient-ils lui faire ? Elle était intouchable. Souillée au plus profond de sa chair et de son âme.
Après avoir renvoyé le vampire et sa pomme de sang, elle s'était négligemment allongée dans le canapé. Les réactions qu'elle déclenchait l'indifféraient totalement. Ce qu'on pouvait penser d'elle aussi. Elle n'avait pas un seul ami dans cette pièce. C'était comme si la musique s'était interrompue subitement. Comme s'il n'y avait plus que son odeur qui flottait dans l'air. Comme si son sang criait dans ses veines.
*Mangez-moi si vous le pouvez, il n'y a plus rien qui vaille la peine d'être dégusté.*
Morte à l'intérieur.

Elle avait fermé les yeux, et sentit quelqu'un s'asseoir de l'autre côté du canapé. Tant mieux. Bizarrement, elle se sentait d'humeur à faire la conversation. Parler, elle pouvait le faire. Elle pouvait tous les envoyer ch*er, pas de problème ! Elle savait que c'était un homme. Elle le sentait.

"Alors, on est venu profiter d'une Pomme de Sang ? Je ne suis plus la servante de William. Vous pouvez vous servir."
Elle ouvrit les yeux et se tourna vers lui, se pencha littéralement sur lui, offrant à son regard son décolleté. Elle ne l'avait pas encore reconnu. Son visage lui disait bien quelque chose, mais elle n'y fit pas attention au début. Elle posa sa main sur sa chemise et décrocha quelques boutons. Elle toucha son torse.

Je vous plais ? Mon sang vous attire ? Mais... vous êtes chaud !" s'exclama t-elle.
Cela ne voulait dire qu'une chose. Ce n'était pas un vampire. Il ne voulait pas de son sang.
Et tout d'un coup, elle le reconnut. Il travaillait pour Krystel, ils s'étaient croisés au Manoir, il y a fort longtemps. Une époque révolue. Si lointaine. Quand elle avait encore un prix, une valeur.
Penser à ce temps-là lui fit mal. Elle ne voulait pas penser à ce qu'elle était avant.

"Vous êtes venu pour m'observer c'est ça ? Pour rendre un rapport complet à votre maîtresse ? Je n'ai pas besoin d'être surveillée. Si Krystel veut savoir ce qui arrive dans ma p*tain de ma vie, elle n'a qu'à m'ordonner d'accourir. Je viendrais, juste pour lui montrer que j'existe encore, qu'elle le veuille ou non."
Sa voix méprisante portait loin, et tous avaient l'air choqué, écoeuré, ou intéressé. Qu'importe ! Elle n'avait pas besoin d'aide, de qui que ce soit. Surtout pas d'un larbin.

Ses doigts partirent vers l'avant bien avant qu'il n'ait saisi sa première allusion. Elle lui offrait pratiquement sa poitrine tandis que ses mains s'occupaient de lui déboutonner sa chemise. Camille ne réalisait pas ce qu'elle faisait. C'était comme si il visualisait la scène sans en être acteur. Quand ses paumes atteignirent son torse, il reprit le fil des choses et s'apprêtait à l'arrêter mais elle réalisa qu'elle n'avait pas affaire à un mort vivant. Les couleurs inondant ses joues virèrent du rouge vif au blanc en un seul instant. Comme si elle venait d'apercevoir un fantôme. C'était en quelque sorte le cas supposait-il. A vrai dire, il prit seulement conscience que beaucoup de temps s'était écoulé depuis la dernière fois où il l'avait aperçue. Néanmoins, son comportement & ses paroles laissèrent place à beaucoup d'hypothèses. Elle avait donc été la servante de William. Et apparemment, elle semblait assez désorientée pour se frotter au danger & à la provocation. Son désespoir fut un peu plus palpable après cet épisode & Camille se sentit davantage mal à l'aise. Pourtant, la suite fut en quelque sorte bien pire.

Tandis qu'elle balançait son monologue avec une voix à moitié brisée, les vampires guettant ses moindres faits & gestes semblèrent se rapprocher. Camille devait la calmer avant qu'ils ne se fassent tuer. Il voulut lui prendre le bras pour qu'elle arrête de hurler mais il se retint de justesse. Ça risquait de faire redoubler sa haine. A la place, il se contenta de planter ses yeux dans les siens. Si elle pouvait au moins comprendre de cette manière qu'il ne cherchait pas à lui nuire. Mais elle était déjà trop loin dans sa déchéance pour interpréter ce signe. Au fond de son gouffre, plus rien ne devait compter. Le métamorphe prit alors la parole.

« Je ne suis pas venu ici sous les ordres de Krystel. Je ne suis pas un espion. Mais c'est à vous de choisir si vous décidez de me croire ou non. Je pense que vous êtes suffisamment surveillée sans que quelqu'un d'autre ne mette son nez là dedans. »

Camille désigna d'un geste discret du menton l’attroupement de vampires. Il reboutonna sa chemise lentement tout en gardant un contact visuel avec la jeune femme. Si elle pouvait capter un minimum de sa sincérité, ça serait tellement plus simple.

« Je sais que ça ne me regarde pas et je comprends que vous n'ayez pas confiance en moi. Mais je trouvais mal avisé de vous laisser ici seule... dans cet état. »

Le jeune homme lui offrit un faible sourire qui avait plus des allures de grimace. Quelqu'un passa pour lui demander ce qu'il comptait consommer. Il prit le premier alcool qui lui vint en tête renvoyant ainsi le serveur. Ensuite, il se pencha vers l'oreille de son interlocutrice.

« Je ne sais pas ce qu'ils vous veulent mais à votre place je me méfierais. »

Il parlait de cette drôle de garde qui les entourait. Le savait-elle seulement ? Camille réceptionna son verre et bu une gorgée. Plus corsé que la normale. Il manqua de tousser. Évidemment, cet endroit prônait tous les pêchés mortels possibles. Autant faire perdre la tête aux humains. Si elle était venue là, c'était sûrement pour tester ses limites. A moins qu'elle ne les ait déjà franchies ? Le métamorphe fronça les sourcils alors qu'il la détaillait. Oui, elle était venue chercher quelque chose ici. Quelque chose pour se sentir en vie ? Quoiqu'il en était, elle s'était vraiment trompée sur le lieu. Ici, ça puait la luxure & l'obscénité. Une vraie descente en enfer. Rien pour l'extirper de ses propres ténèbres. Si il arrivait à la convaincre de ses bonnes intentions, il pourrait peut être la faire sortir de ce bar sordide.

Hannah s'était placée dans une situation délicate. Avant, elle n'en avait cure. Après tout, elle était seule dans cette galère. Ce qui lui arriverait serait entièrement de sa faute et elle serait la seule à en assumer les conséquences. Mais maintenant, il y avait aussi ce ... cet espion dont elle ne se rappelait plus le nom !
On aurait dit qu'il voulait la tirer d'affaire ! Mais pourquoi ? Quel intérêt avait-il à la sortir de ce mauvais pas ? Pourquoi s'en mêlait-il ? C'était très étrange.

Selon Hannah, tous ceux travaillant pour Krystel se devaient être aussi machiavéliques qu'elle. Ou alors peut être était-ce un plan spécial de la vampire ? Surveiller le moindre de ses faits et gestes ? Après tout, Krystel devait éprouver de la rancoeur envers elle. Elle avait partagé le lit d'Augustus. Ensemble, ils avaient plongé très bas au coeur de son corps, très profondément...
*Ne pense pas à ça maintenant !*
C'était pour cette raison qu'Hannah pensait qu'il espionnait pour le compte de Krystel. Elle devait éprouver une curiosité maladive envers elle, maintenant. Les deux femmes se détestaient déjà cordialement ; la situation devait avoir empiré désormais.

Et pourtant, il tentait de démentir les apparences. Non, il n'était pas un espion de Krystel. *Ah oui ? Je demande des preuves !*
Non, elle ne se ferait pas avoir aussi facilement. Elle avait peut être l'air d'une femme qu'on pouvait aisément blesser, choquer, mais après sa "nuit" avec Augustus, elle sentait qu'elle s'était endurcie. Plus rien ne pouvait l'atteindre. Et sûrement pas une tentative pour l'approcher et l'amadouer. Il pouvait s'en aller, elle n'avait pas besoin de lui.

"Mais pour qui vous prenez-vous ? Je n'ai pas besoin d'aide, vous savez."

Mais il ne semblait pas pressé de s'en aller. Elle le voyait dans ses yeux qu'il n'était pas convaincu. Elle allait devoir utiliser d'autres arguments.
Elle le vit avec amusement reboutonner sa chemise, l'air un peu gêné. Il paraissait jeune, peut-être plus jeune qu'elle, plutôt mignon.

"Je vois que vous voulez être gentil avec moi, mais je ne vois pas pour quelle raison. Malheureusement pour vous, je n'ai pas envie d'être raisonnable ce soir. Ne vous inquiétez pas, ils ne me portent pas dans leur coeur, mais ils ne me toucheront pas."

Comme il se penchait vers elle, de l'air d'un confident, elle fit de même. Elle se rapprocha doucement de lui et lui murmura à l'oreille :

"Je suis souillée. Par la marque du plus puissant vampire de notre temps. Vous qui êtes dans les petits papiers de Krystel, vous devez le connaître aussi. Tous le connaissent et le craignent. Il vaut donc mieux pour vous que vous partiez et me laissiez seule."
Par ces mots, elle lui asséna la triste vérité. Saurait-il comprendre et se montrer assez intelligent pour partir avant qu'il ne soit trop tard ?

Camille était plutôt borné dans son genre. Autant dire qu'elle avait beau l'envoyer paître en enfer, il ne bougerait pas. De toute façon, les molosses à crocs l'avaient déjà repérés. Au point où on en était... Évidemment, il connaissait Augustus King mais pas forcément de la bouche de Krystel. Les gens parlaient beaucoup autour de lui & davantage autour d'un verre. Dans le style effrayant & dominant, on ne faisait pas mieux. Quoique sa maîtresse pouvait rivaliser au titre aisément... Le métamorphe engloutit une autre gorgée de son alcool fort qui manqua de lui arracher la gorge & l’œsophage. Mais qu'est ce qu'ils avaient foutu dans ce truc pour qu'il soit si écœurant. Le goût n'avait même pas gardé ses propriétés gustatives appréciées. Officiellement, le pire bar du quartier. C'était toujours bon à savoir. Le jeune homme reporta son attention sur sa voisine de canapé.

« Je pense que comme vous, je suis enchevêtré dans les problèmes jusqu'au cou. Un de plus, un de moins... »

Le riche héritier devait draguer une nana assez dangereuse pour que Krystel n'ose pas se frotter directement à elle pour récupérer ou pour obtenir quelque chose d'apparemment important. Il n'était pas dénudé d’intelligence, il avait compris qu'il allait se foutre davantage dans le pétrin. Mais la Reine des vampires n'offrait jamais d'alternative ou de seconde option. Elle pouvait si facilement l'écraser. Autant ne pas lui donner l'occasion de le faire. Sa protection – si on pouvait appeler ça comme ça – le préservait de plusieurs désagréments. Un vampire détaillait la brunette un peu plus loin, il se mit à avancer dans sa direction, déterminé à lui dire quelque chose ou à faire quelque chose ? Quoique ce soit, son regard en disait long. Un prédateur flairant sa proie. La dilatation de ses pupilles semblaient assez significative ainsi que son sourire tordu par l'envie.

Camille posa le restant de son breuvage sur une surface proche & se rapprocha de la jeune femme. Il passa son bras autour de ses épaules, glissa sa bouche jusqu'à son oreille - ses lèvres frôlaient sa peau à cette distance et se mit à lui parler dans sa langue maternelle. Il récita un vieux poème qui n'avait ni queue, ni tête mais personne ne le comprendrait de toute façon. Rien de mieux pour faire semblant de draguer que de s'exprimer en français. Il doutait que ça décourage rapidement l'intrus vampirique mais au moins ça le dissuaderait peut être une approche trop direct ? Le gars se stoppa à quelques enjambées d'eux.

«  Je m'excuse pour cette comédie mais je ne tiens pas spécialement à devoir vous arracher aux bras de ce type qui a l'air peu commode. Ne croyez pas que je fais ça par pitié ou par intérêt. Je n'ai qu'une conscience qui m'a poussé à vous aider ce soir.»

Il espérait qu'elle comprendrait sa démarche. Il n'était pas physiquement intéressée par elle tout comme il n'essayait pas de gagner sa confiance pour la revendre à Krystel. Il tentait juste de la sortir de là. Un peu prétentieux comme dessein ? Certainement. Il n'était pas un sauveur ou un héros quelconque. Juste un pauvre gars qui prenait des mauvaises décisions & des mauvais croisements. Si il pouvait se racheter d'une façon ou d'une autre, celle-ci y contribuait certainement. Ça n'était pas pour son estime cependant qu'il cherchait à la secourir. Il savait ce que ça faisait quand on se retrouvait au pied du mur sans autre issue. La solidarité était une valeur qui perdait en adhérents. C'était d'une tristesse aberrante. Il ne voulait pas faire parti de ce mécanisme.

Le buveur de sang les observait toujours depuis sa position. Camille fit courir ses doigts sur le bras de la jeune femme. Il se demandait si elle finirait par le gifler, elle en avait bien le droit même si ses intentions étaient honorables. Quoiqu'elle avait quand même commencé par le déshabiller un peu plus tôt. Match nul. Au moins, pour le moment, le mort vivant leur fichait la paix. C'était toujours ça de pris.

Hannah avait décidé que ce soir, elle jouerait avec le feu jusqu'à s'y brûler, puis s'y consumer entièrement. Mais toute seule. Elle n'avait pas besoin qu'on vienne la sauver. *Ca doit être son fantasme qui se réalise. Une jolie fille en détresse à sauver de tous les méchants vampires du coin !*
Un temps passa et elle se rendit compte que ce n'était pas lui qui jouait le rôle du pathétique, mais elle. Dans cette comédie, elle passait pour la débile de service. L'entêtement du jeune homme était plutôt touchant en fait. Ou désespérant : pourquoi s'intéresser à une perdue comme elle ?Pff*
On aurait dit qu'il l'avait convaincu qu'elle faisait fausse route. Mieux valait sortir de cette foutue boîte et rentrer chez elle. Si elle tenait encore debout... Elle eut un petit rire quand il fit comme si lui aussi avait beaucoup de problèmes ; il devait mentir :

"Impossible que vous ayez autant de problèmes que moi. A moins que Krystel ne vous ait torturé sexuellement pendant une nuit entière ?"
Oui, elle le provoquait et alors ? Saurait-il riposter ? Elle aimait choquer maintenant qu'on l'avait traitée comme une catin. Elle était un objet, une chose ; il ne fallait pas qu'elle l'oublie en se prenant pour plus qu'elle n'était.
Elle jeta un coup d'oeil : les vampires convergeaient bel et bien vers elle, ayant décidé de passer outre la marque d'Augustus. Ils avaient peut être plus peur de Krystel que du roi. Et lui semblait décidé à l'aider. *Bien ! Qu'il m'aide après tout, on verra bien ses raisons plus tard.*
Elle était persuadée qu'il n'agissait pas selon "sa conscience", comme il le disait si bien.
Quand il se rapprocha d'elle et approcha sa bouche de ses oreilles, Hannah ne bougea pas. Elle se douta que cela faisait partie de ses plans pour la tirer de là. Elle sourit intérieurement et lui répondit :
"Qu'est ce que vous, un simple humain, pouvez faire contre tous ces vampires ? Je suis désolée, mais vous faites office de poids plume."
Allons, voyons voir ce qu'il trouvera pour les sortir de là. *Poids plume, c'est bien trouvé. Il n'est pas spécialement musclé. Voyons voir ce qu'il cache sous ses apparences d'étudiant protecteur ?*

Évidemment qu'elle le provoquerait. Les gens qui n'ont plus rien à perdre, si ce n'est les restants de leur conscience, ne peuvent plus voir au delà de leur propre réalité. Elle ne voulait rien entendre de ce qu'il avait à lui soumettre et sa façon de lui dire qu'il ne pourrait pas comprendre le ramena à ses convictions. Il ne fallait pas qu'il se mêle de la vie d'autrui. Du moins, pas de cette façon. La pression oculaire exercée par les vampires proches commençait à l'agacer. Surtout qu'il avait beau parlementé avec la brunette, ça ne changeait rien. Au contraire, elle semblait s'insurger.

«  Je ne pense pas que ça soit un concours et d'ailleurs, je n'ai pas prétendu partager vos problèmes. Je tentais simplement de répondre à votre interrogation sur ma présence en ces lieux. Je ne suis pas là pour abuser de vous. »

A ses mots, il ôta son bras de son épaule et s'éloigna suffisamment pour que même son coud ne puisse plus l'effleurer. Elle avait dû se méprendre sur ses intentions, de toute évidence. Ça se lisait au milieu du chaos qui déchirait ses prunelles. Peut être parviendrait-elle à, au moins, saisir ses motivations un jour. De toute évidence, elle ne se sentait pas particulièrement reconnaissante de ses tentatives. Après tout, tout ce qu'elle savait de lui le rallier à quelqu'un de particulièrement dangereux. Avait-il eu tort de la suivre ? Peut être. Alors qu'elle lui balançait une autre remarque qui bien censée restait quelque peu insultante. Ne lui avait-on jamais dit que les hommes n'aimaient pas spécialement se sentir rabaisser ? Non, Camille ne se vexait pas pour si peu mais ça n'était pas pour autant qu'il se sentait flatté. Il haussa d'abord les épaules et reprit sa boisson. Une autre gorgée, toujours aussi désagréable ce truc. Le goût colla à son palais de manière inconvenante. Dernière fois qu'il mettait les pieds ici. Les nocturnes rouges les fixaient toujours, prêt à bondir sans aucuns doutes. Un vrai guet apens dans lequel ils s'étaient tous deux volontairement plongé. Elle par démence et lui par empathie. Ses sens aux aguets, le métamorphe percevait chaque froissement et chaque respiration de la pièce. Grâce à sa nature et à son expérience, rien ne lui échappait et si ils décidaient de s'en prendre à eux, il saurait se lever à temps pour s'échapper. Il essaierait d'emmener la brune avec lui si jamais ça se produisait. Néanmoins, si elle l'empêchait d'exécuter ce plan à bien, il n'aurait pas vraiment le choix. Comme elle l'avait dit, il n'avait pas l'étoffe d'un héros. Et comment pouvait-il lutter contre quelqu'un ayant décider de s'offrir d'elle même aux monstres à crocs ? Pas sûr que sa conscience se satisfasse de ce manquement à l'honneur. Ça ne serait pas la première fois. Elle avait une garde rapprochée. Lui n'avait que sa peau comme rempart, autant ne pas jouer les suicidaires.

«  Franchement, je doute pouvoir vous aider si ils décident de vous attaquer. Vous avez raison je ne fais pas le poids face à cette horde de vampire. Aussi, il serait plus sage pour vous de sortir d'ici tant que vous en avez l'occasion. »

L’honnêteté à défaut de la convaincre. Elle sous estimait sûrement son potentiel mais il valait mieux pour lui. Les gens se méprenaient souvent sur son compte, il y veillait très certainement. D'une traite, le français engloutit son breuvage et grimaça tant l'alcool possédait ce goût âpre et peu savoureux. Le liquide lui brûla l’œsophage et calcina même l'intérieur de son estomac. Cette sensation ne s'apparentait pas à rien de plaisant. Quoique c'était, c'était vraiment infect, ça ne ressemblait en rien à ce qu'il avait l'habitude de consommer. Ils avaient fait exprès de lui donner autre chose que ce qu'il avait commandé ? Sincèrement, ça ne l'aurait guère étonné. Il jaugea la silhouette de sa compagne d'infortune et commençait à s'impatienter. Que fallait-il faire pour qu'elle se rende compte qu'elle allait sûrement payer sa présence en ces lieux ? Flirter avec le danger avait ses limites. Tout comme la patience du corbeau.

« Je pensais que vous auriez besoin d'une main secourable. Mais peut être m'étais je trompé ? Je ne veux pas vous importuner et je ne compte pas rester là indéfiniment. J'espère que vous finirez par entendre raison. »

Il resta à sa place mais savait que dans l'heure suivante, il sortirait de là avec ou sans cette nana. Dans tous les cas, il aurait tenté de la sortir de son pétrin, il ne pouvait pas jouer les divinités ni les despotes. Ses bonnes intentions n'étaient pas illimitées.

Le Damned Angel, un bar miteux où se mêlent vampires et humains. C'est endroit ne me plait pas car je n'aime pas que cette vermine vienne ici pour tester leurs limites. Pourquoi ces rats en besoin de sensations fortes échouent en ces lieux? Si je n'écoutais que mon instinct je lancerai immédiatement un festin sanglant, encourageant les vampires de bas étage à participer. Toutefois, ma condition de shérif m'interdisait tout acte de la sorte. Je devais faire respecter la loi vampirique, et donc par ce fait éliminer tout vampire enfreignant nos lois, aussi contrariantes puissent-elles être. Ce lieu de luxure et de débauche propre à notre nature de vampire, bien que fréquenté par ces insignifiants humains n'en demeurait pas moins le meilleur endroit pour se tenir au fait des rumeurs de la ville. C'est ici en effet que murmurait Edimbourg. J'étais assis dans un fauteuil d'un coin de la pièce principale de ce taudis, écoutant les bruits de la nuit. Alors que je buvais ce Tru Blood, un évènement se produisit.

Quelque chose créait l'agitation dans un coin de l'établissement, des éclats de voix, la tension dans l'air qui devenait de plus en plus palpable. J'écoutais tout d'abord, sans bouger de mon siège, afin d'en apprendre davantage quant à la cause de ce remue-ménage. Une humaine semblait causer tout ceci, et pas n'importe laquelle. Celle-là même qui avait été punie par le roi en personne. Mâle ou femelle, personne ne souhaiterait recevoir telle sanction par notre maître. Cela me rappela l'espace d'un instant ma propre peine, dix ans dans un cercueil plein d'argent. Une décennie entière de souffrance. Le roi ne tolérait pas le moindre écart de conduite, et cette humaine bien qu'appartenant à mon ami William désormais prince vampire, n'avait pas été à l'abri de sa punition. Alors que la tension enflait, je me levais discrètement et m'avançait au milieu de l'attroupement de nocturnes qui s'avançait vers l'humaine.

Elle n'était pas seule, un mâle humain l'accompagnait. Il semblait vouloir la sauver de mes congénères. Comment comptait-il s'y prendre? Curieux de voir ça, je restait pour le moment silencieux, me contentant d'observer la scène, me dissimulant derrière quelques autres nocturnes. Après avoir été sanctionnée par Augustus, nul vampire n'avait le droit de ne serait-ce que toucher cette humaine. Mais certains vampires lambda pouvaient parfois oublier certaines règles. Bien qu'ayant décidé pour l'heure de ne pas agir mais de simplement observer, j'étais prêt à agir si jamais l'un des nocturnes tentait d'attaquer la propriété du roi. De par mon statut, je me devais de protéger les intérêts du roi. Et cela passait bien évidemment par tout ce qu'il possédait.

hj:

Spoiler:

Les vampires se rapprochaient d'eux, inexorablement. La tension montait doucement, elle prenait son temps, mais venait par vagues heurter sa conscience. Hannah était étonnée, presque, de voir qu'elle pouvait encore ressentir de la peur, de l'angoisse, voire même du remords pour ses paroles blessantes envers Camille, après ce qu'elle avait subi avec Augustus.
Elle aurait dû devenir aussi froide que la surface d'une pierre tombale, aussi dénuée d'émotions qu'un... oui, qu'un vampire, mais était-ce la boisson qu'elle avait bue, les derniers mots de Camille ou cette sensation d'être prise au piège... C'était comme si elle se réveillait après une longue captivité. Elle avait voulu mourir.. mais l'instinct de survie des Badenov était trop fort, il balayait tout sur son passage. Elle avait reçu un texto d'Augustus, lui disant:
Je sais que tu penses toujours à moi, petite humaine. Souviens toi; nous n'en avons toujours pas fini, toi et moi....
Aucune envie de se frotter de nouveau à lui. A peine sortie de chez lui, nettoyée de ses blessures par les serviteurs du Roi, elle avait eu envie de se laisser tomber à terre et d'attendre la fin...

La fin se présenta vers elle soudain, par l'action d'un vampire qui, s'avançant un peu plus que les autres, lui cracha :
"Alors, la putain du Roi ose venir ici? Tu devrais avoir peur de nous maintenant que tu as connu l'enfer !"
Il avait manifestement trop bu et ne savait plus ce qu'il disait. D'ailleurs, aucun de ses congénères ne lui suivait sur ce coup-là. Manifestement, il était temps pour elle de s'en aller. Elle regarda Camille et lui glissa :
"Finalement, je vais pouvoir m'en sortir toute seule. Ils sont tous ivres. Regardez plutôt..."
Elle marcha férocement vers le vampire qui avait parlé.
"Oui j'ose ! Et c'est toi, c'est vous qui devriez avoir peur ! Car si un seul d'entre vous me touche ce soir, le Roi le saura instantanément... et il se chargera personnellement de vous le faire regretter !"
Le vampire recula un peu et voyant un passage, elle s'y engouffra, sûre de sa impunité. Soudain, face à elle, elle reconnaît Julien Guillemaud, le shérif vampire. Elle s'arrêta net. Toute sa belle assurance avait disparu. Que faisait-il ici ?

L’inévitable se reproduisit, une des créatures approcha à nouveau. Il ne fit que la bousculer avec des mots mais on sait tous que les paroles peuvent parfois être bien plus blessantes que les actes. Néanmoins, Camille ne s’attendait pas à cette réaction-là. Le jeune homme ne perdit pas une seule miette de son revirement de comportement. Elle passait d’un état à un autre sans y prendre garde. Comme si toute sorte de démons luttait à l’intérieur de son crâne, l’un prenant le pas sur l’autre. De toute évidence, la nouvelle émotion qui la percutait fut la démence pure. Son esprit de conservation aurait dû la pousser à quitter le lieu aussi sec et pas à se présenter d’elle-même aux portes de la Mort. Elle allait faire quoi ? Les provoquer seulement ? Même ivre, ils restaient tous dangereux. Il doutait qu’avec sa taille menue, elle parvienne à rivaliser si l’un d’entre eux décidait de la prendre à revers. Mais à quoi jouait-elle franchement ? Cherchait-elle à se prouver quelque chose ?

« Ne faites rien d’imprudent. »

Ca ne servait même à rien de lui conseiller ça, il le savait. Elle s’en fichait de ce qu’il pensait ou disait depuis tout à l’heure. Mais qui était-il pour la blâmer de ça ? Ils ne se connaissaient même pas. Alors qu’elle se leva pour entamer sa marche, le corbeau se releva à sa suite mais resta debout au même emplacement le temps qu’elle discute avec le vampire. D’accord, elle invoquait le Roi, elle se plaçait sous son protection. Peut-être que ça n’était pas une si mauvaise idée finalement. A moins que ses énergumènes ne veuillent entendre raison ou qu’ils soient trop engourdis par l’alcool pour cesser tout agissement. Ils pouvaient rebondir malgré la menace. A sa place, il serait sorti sans rien dire. Le voleur enjamba les quelques mètres le séparant d’Hannah. Elle filait entre les carcasses sans se soucier de le planter là de toute évidence. Il ne comptait pas la perdre de vue tant qu’elle n’aurait pas définitivement déserté le lieu.

Aussi, il se faufila à son tour parmi les attroupements. Par chance, la jeune femme s’était arrêtée devant un homme. Le français vint se placer à côté de la brune et jaugea à son tour l’inconnu. Il ignorait qui il était mais il en imposait assez naturellement pour éliminer une bonne partie de suspicion. C’était un vampire et tout son être incitait un respect quasi obligatoire. Intimidant serait le terme. Le corbeau observa à tour de rôle la femme et le buveur de sang. Le connaissait-elle ? Était-il hostile ? Devait-il s’éclipser ? Il ne parvenait pas à se décider, aussi, il resta là. Dommage, elle était en bon chemin pour sortir de l’établissement. Est-ce que ce type voulait aussi donner son opinion ? Hé bien, par mesure de précaution, ce ne fut pas le métamorphe qui amorça la discussion. Il n’avait pas sa place dans toute cette histoire depuis le début. Il se contenta de détailler la scène et d’anticiper la suite. Ses muscles étaient toujours contractés, prêt à intervenir au moindre signe.

Malgré que cela me coûte je devais bien constater qu'en un point les vampires étaient semblables aux humains, la connerie. Le vampire qui s'était adressai à l'humaine en était la preuve, tout être sous l'emprise de l'alcool en vient à dépasser les limites du raisonnable. C'est bien pour éviter cela que je ne buvais pratiquement jamais d'alcool. Lorsqu'elle envoya balader le vampire ivre comme si elle était de taille à se mesurer à lui, un sourire naquit sur mes lèvres. Cela ne m'étonnai guère de la part de cette jeune femme, bien que je ne sois pas au courant des détails de ce qui lui a valut d'être punie par le Roi en personne. Alors que j'étais toujours en retrait de quelques pas par rapport aux protagonistes principaux de la scène dissimulé au milieu des quelques personnes qui formaient un cercle autour des deux humains, Hannah fendit la foule pour se stopper à deux pas de moi lorsqu'elle me reconnut sans prononcer un mot. L'humain qui l'accompagnait la suivit pour s'arrêter près d'elle. A le voir ainsi, il était clair qu'il était prêt à la défendre même contre des vampires. Quel courage, à moins qu'il n'ait les moyens de les maintenir en respect. Peut-être était-il au service d'un des mes collègues? Après tout même si pour ma part je n'avais aucun servant humain et que Gaïa comme Pomme de sang, c'était loin d'être le cas de mes camarades shérifs, quant aux maîtres vampires n'en parlons pas. Ce n'était pas par goût d'originalité, mais simplement que je n'appréciai pas suffisamment l'ensemble des humains pour en avoir à mon service, d'autant que je considérai cela davantage comme une source de tracas. Et puis j'étais souvent considéré comme étant le plus soft des dirigeants vampires. En fait, je n'aimais pas l'extravagance, surtout quand elle était inutile, à savoir dans 99% des cas. Je ne suis pas de ceux qui ont besoin d’étaler leur pouvoir. Mais revenons en aux faits.

Les deux humains me faisaient donc face, l'une ne sachant comment réagir, l'autre prompt à agir même si cela pourrait s'avérer être une bêtise de sa part. Je ne connaissais pas l'homme, cependant il ne semblait pas être du coin, quelque chose en lui ne faisait pas écossais. Mais ce n'est pas ceci qui me surprit le plus chez lui, mais plutôt son odeur. Elle était plus...bestial que celle que je pouvais sentir chez certains humains et me parut vaguement familière. J'avais déjà sentis une odeur similaire par le passé, mais je ne pu retrouver chez qui, ce qui me fit froncer un sourcil en regardant l'humain une fraction de seconde avant que je m'adresse à eux en commençant par le mâle.

Et bien jeune homme, ne soyez pas aussi tendu. Vous pouvez vous détendre, votre amie ne risque rien. dis-je d'un ton aimable et qui se voulait rassurant, en prenant en photo à l'aide de mon smartphone le vampire qui s'était adressé à elle avant de m'adresser en élevant la voix à la foule qui nous entourait tous les trois.

Nul besoin de vous dévoiler mon identité je pense, vous savez qui je sers ! Cette personne appartient à notre Roi, quiconque lui manquera de respect subira le courroux implacable de la justice que j'ai pouvoir d'appliquer ! Ce sera mon seul avertissement. Tout les vampires présents comprirent mes paroles sans aucune ambiguïté ainsi que les humains qui connaissaient notre réel fonctionnement. Quant aux humains uniquement là pour faire la fête, la majorité en fait, ils me prendraient simplement pour le vigile de l'établissement rétablissant l'ordre au milieu d'une bagarre entre clients et qui frimait un peu trop, mais je n'en avais cure le bétail ne m'importait que peu. Les protocoles de sécurité étant respectés, j'envoyai par message la photographie du vampire prise quelques instants plus tôt à Angela avec pour instructions de le suivre à sa sortie du bar et de le tuer en toute discrétion. Je pouvais lui faire confiance pour cela, quant à l'exécution je devrai en référer à Softov comme me l'avait demandé le Roi. Quelle plaie de voir ainsi tout lui rapporter, toutefois c'était mon devoir et je m'en acquittai sans broncher. Cela fait je m'adressai plus discrètement à la jeune femme et son compagnon tandis que la foule se dispersait et retournait à la fête.

Bonsoir mademoiselle Badenov, je ne suis pas là pour vous ennuyer mais cela ne m'empêchera pas de veiller à votre sécurité lorsque vous êtes sur mon territoire. dis-je pour leur signifier qu'ils étaient à présent en sécurité et ce même s'ils souhaitaient rester dans le bar.Voulez-vous sortir ou bien vous asseoir, votre compagnon et vous, à une table dans un coin plus discret de l'établissement? Bien entendu je vous invite si vous souhaitez tout deux discuter un peu avec un vampire sobre. dis-je en souriant en attendant la réponse des deux humains.





HJ:

Spoiler:

Hannah eut un petit sourire en entendant la recommandation de Camille.
Ne rien faire d'imprudent, ce n'était pas du tout comme ça qu'elle envisageait les choses. Pour elle, il lui fallait à tout prix sortir de ce piège : et la seule manière de le faire était de foncer dans le tas. Hannah avait un côté très tête brûlée ; on lui avait toujours dit qu'elle avait le don pour se fourrer dans des situations compliquées, et de s'en sortir, en plus ou moins bon état !
Sûre de son coup, remplie d'une assurance toute nouvelle dont elle ne s'expliquait pas l'origine, elle marcha droit sur le groupe des vampires. Celui qui avait osé l'apostropher et l'insulter allait regretter ses paroles.
En fait, son intervention fut tellement imprévue qu'elle les laissa hébétés, interloqués. Hannah profita de ces instants pour se frayer un chemin parmi eux. Elle ne pouvait pas jeter un oeil en arrière pour voir si Camille la suivait. Malgré elle, elle espéra qu'il avait pris son parti. Bien qu'elle se soit montrée cavalière avec lui, bien qu'il soit officiellement à la solde de Krystel, Hannah sentait qu'il cachait une double personnalité sous sa carapace d'homme de main de la Reine.

Qu'elle ne fut pas sa surprise quand elle reconnut, au milieu d'eux, mais pourtant un peu en retrait, le shérif Julien Guillemaud ! Elle ne le connaissait pas bien, mais savait qu'il possédait un titre reconnu et important parmi les vampires. Si elle recula et resta muette, c'est qu'elle avait peur de sa réaction. En effet, il pouvait tout à fait la réprimander ou la punir de sa conduite dangereuse. Après tout, il travaillait pour le Roi et à ce titre, il était peut être chargé de la surveiller. Ces premières paroles à l'intention de Camille ne changèrent pas ses craintes ; il pouvait tout à fait se montrer respectueux envers un humain inconnu, mais elle, n'était pas une inconnue parmi le monde vampirique : d'abord de par son statut de servante de William, puis celle de soeur du jouet de la Reine, et enfin, par sa punition toute récente par le Roi. Elle portait les stigmates des mauvais traitements d'Augustus King sur son corps, sous sa peau, et les nocturnes rouges savaient mieux que les autres les détecter, les sentir et cela les excitait sûrement. Toute cette souffrance révélée au grand jour, ou plutôt à la grande nuit ! Étalée à l'odorat et au sixième sens de certains...

Contrairement à ce qu'elle pensait, le shérif sut calmer le jeu en s'adressant aux vampires directement et en leur rappelant qui faisait la loi. Hannah se sentit un peu rassurée par ses paroles ; au moins, les vampires ne l'embêteraient plus. En ce qui concernait Mr Guillemaud, elle en était moins sûre.
Quand il s'adressa à elle d'une voix qu'elle trouva calme et respectueuse, elle sentit sa méfiance diminuer un peu.

"Merci, Shérif Guillemaud, pour votre intervention." dit-elle d'un air sincère.
Bien qu'elle soit tête brûlée et casse-cou, elle n'était pas folle au point de nier l'aide réelle que venait de leur apporter le shérif. Quant à la proposition qu'il leur faisait de l'accompagner dans un endroit plus calme ou à une des tables du même bar, elle se tourna vers Camille pour quêter son approbation. D'un coup, elle sentait tellement soulagée en voyant les tensions se dénouer. Ce serait l'occasion de rétablir un dialogue avec le jeune homme, qu'elle sentit encore sur le qui-vive, tout comme elle.

"Camille, qu'en pensez-vous ? Je n'ai pas été très... agréable tout à l'heure et j'en suis désolée. J'espère que vous accepterez de vous joindre au shérif et à moi-même, pour une soirée un peu plus calme."

Le corbeau analysa le buveur de sang avec attention. Venait-il de la sauver ? Personne ne pouvait réellement le prédire. Oui, il avait éloigné les autres vampires mais de quelles intentions était-il lui-même animé ? Une question qui frustrait le voleur au plus haut point. Il lui avait bien dit de se détendre mais comment pouvait-il réellement baisser sa garde dans ce fichu endroit ? Son regard passa de la jeune femme à l’inconnu cherchant à comprendre le lien les connectant l’un à l’autre. De toute évidence, ce type était important. Dans la hiérarchie vampirique, il devait se placer au-dessus des autres. Quelque part entre le Roi et les simples vampires. Ça aurait dû rassurer Camille mais le fait est que ça ne le réconforter en rien. Il se présentait comme une main secourable, bien c’était toujours ça de pris. On pouvait au moins affirmer qu’il avait su gérer les choses rapidement et efficacement même si le but de son instant photographie échappa complètement au français. Il valait sûrement mieux qu’il l’ignore. Le riche héritier veillait à capter chaque mot qu’il prononçait afin de saisir la situation. Son ignorance le mettait en position évidente de faiblesse et ça n’était franchement pas conseillé contenu du lieu, des circonstances. Une invitation un peu trop aimable mais il semblait connaître sa compagne. En tout cas, il connaissait son nom de famille. Le fumeur ne pouvait même pas prétendre cela. Franchement, il se demandait ce qu’il foutait là pour la millième fois de la soirée. Agir sous une impulsion et un sentiment, voilà ce que ça entraîne. Mais peut être que cette soirée n’était pas totalement perdue. Même si cela semblait risqué, cette entrevue pouvait s’avérer profitable. Qui sait ? Il restait muet le temps que sa voisine réponde à son sauveur et fût carrément surpris qu’elle lui propose de rester. Vu ses réactions extrêmes, il avait cru qu’elle les planterait là ou du moins, qu’elle le renvoie. Après l’avoir pris pour un espion de Krystel, elle avait tenté de se débarrasser de lui. Cette fille était plutôt instable. Qui était-il pour la blâmer ? Il ne savait pas ce qu’elle avait vécu pour être dans cet état. Ça ne servait à rien de la juger sans prendre en compte tous les paramètres. Actuellement, elle réclamait son avis sur la question, elle n’avait pas pris la décision seule. Il trouva ça plutôt sympa de sa part. En tout cas, il appréciait la démarche. D’un hochement de tête, il approuva cette solution bien que l’envie de quitter ses lieux le grignotait de toute part. Shérif hein ? Même rang que le prince Raybrandt.

« Ça ne me pose pas de problèmes, je vous suis. »
Le jeune homme reporta son attention sur le shérif donc. Il eut envie de le remercier mais après tout, tout ceci n’était pas son problème. C’était celui de la brunette. Il s’abstint d’abuser de politesse. Quelque chose lui disait que ça ne le mènerait pas très loin. Oui, bon, il était juste las de tout ce protocole futile. Le volatile balaya d’un regard l’assemblée à présent dispersée aux quatre coins du bar. Oui, Hannah avait peut-être raison, ça serait une discussion plus calme. Du moins, il fallait franchement l’espérer. Une bonne partie de son être continuait instinctivement de se méfier. Ça n’avait pas vraiment avoir avec sa nature, enfin c’était ce qu’il croyait en tout cas. Quelque chose le mettait mal à l’aise, lui intimait le besoin de rester sur ses gardes. Sa paranoïa parlait sûrement. Mais on n’était jamais trop prudent. L’idée qu’il puisse flairer son odeur et en déduire quelque chose d’assez similaire à ce que William avait pensé, ne lui effleurait même pas l’esprit. Pour l’instant, le seul objectif était de sortir de là sans qu’aucun d’entre eux ne se fasse étriper.

« Si nous pouvions changer d’endroit par contre, j’apprécierais. Ne vous méprenez pas, je ne ne remets pas votre autorité en doute. Je crois juste que ça n’est pas l’endroit idéal pour une conversation.»

Trop d’oreilles traînaient par ici et trop de regards étaient encore jetés sur leur drôle de petit groupe. A moins qu’ils trouvent un pan du bar assez confiné, l’oiseau doutait que le lieu soit adapté. D’accord, leur conversation n’aurait peut-être rien de croustillant, rien qui nécessite une absence partiel d’êtres vivants – ou plus ou moins vivant du moins. Peu importait. L’humaine n’avait pas besoin de publicité – bonne ou mauvaise, en ce moment. Inutile de leur fournir de quoi alimenter d’autres ragots. Enfin… Ils faisaient ce qu’ils voulaient maintenant. De toute façon, ici ou ailleurs, Camille ne saurait être parfaitement apaisé.

Au moment de mon intervention, un personnage avait attiré mon regard au fond de la pièce. A présent que la majorité des personnes qui s'étaient attroupés autour d'eux il y a quelques instants s'en fut retourné à sa soirée, un vampire parmi eux continuait à fixer la jeune femme. En un regard je le reconnu: il s'agissait d'un des employés de la Pomme du diable, l'établissement que tenait William, un dénommé Leslie il me semble. Que faisait-il ici? Etant donné son attitude, je pu en déduire qu'il devait certainement protéger la jeune humaine, soit par amitié ou bien car c'était sa mission. A voir. Quoi qu'il en soit je tournai la tête vers les deux humains en attendant leur réponse.

Bien, ils acceptaient de se joindre à moi bien que le mâle semblait moins à l'aise que sa compagne de la soirée à ce propos. En effet si la jeune femme avait accepté de rester en ces lieux, lui avait demandé à ce que l'on change d'endroit. Cela ne me posait aucun problème, à tel point que j'allais leur proposer de venir chez moi, même cet humain que je ne connaissais pas pour le moment. Au pire je me chargerai de le tuer si jamais il représentait un danger pour moi ou pour l'humaine.

Je n'y vois pas d'inconvénient, si vous le souhaitez nous serons plus tranquille en ma demeure, à l'abris d'idiots enivrés. leur dis-je en un clin d'œil au vampire qui avait alpagué de manière impolie la femme Badenov. Rendons-y nous à pied, nous n'en aurons que pour quelques minutes, si vous voulez bien. Ce disant je tendais le bras comme pour indiquer la direction à prendre. Alors qu'ils passèrent devant moi, une odeur particulière vint me chatouiller les narines, familière même. Je levai la tête pour en trouver la source, ne me rendant pas compte sur l'instant qu'elle provenait de l'humain. Alors que nous allions quitter le bâtiment, je jetai un dernier regard dans la salle, plongeant mon regard dans celui du vampire cité précédemment. Je maintins mon regard quelques secondes afin de lui faire comprendre que je l'avais remarqué puis passa le pas de la porte à la suite de mes deux compagnons de soirée. Tout en marchant en direction de Satanas' Runway j'engageai la discussion.

Et bien mademoiselle, sans vouloir vous offenser bien entendu, je ne pense pas que vous attirer des ennuis en ce moment ne soit le mieux pour vous me semble-t-il. Mais bon, à présent nous allons pouvoir converser un peu tout les trois dans de meilleures conditions, dis-je en souriant, qui est donc votre jeune compagnon que je n'ai pas la joie de connaitre? demandai-je poliment à la demoiselle avant de m'adresser de la même manière polie au jeune homme. Camille c'est bien ça?

SUJET SE DEROULANT MAINTENANT CHEZ JULIEN GUILLEMAUD

La situation avait tellement évolué ! Hannah repensait au début de la soirée où elle était prête à exploser de l'intérieur, et à entraîner tout le bar avec elle ! Elle se sentait proche de la déchéance ; elle touchait le fond et là, un homme, dont elle se méfiait encore un peu, était venu la tirer de son désespoir. Auprès de lui, elle se disait que la vie valait peut être le mérité d'être vécue, puisque on découvrait autour de soi des personnes exceptionnelles, qui se révélaient attentives à la souffrance et prêtes à l'aider.
Oui, mais à quel prix ? Y aurait-il des conséquences à cette aide qu'elle pensait désintéressée ? Hannah avait décidé de reconnaître les actes altruistes de Camille devant tous, et surtout pour qu'il sache qu'elle avait apprécié son aide.

Oui, elle était prête à aller ailleurs, et pourquoi pas à quitter cet endroit, comme le suggérait Camille. On sentait dans sa voix comme une urgence, l'envie de ne pas rester là. Elle pouvait le comprendre : il n'avait pas demandé à atterrir au milieu de toute cette tension. Il s'était trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Encore qu'il avait sûrement une raison pour se trouver au Damned Angel à cette heure et tout seul : un ordre de sa maîtresse ?

Gentleman, Julien leur proposa de se rendre chez lui. Pas de problème pour elle, même si une légère appréhension vint lui pincer l'estomac. *Ah non c'est seulement la faim !* soupira t-elle. Elle se demanda si l'annonce de sa faim devant une assemblée de vampires énervés ferait un bon effet !!

Elle consulta pourtant Camille du regard avant d'acquiescer. Elle ne voulait pas lui forcer la main, mais plutôt le rendre bien disposé envers elle. De cette manière, peut-être pourra t-il lui révéler plus facilement la raison de sa présence dans le bar, ou bien le rôle qu'il joue auprès de Krystel, ou autre chose ?

Une fois dehors, Julien la rappela à l'ordre, toujours d'une manière polie, mais on sentait qu'il ne comprenait pas pourquoi elle était sortie dans un quartier pareil. Elle-même ne souhaitait pas s'étendre sur le sujet : elle avait pété un câble, et bien cela arrivait à tout le monde ! Ce qu'elle avait vécu avec Augustus, cette nuit qu'elle n'oublierait jamais, était une excuse suffisante pour vouloir frôler la mort.
Heureusement, sa phrase n'amenait pas de réponse urgente. Il se tourna bien vite vers Camille, lui aussi clairement intéressé par cet humain. Hannah laissa Camille se présenter lui-même. Elle en apprendrait ainsi elle aussi sur lui, comment il se dénommait et ce qu'il faisait là.

Une bourde ? Pire que ça. Il venait de quitter un guette-à-pant pour se réimplanter le pied dans d’autres quenottes. A l’abri de tout regard, ce shérif pouvait très bien les éliminer. Sans tâches ou presque, ni vu, ni connu. Le corbeau se gifla mentalement en analysant son comportement de façon critique. La paranoïa ne le sauverait pas, pas plus qu’elle ne pouvait réellement l’aider. De toute façon, ils se dirigeaient irrévocablement vers Dieu seul savait quel endroit. Camille ne craignait pas vraiment les vampires, disons juste que dans ce cas-ci, tout semblait s’enchainer avec un peu trop rapidement à son goût. Il avait été trop sur la défensive durant la dernière heure, il devait relâcher un peu la pression qu’il exerçait sur son corps entier. Ca ne lui ressemblait pas d’être autant alerte - enfin, en dehors de ses activités professionnelles. Il voulait s’éloigner de la malfaisance transpirante du Damned Angel mais de là à pénétrer dans la tanière de leur « sauveur »… Le métamorphe coula son regard jusqu’à l’inconnu. Car oui, il ne savait pas qui était ce buveur de sang, il n’avait aucun élément entre les mains, un désavantage plutôt conséquent. Shérif Guillemaud, c’était tout ce qu’il savait jusqu’ici, un peu maigre. Ce qu’il détestait se trouver dans l’ignorance, il y perdait tout sens de contrôle. Depuis qu’il se trouvait en Ecosse, il avait eu la sensation de ne plus rien maîtriser. Ça avait ses avantages comme ses inconvénients. Enfin dans ce cas-ci, tant pis, ils s’étaient lancés à corps perdus désormais, autant en tirer profit. Il aurait au moins la chance de connaître un autre dirigeant de ce monde vampirique. Il détendit quelque peu ses traits un peu crispés afin d’offrir l’ébauche d’un sourire à leur futur hôte. Il envoyait sa main promené dans l’air tout en calant ses pas sur ceux de son interlocuteur.

« Camille Fontayn. »

Ça n’est pas parce qu’on s’adresse à un sang-froid qu’il faut pour cela négliger les conventions sociales. Et puis, ne dit-on pas qu’une poignée de mains divulgue à elle seule beaucoup de choses sur la personne avec qui on sympathise ? En tout cas, c’était ce que le riche héritier pensait. Après avoir été entouré de requins en tout genre et avoir dû dès son plus jeune âge apprivoiser cette manière de saluer la grande société, il avait appris à y accorder de l’importance. Ses observations pourraient à nouveau portées leur fruit. De là à être juteux et savoureux par contre mais ça ne lui coûtait rien, c’était de toute façon un automatisme.

« On peut dire que vous vous êtes trouvé au bon endroit, au bon moment. »

Le rictus du volatile se fit un peu plus franc. Quitte à discuter, autant que ça se fasse de façon agréable. Une partie de son être ne mit pas en veille sa méfiance mais il y avait de l’amélioration dans son attitude et sa nervosité. La nuit accentuait ses sens et il en fût reconnaissant. Ils évoluaient donc toujours dans les rues. Ne pas savoir la réelle destination ne perturbait pas le voleur, c’était plus de savoir comment se déroulerait les événements une fois arrivé qui le laissait songeur. Ils allaient vraiment discuter autour d’un verre ? La soirée promettait d’être riche en rebondissements. Un peu de piment ne pouvait pas faire de tort.

« J’espère que nous n’avons pas trop importuné vos projets de ce soir. »

Le français tentait d’en apprendre un peu plus sur ce Guillemaud sans avoir l’air trop indiscret. Cela lui faisait bizarre de parler en son nom et celui d’Hannah. Après tout, ils n’étaient même pas amis, même pas de vraies connaissances. Cette situation était purement grotesque et elle arracha d’ailleurs un sourire amusé au jeune homme. A propos de situation d'ailleurs, l’espèce de garde rapprochée dont bénéficiait la brunette, ne devaient-ils pas la suivre en cet instant ? Bah, cette pensée ne fit que traverser l’esprit du changelin. Car ça n’était toujours pas ses oignons.

Après ma prise de parole, et alors que nous progressions encore dans les rues d'Edimbourg pour nous rendre jusqu'à chez moi, la servante de William ne dit mot, laissant son camarade de soirée répondre. J'écoutais attentivement ses paroles et tentais d'en savoir davantage à son sujet. Sa manière de parle, ainsi que sa manière d'être laissaient penser qu'il avait eu une éducation dite de bonne famille. Etait-ce du à cela qu'il paraissait aussi avoir connaissance de l'étiquette envers un dirigeant vampire? A moins qu'il n'en connaisse un autre dans son entourage? Plusieurs questions me trottaient donc dans la tête, notamment une, savoir comment un simple humain comme lui s'était rapproché de la servante punie du prince William. Je ne sais pas pourquoi mais cela ne me semble pas très, hasardeux, comme si cela était voulu de la part de l'un ou de l'autre, toutefois je ne laissai rien paraître de mes réflexions et décidai de répondre à l'humain.

Enchanté monsieur Fontayn, dis-je d'un sourire amical sincère mais totalement feint de ma part, avec toute la maîtrise que j'avais pour paraître amical envers les humains lorsqu'il le fallait, aussi répugnant cela soit-il. Disons que mon statut m'impose de me tenir au courant de ce qui se passe dans ce domaine dont j'ai la charge, et d'être à l’affût de certains signes. D'autant que j'ai des yeux et des oreilles partout en villes, dans chaque quartiers même ceux où notre espèce n'est pas censée être. Quand à ma soirée, ne vous inquiétez pas je puis à loisirs modifier mon emploi du temps à ma guise. dis-je en affichant un sourire dont aucun humain n'aurait pu douter, ni deviner ce qui se cachait derrière. Pourquoi me plier ainsi à jouer avec les apparences plutôt que d'afficher clairement mon méprit pour les humains? Disons que je n'avais pas la puissance ni la prestance du Roi, aussi devais-je faire avec mes aptitudes pour obtenir ce que je souhaitais. Et pour cela je devais parfois me montrer amical et bien disposé à l'égard de quelques humains afin d'endormir leur méfiance afin que le jour où je devrai me servir d'eux, il ne voit qu'un vampire ami des bêtes, enfin des hommes.

Alors que la discussion continuait, nous arrivâmes devant ma porte. En tant normal aucun humain ne pouvait entrer en ma demeure vivant, à moins d'être mon repas à venir. Mais ce soir ce n'était pas le cas, et si j'accueilli pour le coup deux humains chez moi cela n'était pas sans raison. Lesquelles? Patience voyons... Pour l'heure je les fis entrer dans mon salon, les invitant à poser leur manteau sur le porte-manteau avant de leur proposer un siège. Les laissant patienter dans leur siège, je fis le tour de la cuisine américaine pour vider une poche d'hémoglobine prise à une banque de sang humaine dans une carafe puis d’ouvrir un de mes placards afin d'en sortir une vieille bouteille de whisky. Non pas que je buvais de cette boisson, mais il m'arrivait d'en servir à boire parfois lorsque j'amenai une humaine ici avant de la prendre puis de boire son sang jusqu'à ce qu'elle en meure. Que faisais-je alors du corps? Et bien je le descendais à la cave, le jetai dans la vieille baignoire en fonte prévue à cet effet et la remplissais d'acide. Lorsque tout avait fondu, je vidais le récipient dans un abreuvoir en pierre qui était taillé dans le mur. Pourquoi une telle chose dans une cave? Pour faire court je n'avais pas choisi cette demeure au hasard. A une autre époque il s'agissait de la demeure d'un chirurgien, et cette cave était son laboratoire. Ce qu'il vous faut savoir c'est que cet humain avait alors mené en cette cave quelques expériences sur ses propres congénères, et à cette époque il se débarrassait déjà de cette manière des cadavres. Fermons là la parenthèse à propos de ma manière d'éliminer mes déchets et reportons notre attention sur mes deux visiteurs d'un soir.

Si je les avais fait venir ce n'était pas pour jouir de leur présence, mais pour en apprendre un peu plus sur cette humaine que le Roi en personne avait puni suite à son comportement au cours du mariage royal. De plus si je pouvais en apprendre aussi un peu sur le mâle qui l'accompagnait cela ne pourrait qu'être un plus. Je revins donc m’asseoir à mon tour dans un de mes fauteuils après avoir posé deux verres à whisky ainsi que la bouteille du même alcool sur la table basse ainsi que ma carafe pleine de sang dont je me servis un verre avant de le poser sur le guéridon proche de mon siège. Je laissai le soin aux deux humains de se servir s'ils en avaient le souhait. Je bus ensuite une gorgée de sang avant de m'adresser à eux.

Veuillez m'excusez je vous prie, je n'ai rien d'autre à vous offrir que ce whisky de quinze ans d'âge, n'hésitez-pas à vous servir. leur indiquai-je avant de poursuivre. Etes-vous de vieux amis mademoiselle Badenov et vous, ou bien êtes-vous collègues de travail? demandai-je aux deux humains sans m'adresser à l'un ou l'autre en particulier. Concernant Hannah, je savais qu'elle était la servante de William et que Leslie, un vampire sous les ordres du Prince, était chargé de sa sécurité. J'avais d'ailleurs aperçu ce nocturne ce soir alors que l'humaine se donnait en spectacle et tandis qu'il tardait à intervenir je lui avais signifié d'un regard que je prenais le relais pour la soirée. Concernant le second humain dans mon salon, j'ignorai tout de lui même si son odeur me semblait familière sans pour autant l'identifier. Et puis sa manière d'être me laissai penser qu'il devait avoir des contacts réguliers avec un autre vampire dont j'ignorai l'identité. A moins que vous ne serviez le même vampire? demandai-je cette fois directement au jeune homme en souriant avant de boire une nouvelle gorgée de ce liquide pourpre que j'affectionnais tant, le sang AB+. Quitte à s'approvisionner dans une banque de sang, autant prendre celui que je préférais.

Hannah s'était sentie soulagée par la tournure des évènements : même s'ils avaient réussi à sortir du bar, la zone n'était pas très sûre pour deux humains et sa réputation l'empêcherait de s'en tirer sans encombre. Les vampires pourraient tout à fait les suivre et les tuer tous les deux, sans autre forme de procès ! De plus, Camille n'avait pas demandé à être impliqué dans cette histoire. Il aurait été victime de ce qu'on appelle "être au mauvais endroit au mauvais moment". Elle avait bien tenté de le dissuader de s'approcher d'elle et de l'aider, mais il semblait tenace et voulait croire à son salut. D'une certaine manière, par la confiance qu'il avait en lui-même, en sa capacité à l'apaiser, il l'avait certainement aussi bien sauvée que le shérif. Oui, en apparence, l'intervention sans appel de Julien Guillemaud les avais "sauvés". Mais dans l'esprit d'Hannah, Camille aussi avait joué un rôle. Il faudrait qu'elle le remercie plus tard. Si elle le pouvait bien sûr !
Oui, le shérif les avait "sauvés". Mais pour combien de temps ? Hannah doutait maintenant qu'ils étaient en sécurité auprès du shérif. Il faisait partie des amis de la royauté et ne manquerait pas d'envoyer un rapport détaillé sur la soirée qu'Hannah Badenov, pomme de sang du prince, avait passé au Damned Angel, en compagnie d'un humain non identifié, à l'intention d'Augustus et de Krystel. Cette escapade nocturne serait notée et on viendrait peut être la voir à ce propos. On allait lui en parler. Que répondrait-elle ? Qu'elle avait eu envie de mourir après la punition du roi ? Que se perdre dans un endroit mal famé, sans personne pour la surveiller, était un moyen pour elle de se sentir vivre, de se sentir libre ?

Camille non plus n'était pas en sûreté : qui savait ce qu'il pouvait se passer pour eux, une fois franchie la porte de la maison de Mr Guillemaud ? Trop tard, pourtant. En marchant, ils arrivèrent trop vite jusque chez lui. Le vampire pouvait tout à fait décider de tuer Camille, témoin gênant, et de menacer Hannah pour qu'elle ne dise rien. De toute façon, à qui pourrait-elle en parler ? Les autorités ne pourraient rien faire et ne la croiraient même pas !

Une fois à l'intérieur, Hannah tenta de se calmer. L'excitation de la soirée et l'adrénaline qui l'avait envahi devant les dangers qu'elle courrait peinaient à se dissiper. Elle avait très chaud, trop. Cette envie de fraîcheur la poussa à accepter le verre de whysky et à le vider à moitié. Devant leurs regards surpris, elle déclara franchement :

"J'avais si soif et il faisait si chaud dans ce bar !"
Qu'ils la croient donc ivre ! Elle l'était peut être, elle n'en savait rien. Elle s'en fichait. Elle s'assit sur le canapé alors que les deux autres prenaient place dans des fauteuils. Elle décida de prendre de grandes inspirations et de se calmer un peu. Elle voulait suivre la conversation et surtout ne pas s'endormir sur le sofa !

"Etes-vous de vieux amis mademoiselle Badenov et vous, ou bien êtes-vous collègues de travail ? A moins que vous ne serviez le même vampire?" demanda Julien en s'adressant d'abord aux deux, puis à Camille. Hannah décida de profiter de son état de faiblesse et ne tint pas compte de la dernière question adressée à Camille. Sans lui laisser le temps de répliquer, elle répondit donc:

"Oui nous nous connaissons depuis quelques temps. Je l'avais perdu de vue et nous nous sommes retrouvés dans ce bar. N'est ce pas, Camille ?"
Elle adressa un sourire chaleureux au jeune homme, espérant qu'il suive la perche tendue. Il devait bien comprendre que deux humains n'avaient rien à faire chez un vampire tard le soir, et qu'il valait mieux pour eux deux aller quelque part où être tranquilles et en sécurité !

L’entrée se présenta à eux trop rapidement. Camille n’avait pas eu le temps de se faire une idée sur son hôte et cela le chiffonnait un peu. Les seules informations à avoir filtrées ne le rassuraient pas forcément. Le vampire avait laissé sous-entendre son influence sur la ville mais également sa grande vigilance. Mais pour ses intentions ? Etre craint ou respecté ? Les deux concepts pouvaient très bien se compléter et pourtant, un des deux dominait toujours. Surtout quand il s’agissait des nocturnes rouges… Il finirait peut être par le savoir mais sûrement à ses dépens. Et donc, ils se trouvaient là face à la demeure du shérif. Le métamorphe détailla minutieusement la façade ainsi que le quartier. Toujours repérer les lieux et les mémoriser – déformation professionnelle. Il balaya les environs avec discrétion cependant, entraîné à analyser le décor sans que personne ne le remarque. Pas sûr que sa capacité à enregistrer les moindres détails lui soit d’une grande aide cette nuit. Sauf si il devait sortir de là vite, par la meilleure issue. Mais il ne devrait pas aller jusque-là tout de même ? Hannah n’aurait pas suivi ce type si elle le jugeait dangereux, non ? Enfin en même temps, nous parlions de cette même jeune femme qui avait cherché à provoquer les buveurs de sang un peu plus tôt… Ses capacités à discerner les limites semblaient altérées par son instabilité émotionnelle. Autant dire qu’il ne pouvait pas s’appuyer que sur la confiance partielle d’une inconnue jugée fragile. Mais nous l’avons dit plus haut, il venait de se jeter dans la gueule du loup, trop tard pour s’inquiéter des dents acérées de la bête. Il pourrait toujours choisir la méthode, la tactique afin de s’extirper de sa bouche, en lui grattant le palais ou en lui brisant une quenotte. Il réfléchissait déjà à une stratégie de fuite alors qu’il n’avait pas franchi le seuil. Son instinct le menait sur cette voie et il n’aimait pas ça du tout. Enfin apprécier ou non la suite des événements n’avait plus d’importance. Aussi, il franchit la porte et suivit le propriétaire. Sa méfiance accentuait ses sens et la première sensation qui le percuta fut d’ordre olfactif. En effet, une odeur étrange chatouilla ses narines et il respira à plein nez la fragrance pour trouver son origine ou du moins, sa nature. Il la détacha nettement du reste des parfums et en vint à cette conclusion, souffre ou ail. Les deux restaient confuses, l’une ressemblant à l’autre. L’ail restait presque anodin voir carrément ironique. Mais le souffre relevait d’autres questions, d’autres indices inquiétants. Pour la provenance, il ne put la cerner clairement car pour poursuivre sa piste, il aurait dû dévier de leur trajectoire ce qui était évidemment, inacceptable pour l’instant. Ce détail le mit un peu plus sur ses gardes et inconsciemment, il focalisa son attention sur tout ce qu’il entourait. Chose vivante ou non. Quand il entrait dans ce genre de phase, il faisait abstraction des bruits proches, déjà identifiés. Aussi, il ne perçut en rien l’invitation de son hôte à ôter sa veste afin de la poser sur le porte manteau. Il s’assit sur le divan en la gardant sur les épaules. De toute façon, comment se mettre à l’aise alors que toutes les pièces assemblées formaient une drôle d’image ?

Le shérif revint donc avec les breuvages. Si la carafe remplie de sang dérangea le corbeau ? Aussi bizarre que cela puisse paraître, ce détail ne le troubla pas du tout. Il avait une vision assez personnelle sur le régime alimentaire de ses créatures. Il servait lui-même de repas à sa maîtresse et cela ne l’avait jamais vraiment froissé ou même chamboulé. La première fois qu’elle lui avait planté ses crocs dans la nuque, avait été surprenante et sûrement impressionnante. Mais après ce stade dépassé, le français ne s’était pas senti menacé par les habitudes nutritives de cette espèce. Enfin, après tout, la Reine s’abreuvait de son hémoglobine tout en le maintenant en vie alors pourquoi pas ? Les humains étaient bien carnivores. Même s’il ne se sentait pas effrayé à l’idée d’être mordu et prélevé de son sang, il ne désirait pas pour autant servir de dîner à tous les vampires. Son essence n’appartenait qu’à Krystel et ce fait semblait clair. Il ne pensait pas que le propriétaire de cette demeure cherche à s’abreuver mais sait-on jamais ? Il y avait de toute façon pire à craindre que ça… Mais arrêtons là les suppositions, elles ne l’aideraient pas. Hannah se chargea de le détourner de ses préoccupations en se jetant sur le Whisky avec empressement. Elle vida la moitié de son verre d’une seule traite. Dans un autre contexte, peut-être qu’il en aurait ri mais dans ce cas-ci… La jeune humaine ne réalisait pas que se saouler ne ferait qu’empirer la situation. De plus, le nectar en lui-même pouvait très bien être mortel. Oui, le voleur commençait à développer une psychose à propos des breuvages offert. Il ne savait pas encore identifier tous les poisons et cela le mettait en position de faiblesse. Il observerait sa compagne pour voir si elle ne développait pas de troubles par la suite. En attendant, il ne prendrait rien. Stupide car il ne préservait pas grand-chose des apparences avec son manteau toujours sur le dos et aucun verre à la main… Ok, alors, il allait remédier au premier souci. Il retira lentement sa veste et la posa près de lui sur l’accoudoir. L’homme se mit alors à lancer la discussion ou les hostilités à vous de juger. Avide d’informations lui aussi ? Ils étaient deux dans ce cas. Alors que le changelin échafaudait une réponse plausible, la brunette prit les devants et répondit. Par chance, elle mentit. Enfin, ce qu’elle dit était la vérité finalement. Oui, ils s’étaient vraiment perdu de vue et oui, ils s’étaient retrouvés dans ce bar. Par contre, le sous-entendu de l’amitié lointaine… Enfin, il ne voulait pas évoquer Krystel, ni les circonstances de leur rencontre. Surtout qu’il ignorait tout de ce gars.

« Oui, du hasard total, je ne m’attendais pas à te voir ce soir. »

Le tutoiement était venu naturellement. Après tout, ils étaient ensemble dans la même galère, alors ça les rapprochait certainement. Plongé dans la même combine pour sortir de là vivant et sans trop en dévoiler. Oui, il semblait qu’ils soient sur la même longueur d’onde. Tant mieux. Un sourire pointa sur les lèvres de l'oiseau.

« C’est la première fois que je mettais les pieds au Damned Angel. C’est toujours autant agité en temps normal ?»

Diversion. Il s’excusa mentalement auprès d’Hannah car la tournure de la discussion pourrait être embarrassante pour elle. Mais c’était un moindre mal. Enfin, il fallait l’espérer. Il ne pouvait pas le laisser creuser sur leur « amitié » et puis, au moins, il avait réussi à ne dire que des choses vraies. Il devait un maximum jouer la sincérité comme il avait l’habitude de procéder. Le mensonge ne payait pas ou trop peu. Et il ne fallait jamais jouer avec un vampire sur ce terrain-là. Pas si vous teniez à la vie.

Je ne pensai pas que l'humaine prendrait mes mots au pied de la lettre et se jetterai pour ainsi dire sur l'alcool et viderai son verre en deux gorgées. Et bien, si elle avait autant d'appétit dans d'autres domaines, le Roi n'avait pas dû s'ennuyer. Lorsqu'elle répondit à ma question, je ne pu m'empêcher de sourire dans mon esprit. Son ton envers l'humain qui émettait une odeur familière était plus chaleureux envers lui que plus tôt dans la soirée. Je ne relevai pas le détail pour le moment, préférant laisser le mâle répondre à la jeune femme, j'étais curieux de sa réponse aussi je bus une nouvelle gorgée de sang en l'écoutant. Et il ne tarda pas à satisfaire ma curiosité en employant le tutoiement. Heureuse surprise quand je repensai à leur conversation passée au Damned. Pourquoi se vouvoieraient-ils en public pour se tutoyer devant moi? Je sentais les prémices de la comedia del arte apparaître devant moi sous l'aspect des deux humains. Leur tentative pour se jouer de moi m'amusait, aussi je décidai d'entrer moi aussi dans ce jeu, à ma manière.

Ainsi donc vous vous étiez perdu de vue, c'est sûrement pour cette raison que vous employiez le vouvoiement tout à l'heure alors. dis-je d'un sourire discret avant de poursuivre. Mais rassurez-vous, je n'ai rien contre le fait que deux vieux amis se tutoient. dis-je d'un air entendu. Je sous-entendais là que je ne leur tenais pas rigueur de me mentir à ce sujet, sur un ton plein d'ironie. Je m'interrogeai l'espace d'un instant quant à la raison d'un tel choix de leur part. Avaient-ils donc si peur de moi pour vouloir ainsi se protéger? Je dois avouer que si tel était le cas, cela n'était pas pour me déplaire. Je bus à nouveau à ma coupe avant de répondre à la question de l'humain. Question sans grand intérêt si ce n'est de détourner le sujet de la conversation. Après tout quoi de plus normal qu'ils ne souhaitent pas s'étendre sur leur amitié après leur petit stratagème.

Disons qu'en temps normal l'établissement ne fournit que très rarement un spectacle à ses clients. Une nouvelle fois j'affichai un léger sourire en énonçant mes paroles. Je voulais voir quelle allait être la réaction des deux humains, mais décidai cependant de les rassurer un minimum, si mes mots à venir pouvaient vraiment les rassurer. Toujours est-il que vous n'avez rien à craindre avec moi ce soir et qu'il est donc inutile de vous ennuyer à feindre certains éléments. Je suis au service de mon Roi et de ma Reine, aussi comme il en est de mon devoir, je voulais simplement m'assurer que votre soirée n'aura pas été désagréable. dis-je en souriant pleinement d'un ton cordial. Ces paroles pouvaient tout aussi bien les rassurer qu'au contraire les effrayer. Et cela n'était pas pour me déplaire malgré tout le sadisme de la situation.

*Ouh là... Je n'aurais pas du me mettre à boire.* L'alcool lui montait rapidement à la tête. D'abord dans son ventre où il créait une marée chaude, et ensuite remontait doucement jusqu'à tous ses sens. Elle n'aurait pas du peut être, mais elle n'était pas dans son état normal. *J'ai une bonne excuse, j'ai été traumatisée !* pensa t-elle avec force. Normalement, après avoir subi un fort choc émotionnel, on proposait aux victimes de consulter un psy. Est-ce que quelqu'un avait pensé à cela ? Non personne ne faisait attention à sa souffrance intérieure. Aussi bien physique que mentale. Elle avait encore saigné ; elle pouvait sentir dans ses entrailles la douleur comme s'IL venait de la pénétrer encore. Cette soirée, la rencontre avec Camille, le danger et la fuite, puis la rencontre avec Julien, tout s'effaçait peu à peu. Ce n'était qu'une façade souriante, pleine de couleurs, mais derrière tout cela, se trouvait les ténèbres dans lesquels elle était plongée depuis son "entrevue" avec le roi. Et ça, Julien s'en doutait. Camille un peu moins. Il ne devait pas être au courant du tout en fait.

Hannah reposa son verre brutalement. Fébrile, elle passa une main sur son front chaud. Le malaise monta quand le shérif démontra qu'il voyait clair dans leur jeu. Il savait que Camille et elle mentaient. Elle se sentit mal, surtout qu'il y avait dans l'air comme une odeur qui se dégageait, une odeur malfaisante... *Tu exagères Hannah, c'est ton odorat qui s'est développé à cause de l'alcool...*
Peu confiante dans l'endroit où elle se trouvait, il lui fallait quand même s'excuser et chercher les toilettes. Elle ne se sentait pas bien du tout. Allait-elle se mettre à vomir ? Non, mais il valait mieux pour elle rejoindre les toilettes au plus vite.

"Monsieur Guillemaud, avez-vous.. Pouvez-vous m'indiquer où sont les toilettes ? J'ai besoin de me rafraîchir, s'il vous plaît." balbutia t-elle. Son regard était un peu perdu dans le vague.
"Camille, tu peux m'accompagner s'il te plaît ?" demanda t-elle enfin. Elle ne savait pas pourquoi elle avait dit ça au juste, mais elle ne voulait pas être seule dans cette grande et sombre maison.

Tromper un vampire ? Ahah. Quelle idée stupide. Cependant, il s’était dit que ça valait toujours le coup de tenter. Maintenant leur hôte serait un peu plus insatiable, un peu plus curieux et sur ses gardes peut-être même. Il se doutait que ses deux invités omettaient tous deux des choses intentionnellement. Le restant de la conversation promettait. Camille pressentait des dérapages et ça avait le don de le rendre nerveux. Jusqu’à quel niveau pourraient-ils limiter les informations ? Plus question de duper mais il faudrait jouer sur les mots. Le buveur de sang les intimait à la confiance, à la confidence même. Il avait beau servir Roi et Reine, le voleur ne se sentait pas assez rassuré pour délier sa langue. De toute manière, il était censé protéger au mieux ses secrets. Il y avait déjà eu assez de failles comme ça. William Raybrandt l’avait déjà aperçu au manoir ainsi qu’Hannah. Autant limiter la casse à ce nombre, non ? D’ailleurs est-ce que Krystel savait seulement que ses deux derniers connaissaient son existence ? Il n’avait jamais abordé le sujet et il fallait avouer que ces derniers temps, d’autres soucis plus importants remplaçaient celui-ci. Toujours était-il que le riche héritier ne savait quoi répondre. Il se contenta d’un léger rictus et d’un signe de tête histoire tout de même d’acquiescer aux paroles de leur interlocuteur. Il hésita tout de même à jouer la supercherie mais fût arrêter dans son élan quand la jeune femme froissa l’air de sa voix. Le français se tourna alors dans sa direction et regarda son expression générale. Son teint livide frappa le volatile et il s’inquiéta de sa santé. Le breuvage ? Empoisonné ? Calmons-nous, elle avait sûrement trop bu, rien de toxique là-dedans. Enfin pas au sens où il l’entendait. La requête de l’humaine désarçonna quelque peu le métamorphe. Tout d’abord, il trouvait ça déplacé. Accompagner une jeune dame jusqu'à la salle de commodité, c'était franchement douteux. De plus, si c’était une tentative de diversion afin de discuter, ça ne semblait pas très subtil. En même temps, vu la couleur de son visage, elle devait vraiment être malade. Peut-être n’avait-elle pas envie d’affronter ça toute seule, ce qui serait compréhensible. Le corbeau n’appréciait pas spécialement le fait de devenir un support pour les gens malade, cependant, il n’avait pas vraiment le choix. Il se voyait mal planter la brunette là, de toute façon, il ne voulait pas forcément se retrouver en tête à tête avec le shérif donc. Celui-ci prendrait ce crochet par la salle de bains comment d’ailleurs ? Et puis tant pis. A moins qu’il veuille voir la mortelle déversait le contenu de son estomac sur son parquet… L’alibi n’en était pas vraiment un pas vrai ? Elle semblait réellement aller mal. Le fumeur se leva doucement en versant un regard en biais vers le propriétaire et lui offrit un autre sourire.

« Si vous voulez bien nous excuser. Je pense qu’elle a un peu trop bu. »

En quelques enjambées, il fût à côté d’Hannah et la regarda attentivement. Elle ne semblait pas être à l’aise, on aurait dit qu’elle allait s’écrouler d’ici une minute ou l’autre. Si ça ne tenait qu’au changelin, il l’aurait déjà pris par le bras et mener aux toilettes les plus proches mais tant qu’ils ignoraient la direction, ils restaient pris aux pièges dans cette pièce. Il attendit tranquillement que le maître des lieux leur indiquent le chemin jusqu’à la salle de bain en priant pour que sa voisine tienne le coup. Instinctivement, il posa ses doigts sur l’épaule de sa nouvelle amie, il avait trop peur qu’elle chute. L’épiderme de la jeune femme semblait irradié contrairement à lui dont les doigts éternellement gelés devait répandre plus de fraîcheur qu’autre chose sur la peau de l’humaine. Il espérait qu’elle ne lui en tienne pas rigueur.

Décidément je m'amusais beaucoup ce soir, surtout à malmener un peu les deux humains. Les voir ainsi se démener pour tenter de dissimuler telle ou telle information me divertissait bien pour l'instant tout en me permettant néanmoins d'en apprendre davantage à leur sujet. Par exemple je percevais chez la femme une certaine douleur, qu'elle tentait autant que faire se peut de cacher derrière un masque d'assurance maladroite. Nul besoin d'une grande clairvoyance pour deviner que cela était une conséquence de la punition que lui avait infligé Augustus, pauvre fille. Enfin c'est plutôt une forme de politesse parce qu'en réalité je n'en avais strictement rien à faire, elle avait fauté et avait donc été punie, rien de plus normale. Et encore, elle pouvait s'estimer heureuse d'être en vie. L'homme quant à lui semblait dissimuler plusieurs choses, notamment à propos de leur rencontre ou d'autre chose encore de plus secret. Même si j'en ignorai la nature je gardais en tête l'idée d'en apprendre davantage sur lui aussi.

Pour l'heure je jetai un regard à l'humaine qui semblait sur le point de vomir ses tripes dans mon salon. J'arquai un sourcil pour signifier que cela ne me plairait pas mais elle eut l'excellente idée de demander où se trouvaient les toilettes. Je crus sincèrement qu'elle se sentait mal jusqu'au moment où elle demanda à l'homme de l'accompagner. La première idée qui me vint fut qu'elle voulait s'envoyer en l'air avec lui, idée aussitôt balayée par son incongruité et remplacée par le fait qu'elle souhaitait certainement se mettre d'accord avec lui sur une conduite à tenir ainsi qu'un discours commun. Cette hypothèse me fit sourire et ce fut non sans arrière-pensée que je leur indiquai les toilettes du rez-de-chaussé sans préciser toutefois qu'il y en avait à l'étage. En faisant bien attention je pourrais probablement capter quelques bribes de leur échange secret.

C'est la première porte là, au pied de l'escalier, dis-je d'un air cordial avant de poursuivre. prenez le temps de vous rafraîchir afin que nous puissions continuer à discuter dans de bonnes conditions.

J'affichai un sourire et les suivis du regard lorsqu'ils se déplacèrent tous deux dans les toilettes. Une fois la porte refermée je finis mon verre de sang cul-sec avant de le poser silencieusement sur le guéridon attenant à mon fauteuil. Je fermai ensuite mes yeux et me concentrai sur mon ouïe afin d'en augmenter l’acuité. Ma demeure étant assez bien isolé des bruits extérieurs, je devrais pouvoir entendre une bonne partie de ce qui se dirait dans l'autre pièce derrière la porte close et déjà préparer une nouvelle manière de prolonger le divertissement de cette soirée.