Our fingers are stuck in the socket

Alexis & Roxane & Charlie

Foutue réunion à deux balles. En temps normal elle aurait vu le rapprochement proposé comme étant une bonne chose, elle appréciait fortement les Métamorphes, elle en connaissait pas mal. Mais aujourd'hui elle avait plus ou moins poussé Alexis à choisir la Meute en l'amenant ici après lui avoir dis des choses qu'elle ne pensait pas. Elle se sentait mal et lorsqu'elle avait quitté précipitamment le jardin derrière le bâtiment, la jeune Métamorphe sur ses talons, elle avait prévu de partir loin pour discuter avec elle mais elle se rendit compte qu'elle ne pouvait pas non plus aller trop loin sans quoi Roxane ne les retrouvait pas.

Elle prit la direction de la petite maison où vivait Roxane ainsi que d’autres Loups. Ce n’était pas génial niveau intimité mais elles s’en accommoderaient le temps que la renarde les rejoigne au moins. Elle ne lâcha la main de la jeune fille qu’une fois qu’elles furent rentrées. Avec un soupire elle s’adossa à la porte pour observer Alexis. Nue comme un vers à l’exception du manteau rouge qu’elle lui avait fourni avant de s’éloigner d’elle.

« Je suis désolée pour ce que j’ai dis, tu n’es pas faible Lex, c’est juste que… »

Avec un soupire elle laissa sa phrase en suspend, elle avait tellement de mal à dire les choses qui lui tenaient vraiment à cœur qu’elle commençait à se demander si elle n’était pas tout simplement une handicapée des sentiments. Tendrement elle prit le visage de la jeune fille entre ses mains et posant son front contre le sien. Elle devait lui en vouloir assez pour ne pas être venue la voir pour lui demander de faire le rituel avec elle mais pas assez pour refuser quand elle s’était imposée. C’était frustrant de ne pas savoir si elle lui en voudrait tout de même assez pour lui hurler dessus comme elle l’avait fait devant toute la Meute et les autres Métamorphes. Avec une inspiration profonde, elle ferma les yeux et décida à se livrer un petit peu, donner une explication pour ses agissements.

« Je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose, tout ça c’est déjà de ma faute et là j’enfonce le clou. J’ai promis de te protéger et j’ai l’impression de t’enfoncer dans la merd*. Tout ça c’est de ma faute… Je voudrais juste que tu ais droit à une vie normale. » dit-elle dans un murmure alors qu’elle s’écartait pour l’observer dans les yeux.

Elle aurait pensé avoir envie de pleurer en disant tout ça mais dans le fond elle se sentait étrangement vide. Elle leva les yeux au ciel à cette constatation, qu’est-ce qu’elle était en train de devenir ? Elle reprit ses distances avec la luciole avant que celle-ci ne commence vraiment à l’envoyer chier c’était facile de dire pardon une fois que le mal était fait. Elle se dirigea vers la cuisine en évitant soigneusement son regard. Elle disparu quelques secondes derrière le frigo et en sorti une assiette de jambon cru. Elle grignotait une première tranche avant de finalement lever les yeux vers elle. Plus le silence s’allongeait plus Charlie avait l’impression de suffoquer. L’attente du verdict de savoir si effectivement elle avait merdé au point de non retour était véritablement insupportable. Outre ce rituel bidon, Alexis était comme sa petite sœur et elle ne pourrait pas supporter d’être mise à l’écart de sa vie même si dans le fond c’était peut-être le mieux à faire.

J’avais suivi Charlie, rassurée qu’elle ne me déteste pas. Même si je savais pas, ou ne voulais pas savoir peut-être, ce qu’elle avait à me dire. Je l’aurai suivie au bout du monde, de toute façon. Même alors qu’elle m’avait blessée, plus qu’on ne m’avait jamais blessée intentionnellement. Parce que ce qu’elle disait était vrai. Et que c’était une personne que j’aimais et qui me connaissait qui le disait. Et je voulais plus être faible. Même si j’aimais pas tout ce que ça impliquait, d’être forte. Mais je m’y ferai. Je m’étais faite aux coups de mes grands parents, à l’enchainement, à la malnutrition – s’ils me nourrissaient, à la mort de mes parents adoptifs, à la fuite, à la vie en forêt, à tout. Alors je me ferai de devoir être forte, impitoyable. Je savais que c’était pas par hasard, si je me transformais en tigre. Un dangereux prédateur. Roxie me l’avait dit : on ne choisissait pas notre animal, il était nous, une facette de nous. Si la transformation était facile, en tout cas. Et je m’étais transformée en tigre sans même l’envisager, sans même savoir que je le ferai. Ca m’était venu spontanément. J’avais appris à accepter ce que j’étais et à arrêter de mon considérer comme un monstre, j’apprendrais à accepter le tigre. Petit à petit. Pas à pas.

Je ne savais pas où elle m’avait amenée, mais je sentis l’odeur de Roxane. Elle était souvent ici. C’était rassurant. Même si les autres odeurs me dérangeaient. Je n’avais pas remarqué que j’avais appris à écouter davantage mon odorat comme ça. Je coupais Charlie. « Si je suis faible. Mais je veux plus l’être. J’ai voulu le montrer là-bas, et je te le montrerai. Je le montrerai à Roxie. Je veux plus fuir. Je veux être moi, et même si j’aime pas ça, le tigre, c’est moi. Je suis peut-être une luciole, mais pas que. Et je le prouverai. A moi, à vous, à tous. Je suis pas juste ça. Et je veux apprendre à me battre. Et à me transformer en louve. Parce que je dois, pour la PES. S’ils me demandent. Je m’arrêtais un instant, réfléchissant à ce que je disais. Il n’en fallut pas plus pour que Charlie prenne doucement ma tête entre ses mains, posant son front contre le mien, et parle. Parle de choses que je n’aurai jamais cru entendre de sa part. Parce qu’elle était pas comme ça, normalement. Elle disait pas ça. Et ça me touchait.

« C’est pas ta faute. Je reste chez Constance parce que je le veux. Et j’ai rejoint la meute, parce que je le voulais aussi. Roxie et toi, vous êtes ma famille. Eux, je les connais pas, mais je les connaîtrais. Ils sont votre famille, donc la mienne aussi. Sauf que moi, je la choisis. Tu dois pas me protéger, je dois apprendre à le faire moi-même. Je dois compter sur les autres, mais je peux pas si je peux pas compter sur moi. D’accord ? J’ai pas une vie normale, mais t’y es pour rien. J’ai jamais eu une vie normale. Et toi, les loups, tout ça, c’est peut-être ce qui s’en rapproche le plus. Alors t’accuse pas. »

Je savais même pas que j’allais dire ça. Mais je le pensais. Je disais la vérité, je le savais. Je regardais Charlie, alors qu’elle n’arrivait pas à me regarder dans les yeux. J’étais pas rancunière, alors pourquoi me fuyait-elle ? J’avais pardonné mes grands-parents de ce qu’ils m’avaient fait, je m’étais même accusée moi et leur avais donné raison, même si je savais que rien ne justifiait ça maintenant, alors croyait-elle vraiment que j’allais lui tourner le dos ? Je la suivais, et souriais, en la voyant manger. Elle m’avait dit qu’elle mangeait beaucoup. Moi qui mangeais à peine, ça me surprenait toujours. Je picorais un morceau de jambon, sans prendre la parole, attendant. Qu’elle comprenne que je l’aimais et que tout ce qu’elle pourrait faire n’y changerait rien.

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Alexis & Roxane & Charlie

Charlie était l'image même de l'adolescente rebelle, elle n'avait loupé aucune connerie, la dernière en date signerait peut-être même son arrêt de mort. Pourtant jamais elle ne s'était définie comme étant quelqu'un de mauvais. Ce qu'elle avait fait subir à Alexis c'était de la méchanceté gratuite. Elle avait peut-être de bonnes raisons ce n'était pas une solution qu'elle jugeait acceptable. Elle ne s'était jamais sentie aussi mal que là maintenant tout de suite alors qu'elle la faisait entrer dans la maison qui abritait tout membre de la Meute qui en avait besoin.

Elle essayait sincèrement d'exprimer ce qu'elle avait dans le fond du cœur mais ça ne sortait pas, un nœud de la taille d'une balle de golf lui nouait la gorge. Alexis prit le relais en répondant à sa remarque sur le fait qu'elle n'était pas faible. Elle la contredisait en soulignant le fait qu'elle l'était pour le moment mais qu'elle avait bien l'intention de prouver au monde entier qu'elle allait faire des efforts, se renforcer et devenir celle sur qui les autres pourraient se reposer parce qu'une partie d'elle-même était forte. Comment ne pas être d'accord avec elle ? Elle avait vécu tant de choses depuis sa plus tendre enfance et pourtant aujourd'hui elle continuait à se battre. Charlie s'en voulait de lui en imposer plus, certes l'aider ne lui rendait pas service sur le long terme mais elle aurait voulu lui construire un monde où tout serait rose, où jamais elle n'aurait à serrer les dents si ce n'est pour sourire comme une bien heureuse.

Mais elle devait se rendre à l'évidence que tout cela n'était pas possible, Alexis et elle étaient abonnées aux emmerdes plus grosses qu'elles. Charlie en prenait l'intégrale responsabilité, si tout ce sac de nœuds était là c'était par sa faute. Parce qu'elle avait rencontré Constance, parce qu'elle n'avait pas protégé son portable, parce qu'elle avait décidé d'emmener la Métamorphe à WolfHeaven, parce qu'elle l'avait provoquée en la traitant de faible. Et pourtant elle l'excusait encore. C'était à qui serait le plus en tort dans cette histoire ? Charlie refusait de jouer à ça elle préférait surtout retenir ce qu'Alexis lui disait avec le cœur fendu par une telle déclaration. Comblant son angoisse dans la nourriture elle observa la jeune fille picorer avec un sourire.

« Lex, j'aurais seulement voulu que tu ais une vie normale pour une gamine de ton âge. Personne ne t'a fait de fleurs et pour une fois je voulais juste que les choses soient plus faciles pour toi. »

Elle déposa l'assiette sur le comptoir et reposa ses mains sur les frêles épaules de la jeune fille. Elle s'apprêtait à enchaîner quand elle entendit un hurlement qui la figea sur place. L'Ulfric appelait la Meute pour une chasse en groupe. La Louve qui sommeillait en elle se redressa d'un bond et mordillait les frontières entre les deux esprits. Elle ne pouvait pas ignorer l'appel mais en même temps elle devait rester là avec Alexis pour mettre les choses au clair. En même temps que l'esprit animal s'éveillait doucement en elle, une colère qu'elle avait réussi à emmurer jusqu'à présent. L'animal faisait toujours resurgir de mauvaises idées.

« Pour moi aussi Alexis tu es ma famille, l'une des personnes les plus chères au monde que j'ai. Pourquoi tu acceptes de rester chez Elle ? Tu viens d'accepter d'intégrer la meute et tu te rends compte si quelqu'un vient à être au courant de ce bordel ?! C'est pour ça que j'ai voulu te repousser. Le lendemain où Constance t'as trouvé j'ai raconté à l'Ulfric ce qu'il s'était passé, j'étais dans le flou complètement malade et je ne sais même plus si j'ai donné ton nom et s'il s'en souvient Alexis, métamorphe il va faire le lien et demander comment t'as réussi à survivre. Et MERDE ! » hurla-t-elle en s'éloignant soudainement d'elle pour frapper le mur.

La douleur qui lui parcouru le bras n'aida pas à calmer la colère qui était montée en elle telle une vague au contraire. Elle venait de se rendre compte à quel point la situation était pitoyable. Elle posa son front contre le mur qui n'avait pas la moindre égratignure contrairement à sa main qui la lançait douloureusement.

« Ça ne s'arrêtera jamais... » chuchotait-elle prise d'un élan de désespoir.

Il y avait trop de choses enfouies, cachées son cerveau menaçait de lâcher prise et si elle laissait cette partie sauvage prendre le dessus elle savait qu'elle était perdue, tout finirait par s'effondrer sur elle emportant avec elle pas mal de monde. Les secrets finissent toujours par éclater au grand jour, elle le savait pourtant et elle n'en avait pas tenu compte.

Je disais ce que j’avais sur le cœur beaucoup plus spontanément que Charlie, et sans grande difficulté. Je savais combien ça lui coutait de reconnaître tout ce qu’elle m’avait dit, et inconsciemment, je m’en voulais presque de l’obliger à le faire alors que je ne faisais qu’écouter mon instinct pour parler. C’était souvent parler sans réfléchir, mais au fond, je ne disais que ce que je pensais. Même si je pouvais sembler trop changeante des fois. J’espérais pas l’embêter, d’ailleurs. Peut-être qu’elle aurait juste voulu que je me taise. Je savais pas. Mais elle laissa le silence s’installer, et j’avais peur d’avoir parlé de travers. De l’avoir embêtée, encore. Parce que je devais l’embêter. Elle m’avait déjà un peu crié dessus, avant qu’on arrive à Wolfheaven, quand j’avais dit que je voulais pas parce que Constance allait pas être d’accord. Qu’elle allait pas accepter. Et aussi devant tout le monde. J’avais peur de la mettre encore en colère. Je baissais la tête, grignotant du jambon pour m’occuper plus qu’autre chose, attendant.

Je relâchais légèrement la tension, en l’entendant. Je me faisais des films, comme souvent, je me montais la tête, pour rien. Mais ça faisait du bien de l’entendre dire ce qu’elle disait. J’aurai pas été nue et toujours un peu anxieuse, je l’aurai serrée dans mes bras. Mais elle me devança, me réconfortant un peu en posant ses mains sur moi. Avant qu’un hurlement puissant ne retentisse, ne me fasse sursauter. Je savais pas ce que ça voulait dire, mais je sentais l’agitation soudaine de Cha, le fait qu’elle soit perturbée. Et elle me faisait un peu peur. Je m’efforçais de ne pas le montrer, mais elle me fit presque craquer, en me parlant aussi… méchamment. Je refusais de pleurer, et refoulais les larmes que je sentais monter, serrais les dents, sans rien dire. M’obligeant à ne pas frémir alors qu’elle frappait le mur. A ne pas bouger, à ne pas crier. Parce que son agitation m’énervait aussi, malgré moi.

« Tu veux que je fasse quoi, hein ? Elle est peut-être pas gentille, elle m’utilise, elle me l’a dit, mais les services sociaux, ils me trouveront pas, là-bas ! Et elle m’habille, et elle me nourrit, et elle me donne ce dont j’ai besoin. Alors je vends peut-être mon âme au diable, mais tu sais quoi ? Eh ben j’en ai marre de fuir ! Et là-bas, je suis stable ! J’ai pas besoin de me cacher, parce que c’est le dernier endroit où on me trouvera ! Je vais même au lycée normalement ou presque, parce que je sais que le soir je peux ne pas me cacher parce que même si on me voit là-bas, on me trouvera pas chez elle ! Tu veux que je fasse quoi ? Que je me vende aux services sociaux ? Que je retourne avec Alois ? C’est peut-être pas l’idéal d’être chez Constance, mais j’ai pas le choix ! Je fais au mieux ! Et je fais avec ! Et maintenant, eh ben, je suis supposée être une famille avec vous ! C’était ça, le but, non ? Alors même si je suis une vilaine petite sœur, on va me faire quoi ? Me mettre dehors ? Me frapper ? Me punir ? Je l’ai déjà eu, tout ça ! Ca changera pas ! J’ai jamais eu de stabilité, Cha, jamais ! Sauf quand les Lindon m’ont recueillis ! Et maintenant, ils sont quoi ? Je les ai crus morts ! Ashleigh m’a dit qu’ils étaient des loups ! Ils sont même pas venus me voir, ont pas voulu faire de moi leur vraie famille, dans la meute ! Ils m’ont jamais cherché, alors qu’ils savent, qu’ils savaient ce que j’étais ! Ils nous ont abandonnés, Elliott et moi ! Comme ma mère avant ! Comme mes grands-parents ! Alors j’en ai marre ! Juste marre ! Je fais comme je peux ! Elle m’aime pas, elle me garde chez elle parce que je suis utile, mais comme ça, j’ai pas de déception ! Et je me cache plus. Je fuis plus. Je suis plus la tigresse, qui prend le dessus sur l’humaine, pour avoir passé trop de nuits dans la forêt parce que c’était le plus simple ! Je suis moi, humaine, luciole et tigresse. »

Je haussais la voix, je criais aussi, très fort. Plus que je ne l’avais probablement jamais fait. Je m’emportais jamais, ou excessivement rarement. Mais là, c’était trop. Je laissais sortir tout ce que j’avais sur le cœur, que je voulais pas dire parce que je voulais pas les inquiéter, me plaindre, être méchante. Mais c’était trop, c’est tout.

Roxie arriva au bon moment, elle ne devait pas avoir loupé une miette de ce que j’avais dit. Super. Elle allait me trouver horrible, et me tourner le dos. Comme Charlie le faisait là, me criant encore dessus. Je m’éloignais à l’autre bout de la pièce, énervée comme pas possible, sentant l’appel de la tigresse, mais pas comme auparavant. Pas comme au milieu des loups. Je le sentais impérieux, agressif, presque forcé. Mais je voulais pas me transformer. Je cèderai pas à son appel, je vidais mon sac, et j’allais pas fuir en me transformant. Même si c’était difficile. Même si ça faisait mal. J’écoutais même pas Roxie, alors qu’elle parlait à Charlie. Elle s’en foutait, de toute façon. Elle voulait que Charlie se calme, mais moi je me calmais pas. Pas du tout. Je la sentis me regarder, je l’entendis, mais je ne voulais pas l’écouter. Je voulais partir, et leur montrer que c’était moi qui décidais. Je m’occupais de moi depuis deux ans, et parce que je choisissais une mauvaise solution mais la meilleure qui se présentait, et je me faisais gronder. C’était mon choix, et elles pourraient pas m’en empêcher. Je la suivais quand même, sans rien dire, sans regarder Charlie, sans me calmer. Je prenais l’assiette, et j’entrais dans la chambre de Roxie à sa suite. Je posais l’assiette à un endroit où elle tiendrait, et fixait un attrapeur de rêves, accroché au mur. Je l’avais vu dans un magasin, et j’avais pensé que ça lui plairait. J’avais essayé de refaire le même moi-même avant, parce que j’aimais pas offrir des choses volées, mais j’avais deux mains gauches, et le résultat était pas très beau… Alors j’avais été le prendre au magasin. Lui avouant en rougissant que j’avais pas pu le payer et que celui que j’avais fait était pas beau, mais que je voulais qu’elle l’ait. Et que j’irai mettre le prix dans la caisse quand j’aurai l’argent. Si j’avais tourné la tête, j’aurai vu celui que j’avais fait pas loin.

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Alexis & Roxane & Charlie

L’appel de l’Ulfric n’était rien de bien important mais il réveillait cette partie obscure qui ne s’associait pas très bien avec le fait de parler calmement de choses et d’autres. Déjà qu’en temps normal elle n’était pas du genre à parler à cœur ouvert le faire dans ces conditions c’était un peu comme vouloir danser sur un lac de lave : ça allait finir par piquer. Charlie pensait avoir un peu de contrôle encore mais quand elle entendit le nom de Constance elle sentit une vague de colère la submerger. Ce n’était pas contre Alexis ou contre qui que se soit elle s’en voulait terriblement de ce qui était arrivée parfois elle se disait qu’elle aurait carrément gobé son téléphone plutôt que de laisser tout ça arriver mais elle ne pouvait pas refaire ce qui avait été fait juste arranger les choses au mieux.

Elle avait rejeté sa colère sur un pan de mur qui n’avait pas grand-chose mais elle avait réussi à éclater la peau qui recouvrait les jointures de sa main. Ca faisait un mal de chien et du coup elle se sentait encore plus énervée contre son cerveau qui débloquait totalement. Mais ce qui arriva ensuite, elle ne l’avait pas vu venir. Alexis explosa elle aussi. Elle aurait pu tout entendre même l’accusation de la jeune fille sur tout ce qu’elle avait fait de travers mais entendre que Constance l’aidait mieux que n’importe qui c’était plus que ce qu’elle ne pouvait supporter. A l’instant où elle voulu se retourner pour réagir Roxane était rentrée. Elle avait du entendre le coup, les voix, Dieu sait quoi et elle s’inquiétait de ce qui pouvait bien se passer. Elle soupira quand Roxane parla de l’appel de la Meute. Si seulement elle savait, certes cela avait éveillé la Louve mais ce n’était pas ça le principal problème c’était ce que Lexis lui avouait : Constance veillait à sa sécurité selon elle en l’utilisant comme elle le faisait.

La louve se sentait mal d’avoir créé cette situation, vexée que Alexis voit en Constance un certain abri alors qu’elle lui avait proposé de multiples solutions pour la mettre hors de portée des services sociaux et pour achever le tout elle se sentait coupable de ce qu’elle avait fait à Alois. Alexis n’en savait rien et elle craignait cette menace. Elle n’accorda qu’un regard d’excuse à Roxane lorsqu’elle lui fit face. Non elle n’avait pas l’intention de rejoindre la Meute, elle finirait par tomber sur Mike ou pire encore et elle aurait droit à une discussion salée sur son comportement vis-à-vis des Métamorphes. Et si elle partait se serait confirmer à Alexis qu’elle ne pouvait pas avoir confiance en elle.

Elles partaient maintenant pour rejoindre la chambre de Roxane. Pas un regard, Charlie avait bien sentit qu’elle l’avait énervée mais jusqu’à quel point ? Elle les observa disparaître à l’étage avant de se glisser sur le sol. Elle ne voulait pas rejoindre les autres loups, avec Roxane et Alexis elle était déjà en compagnie d’une partie de la Meute et si on lui disait quelque chose elle s’en foutait, elle en avait sa claque de leur Meute, de leur famille… Elle voulait agir pour les personnes qui comptaient vraiment et pas tout le monde, elle n’avait pas de temps à perdre pour les autres qui ne lui apportaient rien.

Elle savait qu’elle devrait changer de mentalité avant de commencer son entraînement avec Isadora, jamais la louve ne lui permettrait de continuer à agir ainsi elle le savait bien. Alors elle comptait bien profiter de ce temps pour faire les choses comme elle l’entendait pour Alexis, parce qu’elle lui devait bien ça et parce qu’elle l’aimait sincèrement comme une petite sœur. Elle se releva et passa un peu d’eau froide sur son visage dans l’évier avant d’aller les rejoindre.

« Je suis désolée pour mon comportement les filles. Ce n’est pas une question de protéger qui que se soit ou d’avoir ma louve qui parle à ma place c’est juste que depuis que Constance m’est tombée dessus les choses arrêtent pas d’empirer. Et crois-moi Lex, tes grands parents étaient des petits joueurs à côté de ce que la Meute peut te faire subir s’ils te soupçonnent d’être une traitre. Il y a qu’à voir l’ancien Ulfric. »

Elle n’avait aucune envie de l’effrayer mais il était peut-être temps de comprendre que tout cela avait dépassé le stade de la petite boulette inoffensive qui pouvait être récupérable en cas de pépins. Elles risquaient toutes les trois d’y laisser des plumes si quelqu’un apprenait ce qu’elles savaient et ce qu’elles avaient fait. Et mieux valait pas pour Roxy qu’une telle chose arrive si elle voulait vraiment ce poste de Jofr. Elle reprit une tranche de jambon qu’elle roula en cigarette pour la manger petit bout par petit bout sans en mettre partout avant de se laisser tomber sur le lit de Roxane. Le lieu n’était pas spécialement décoré, juste pas mal de souvenirs entassés, des cadeaux comme les illustrations de renards façon manga que Charlie lui avait offert il y a quelques temps maintenant.

« Il faut qu’on te forme à devenir une vraie louve. Et pour ce qui est de la vieille le mieux c’est que tu ne lui dises pas que tu es rentrée dans la Meute. D’ailleurs elle t’utilise pour quoi ? » demanda-t-elle en observant le plafond pour ne pas croiser le regard furieux de la tigresse.

Parce que oui maintenant elle avait tout d’une tigresse. Charlie devrait s’y faire, ne plus la prendre avec des pincettes et ne pas vouloir la protéger. Elle voulait grandir, elle voulait qu’on la prenne au sérieux, ça pouvait se faire. Mais ça serait difficile pour tout le monde.

Je gardais la tête baissée – non pas pour ignorer Roxane et Charlie, mais pour contenir ma colère. Elles me réprimandaient encore comme une petite fille, alors que j’étais plus encore. Et elles devaient le savoir, le voir. Et si elles le voyaient pas… Je le leur montrerai. C’était tout. Je les aimais, plus que tout, mais je voulais plus dépendre de personne. Et elles voulaient pas le comprendre. J’étais sûre qu’elles voulaient me faire peur, à me dire que je subirais beaucoup. Même si elles ne mentaient surement pas. Je comprenais pas bien ce que Charlie disait sur l’ancien Ulfric. Je savais pas de quoi elle parlait, de toute façon. Mais Roxie l’avait bien dit : ils m’exécuteraient. Eh ben, je me plierai aux lois. Je ne serai pas à même de faire face, de toute façon. Et puis pourquoi ils me considèreraient comme une traitre ? Je les vendrais pas, jamais. Mais ça, elles avaient pas l’air d’y croire. Ca m’énervait, encore.

« Eh ben ils me tueront. Si ça doit être fait. »

J’étais bravache, alors que je ne disais pas réellement ce qu’il en était. Bien sûr que l’idée me déplaisait et me terrorisait. Mais hors de question de le leur montrer. Alors que je leur affirmais être satisfaite de ma situation, et l’accepter pleinement. Que j’étais courageuse, et fière. Non, je ne leur avouerai pas que j’avais peur des mesures barbares de la meute. De Ma meute, j’en faisais partie, maintenant.

« Et je suis pas stupide, je vais rien dire à la vampire. Vous pensez que j’agis sans réfléchir, mais c’est pas vrai. Je fais au mieux, avec ce que j’ai. Et pour Constance, c’est pas un choix, mais un retournement de situation que j’accepte. Je fais au mieux avec ce que j’ai. Je m’arrêtais un instant, pour réfléchir à mes propos. A la meilleure façon de tourner la chose. De pas être trop brutale. Même si j’étais pas douée pour ça. Et vous savez ? Elle vous épargnait, ou Cha en tout cas, contre mon obéissance. Je jetais un regard bref à Cha. Elle voulait te faire du mal. Alors quoi, j’allais la laisser ? Non. Elle boit mon sang, et elle te laisse tranquille. Elle me loge, elle me permet d’aller à l’école, elle me protège, mais elle te protège surtout. Alors quoi, vous pensez que je vais vendre les loups ? Non. Elle me fera ce qu’elle veut, mais je vendrais personne, parce que c’est aussi eux ma famille maintenant. Et comme je veux vous protéger, je les protégerai. Peu importe le prix. Parce que je suis rien, par rapport à vous. Et c’est ça que vous me dites, c’est ça l’esprit de la meute. Se sacrifier pour le bien commun. Alors c’est ça que je fais. C’est tout. »

Je m’étais pas arrêtée, tout juste très brièvement interrompue pour mettre la robe que Roxie m’avait donnée, et je m’étais pas excusée comme Cha. J’étais pas en tort, je disais la vérité. Même si elles appréciaient pas. C’était comme ça, c’était tout.

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Alexis & Roxane & Charlie

Charlie observa Roxane avant de jeter un coup d’œil à Alexis. Elle était sérieuse ? Si cela devait arriver ça ne se ferait de n’importe quelle manière mais certainement pas dans la simplicité. Si on devait donner l’ordre d’exécuter quelqu’un se serait Mike qui devrait le faire, son nouveau rang portait bien son nom, et même si ce n’était pas lui qui devait le faire elle ne parviendrait pas à laisser les choses se faire parce que ça se devait. La question n’était pas de savoir si Alexis était ou non une traitre, Constance savait tirer avantage des gens qu’importe la manière. C’était un vil serpent qui savait subvenir à ses besoins même les plus immondes.

Mais non elle ne dirait rien, Alexis avait décidé de se montrer insolente comme si le fait d’accepter qu’on l’exécute lui fasse ni chaud ni froid allait la montrer plus mature. La Louve commençait sévèrement à s’agiter intérieurement. Elle avait déjà une épée de Damoclès au dessus de la tête pour toutes les conneries qu’elle avait fait elle ne parviendrait pas à tout gérer elle allait finir par faire un truc de travers. Ce qui lui faisait le plus peur c’était de retourner dans cette période sombre de la naissance de la Louve mais aussi les longs mois où Mike avait disparu de la circulation après le décès de Sam. Si à chaque fois elle était parvenue à échapper à une erreur fatale elle n’était pas à l’abri que cette fois-ci les choses se passent différemment. Cette fois-ci personne ne devrait savoir ce qui la perturbait, la seule personne à qui elle avait tout confié lui avait tourné le dos au nom de la Meute. Elle ne voulait pas vraiment être énervée par le comportement de Cian, ses choix. C’était ce qu’on attendait d’une Louve pour la Meute. Elle était juste vexée que son amie préfère recourir à l’Ulfric plutôt que de l’aider à résorber les dégâts avant qu’il ne soit trop tard. Dans le fond, peut-être que ça l’était : trop tard pour s’en tirer sans le moindre dommage.

Mais Alexis avait décidé de mettre les choses au clair. Bien sûr qu’elle n’était pas stupide, personne ne remettait sa loyauté en question mais si elle faisait confiance aveuglément à la jeune fille elle se méfiait comme de la peste de Constance. Charlie serrait les poings tellement forts lorsqu’elle lui révéla que si elle restait chez Constance c’était aussi pour la protéger. Elle sentit l’odeur ferreuse du sang avant de comprendre qu’elle en était au point de s’enfoncer les ongles dans la chair pour ne pas s’énerver. Elle se demandait jusqu’à quand elle allait pouvoir continuer à entendre des conneries pareilles. Le pire était à venir. Elle lui laissait boire son sang… Là c’était pire que tout ce qu’elle avait pu imaginer. Elle aurait préféré que la métamorphe lui dise qu’elle se faisait battre ou un truc du genre plutôt que ça.

Elle s’éloigna des deux métas pour s’assoir sur le lit, la tête dans les mains, les coudes posés sur ses genoux. C’était tout simplement trop, elle allait finir par craquer… Non elle devait se retenir coûte que coûte, que se soit maintenant ou plus tard elle ne pouvait pas laisser ses émotions fortes la guider, pas celles-là en tout cas. Elle finirait par se jeter droit dans la gueule du loup – si c’est pas ironique. Mais plusieurs choses lui passèrent en tête : les vampires pouvaient boire le sang des métamorphes sans en souffrir, Alexis ne semblait pas avoir subi de changements, Constance la retenait en menaçant non pas sa propre personne mais celles de sa famille.

« Et si elle te dit qu’elle me tuera si tu ne lui donnes pas d’informations sur la Meute ? On n’a jamais dis que tu étais bête ou une traitre mais Constance a des siècles d’existence elle sait comment les gens fonctionnent. Elle connait ce monde et ses règles. Le bien commun de la Meute voudrait que tu la laisses me tuer et que tu restes loin d’elle. Même si tu ne lui dis rien, n’importe quel Loup se posera des questions : comment tu restes en vie à ses côtes ? Et si finalement elle me tue et que tu ne lui dis toujours rien tu crois qu’elle continuera à te laisser aller en cours tranquillement et faire ta vie ?! »

Charlie n’avait pas haussé le ton, elle ne regardait rien ni personne, juste le mur en face d’elle. En fait si elle avait été une Louve bien sous tout rapport elle ne se serait jamais trouvée là où elle était quand elle avait croisé la route de Constance, elle aurait préféré mourir plutôt que de lui dire quoi que se soit même sous la torture et elle aurait un mot de passe pour son téléphone. Rien de tout ça ne serait en train d’arriver.

« Et si elle veut vraiment me tuer qu’elle vienne, cette fois je repartirais peut-être dans le même état que la dernière fois mais elle risque de pas aimer ce qui va se passer. »

Elle se releva et les toisa toutes les deux. Elle n’allait pas laisser Alexis mettre en danger tout le monde simplement pour sauver sa peau. Surtout qu’elle avait subitement une idée qui risquait de ne pas plaire du tout aux vampires qui tenteraient de lui pourrir l’existence. Elle n’allait pas se laisser faire, particulièrement si cela permettait à Alexis de sortir des griffes de la Vampire. Roxane ne serait pas là pour la contredire sur ce coup. Mais ce qu’elle ne comprenait pas c’est pourquoi elle s’intéressait autant aux métamorphes d’un coup. Elle connaissait leur existence depuis bien plus longtemps que leur entrevue, Charlie ne lui avait rien apporté si ce n’est le numéro d’Alexis. Alors quoi le sang des métas avait-il quelque chose de différent ? Elle se sentait nauséeuse à cette idée mais il fallait qu’elle vérifie et elle ne connaissait qu’une seule personne qui s’y connaisse en matière de Vampire : Leslie. Elle était loin de se douter que les choses se passaient peut-être mal pour lui, mettant à mal tout une partie de ses projets.

« Roxane, je peux te demander un échantillon de sang ? Je ne savais pas que le sang des Métamorphes n’était pas nocif pour les vampires. » demanda-t-elle en tentant le ton le plus dégagé dont elle était capable dans la situation actuelle.

Elle touchait peut-être l’explication de l’intérêt subit de Constance pour cette race cachée mais elle ne comprenait toujours pas pourquoi cette dernière avait jugé utile de la laisser en vie. Pour qu’elle raconte à l’Ulfric qui elle allait chasser et que justement il se méfie du loup dans la bergerie. Ou alors… Elle commençait à imaginer cinquante scénarios tous plus horribles les uns que les autres et qui auraient pu sortir de l’esprit tordu de Constance. Elles avaient un adversaire de taille et la sous-estimer serait une grave erreur, Charlie se faisait volontairement les pires idées pour ne pas être effarée par la vérité. Mieux valait imaginer le pire que le contraire.

Je me sentais de plus en plus mal à l’aise, à attendre une réaction qui ne venait pas. Elles regardaient droit devant l’une et l’autre, mais aucune ne semblait vraiment là. Est-ce que je les avais choquées ? Est-ce qu’elles étaient dégoutées de moi, parce que… parce que je me soumettais à une vampire ? Est-ce qu’elles allaient ne plus vouloir me voir, parce que je lui donnais mon sang ? Je sentis mon cœur se serrer, et je me retournais pour ne pas montrer ma détresse, pour ne pas continuer à les voir ainsi, pour ne pas anticiper quand elle me rejetterait et que je devrais les sortir de ma vie, les considérer comme de la famille qui nous est donc imposée mais qu’on ne veut pas fréquenter. Parce que là, elles pouvaient pas penser autre chose. Sinon elles parleraient. Elles resteraient pas silencieuses, à contempler je ne sais quoi comme si elles n’osaient pas dire ce qu’elles pensaient. Elles voulaient plus de moi, parce que je les écœurais, j’en étais sure. Je me dirigeais vers la porte, pour partir. J’étais sûre qu’elles me retiendraient pas.

Je ne m’arrêtais qu’en entendant la voix de Charlie. Qu’est-ce qui me disait qu’elle ne la tuerait pas, si je lui donnais pas d’informations ? Mais je connaissais rien. Rien du tout. Je pourrais rien donner. Je grimaçais, en réalisant que je connaissais maintenant l’endroit où ils… où ils quoi ? vivaient ? se réunissaient ? Roxie avait une chambre ici, donc elle y vivait. Etait-ce le cas de tout le monde ? Je savais que Charlie non, puisque j’occupais des fois son canapé. C’était pareil pour Hayden. Et pour la maman de Savannah – elle laissait pas Savannah vivre ici, si ? Alors quoi ? Qu’est-ce que je pourrais dire sur ça ? Peut-être qu’ils pourraient déménager ? Et que Charlie pourrait se cacher, éviter Constance ? Comme ça… Comme ça, je saurai plus rien. Mais elle devrait plus me voir. Je voulais pas, mais j’avais pas le choix.

« Mais je savais rien ! J’avais rien à lui dire ! T’as qu’à le dire au chef des loups, au presque papa de Savannah ! J’ai oublié son nom… Il vous déménagera, il vous trouvera un nouveau Wolfheaven ! Et il faut que tu changes d’appartement, et que je sache pas où c’est ! Comme ça, elle pourra pas te trouver ! Et après, je pourrais mentir à Constance. Lui dire où c’est ici… Comme ça, vous serez pas en danger. Et… Et je vous parlerai plus. Et quand Constance verra que vous êtes plus là-bas… » Je taisais la suite. Elle allait vouloir me tuer. Mais je m’en fichais. Je dirai rien. Et je parlerai plus aux loups. J’irai peut-être vivre dans la forêt, pour toujours, en forme de tigre. Comme ça, eh ben je ferai plus de bêtises. Peut-être que je me ferai manger par un ours, aussi… Il devait bien y avoir des ours, quelque part en Ecosse, non ? Comme ça, j’embêterai plus personne. Ou alors les loups voudraient me tuer eux-mêmes, et me mangeraient… Mais le résultat serait le même. Je voulais pas mourir, mais c’était la seule solution.

Je tressaillis en entendant la question de ma renarde. Si c’était douloureux ? Comment je pouvais lui répondre, sans lui faire peur ? Sans qu’elle s’imagine le pire ? Je grimaçais, prenant une grande inspiration, sans trouver mes mots. Mais je devais dire la vérité. « Ca dépend. Elle peut faire ça doucement, et ça pince un peu mais c’est tout… » Pas besoin de dire que si elle le faisait pas doucement, comme la première fois, la nuit où elle était venue me chercher, ça faisait très mal. Elle était pas bête, Roxane, elle comprendrait. Ou peut-être pas. Ca serait mieux si elle comprenait pas, mais j’y croyais pas.

Je me retournais, ce que je n’avais pas fait, fixant jusqu’à présent la porte de la chambre, quand j’entendis Charlie demander du sang à Roxane. Pourquoi faire ? « Ca marchera pas, c’est une dame qui m’avait fait des analyses de sang qui m’avait dit que ça se gardait pas plus d’une journée, ou une journée et demi. Mais je peux t’en donner moi, Charlie… Elle voudrait pas, j’en étais sûre. Mais ça me faisait rien, pourtant, vraiment, de lui en donner. Pourquoi tu veux ça ? »

Our fingers are stuck in the socket

Alexis & Roxane & Charlie

Roxane venait de perdre le fil, elle semblait sous le choc de la plus grosse révélation du moment : Constance buvait le sang de Lexie. Même Charlie en avait la nausée mais une partie de son cerveau avait décidé d'ignorer en partie l'information en fait elle avait surtout entendu que Constance pouvait boire du sang de Métamorphe, le reste elle l'avait mis de côté. Elle essayait de faire comprendre à Alexis que même si elle ne voulait mettre personne en danger elle allait finir par le faire malgré tout et son idée de la dénoncer, faire déménager tout le monde à cet effet.

La louve avait du mal à la suivre tellement elle partait loin dans ses propos. Elle se pinçait l'arrête du nez pour essayer de repousser une migraine qui commençait à doucement se déverser dans sa petite cervelle.

« Tu t'entends ? On déplace pas une Meute comme ça ! Le danger a toujours été omniprésent et on est resté ici, c'est pas demain la veille que ça va changer. Le plus simple c'est pas de bouger tout le monde mais de te sortir des griffes de ce monstre. »

Charlie l'observait avec les sourcils froncés et elle manqua de s'étouffer avec sa salive lorsqu'elle entendit la voix un peu distance de Roxane qui lui demandait si ça faisait mal de se faire mordre. Mais... Elle avait l'impression que d'un coup ses intestins se nouaient. Elle en perdit la voix à plusieurs reprises, ouvrant et fermant la bouche comme un poisson rouge.

« Et c'est tout ce que tu trouves à lui dire ? Est-ce que ça fait mal ? Et pourquoi on lui demanderait pas si elle aussi se met à dormir le jour ?! »

Elle poussait le bouchon mais elle ne pouvait plus se retenir. Tant pis si l'une ou l'autre se vexait elle commençait à se demander si elle ne parlait pas dans le vent avec les deux. Elle les aimait tendrement mais si c'était pour entendre de telles choses elle ferait mieux de rejoindre le reste de la Meute pour chasser ou même essayer de retrouver Isadora pour s'assurer qu'elle allait bien. Mais pour le moment elle ne pouvait pas aider l'ancienne exécutrice, Johan devait être beaucoup plus utile. Elle voulait comprendre l'intérêt des Vampires pour les Métamorphes et Roxane lui proposa de prendre les échantillons de sang que Mirah avait déjà en sa possession. Elle fit une grimace en imaginant ce que donnerait une telle conversation. Heureusement Alexis mit fin à la scène imaginaire qu'elle faisait défiler dans sa tête.

« Le contraire m'aurait étonnée ! Alexis la grande donneuse de sang. Tu fais aussi des dons du sang ? Et je veux savoir pourquoi Constance s'intéresse autant aux Métamorphes. Je connais quelqu'un qui pourrait m'aiguiller. » dit-elle simplement en haussant les épaules.

Elle s'en voulait d'être aussi sarcastique avec Alexis mais elle ne pouvait pas retenir les remarques. Après tout personne ne semblait se poser ce genre de question. Elle avait manqué de se faire tuer pour ça, elle méritait bien de comprendre. Sa vie entière avait pris un virage à 180° à cause de cette entrevue elle devait en comprendre la raison, ça devenait presque vital. Mais là encore elle commençait peut-être à devenir véritablement cinglée après tout ce qu'elle avait fait, tout ce qui allait pas tarder à lui tomber sur le coin de la tronche. Franchement tout ça devrait lui paraître futile et elle ferait mieux un moyen de se sauver la mise : fuir avec Lexie sous le bras n'était peut-être pas une mauvaise option ? Ou pas.

Peut-être que ça aurait été mieux qu’elles réagissent pas, finalement. Leurs réactions me plaisent pas, mais pas du tout. Celles de Charlie, en tout cas, me déplait. Je m’empêchais de les regarder, pour ne pas qu’elles voient toutes les émotions qui passaient à moi, mais pour ne pas non plus voir toutes celles qui passaient en elles. Je préférais réfléchir sur ce que Charlie avait dit. Mettre la meute en danger. Compromettre tout le monde, si elle restait à ses côtés. Laisser Charlie mourir. J’aurai préféré mourir moi-même plutôt que ça. Je cherchais des solutions, réfléchissais à ce qui était possible. Voulais savoir si on pouvait faire quelque chose. Mais je connaissais rien à la meute, ni à son fonctionnement. On m’avait jugée pas prête à les rencontrer, à rencontrer les miens et les loups, alors qu’ils étaient alliés comme je venais de l’apprendre, et maintenant on me disait que je les avais mis en danger. J’y pouvais quelque chose ? J’en savais rien, moi. Et je savais rien d’eux, avant. Je savais même pas où ils habitaient. Ma tigresse me démangeait, me criait de me transformer, de fuir, de manger quelque chose, de dormir dans une grotte. D’être tranquille. Toute seule. Sans contrainte. Sans limite. Je ne l’écoutais pas pour autant. Même si l’idée de ne plus jamais redevenir humaine était tentante. Mais pas maintenant.

« Tu veux que je te dise quoi ? J’y connais rien moi ! Je sais pas comment ça marche, la meute ! Tu veux que j’invente ? Je suis pas devin ! J’essaye de trouver des solutions, je fais comme je peux ! T’as qu’à me couper la langue, au moins ça sera plus simple, j’embêterai plus personne : je pourrai plus rien dire à Constance, je te dirai pas d’idioties, et le problème sera réglé ! Je pourrais même partir toute seule vivre dans la forêt, comme ça je serai sortie des griffes du monstre, comme tu dis. J’ai pas fait… »

Je me taisais, gardant pour moi que je n’y étais pour rien si j’étais chez Constance, et que c’était peut-être pas un monstre comme elle le disait. On m’avait dit pendant treize ans que j’étais un monstre, est-ce que je l’étais vraiment ? J’avais pas encore décidé, mais mes grands-parents en savaient rien, en tout cas. Ils avaient même pas essayé de comprendre, ils avaient juste dit que j’étais un monstre, et m’avait traitée comme tel. Au final, Charlie me mettait en fureur, me blessant au plus profond. Elle savait, que mes grands parents m’avaient dit plein de fois que j’étais un monstre, elle savait combien ça me touchait, et même si elle parlait pas de moi, elle aurait du comprendre. Mais je m’en foutais. Elle était méchante, je le serai aussi. Elle me criait dessus et me reprochait des choses que je ne pouvais pas savoir, parce que ni Roxane ni elle n’avaient voulu m’en parler. ‘Pour mon bien’. Parce que ‘j’étais pas prête’. Peut-être que si j’avais su, j’aurai pas été chez Constance. Je serai pas sortie de la maison. J’aurai réfléchi aux conséquences, le temps que la vampire arrive. J’aurai préféré mourir. Comment elles pouvaient me demander ça, alors que je savais même pas un dixième de ce que j’aurai du savoir pour comprendre et agir correctement ?

Ca m’énervait, c’est tout. Et le ton que Charlie adopta après n’arrangeait rien. « Oui tu savais pas, j’envisage d’ouvrir un laboratoire de don du sang pour vampires affamés ! J’en ai pas assez d’en donner à Constance et d’avoir mal des fois, je voulais me vendre à tous les vampires de Glasgow, ou d’Edimbourg, ou même d’Ecosse, tiens ! C’est plus drôle, quand il y a plus de gens ! Et comme ça, peut-être que je serai trop épuisée pour vous vendre, ou même pour connecter mes neurones pour me souvenir de ce que je sais ! Ca sera bénéfique pour tout le monde, et en plus, tu auras pas à t’embêter pour m’en sortir, je serai plus un danger ! Ca serait parfait, non ? »

J’étais méchante, mais elle le cherchait. Elle l’était aussi. Et je savais pas ce qu’elle attendait que je dise, ce qu’elle voulait de moi. Je pouvais rien faire d’autre, que de répliquer aussi méchamment qu’elle. Et tant pis si ça plaisait pas. C’était mérité, c’est tout. Même si je me sentais terriblement mal d’avoir dit ça, et que j’aurai juste voulu me confondre en excuses et lui faire un câlin. Je baissais la tête, rouge de honte plus que de colère, et ma faiblesse se voyant dans mes yeux, j’en étais presque sûre. La seule chose qui me détourna de ma colère fut la voix plus douce de Roxie. Je n’écoutais pas vraiment ce qu’elle disait sur le sang, essayant juste de me calmer. Mais je me concentrais alors qu’elle s’adressait vraiment à moi. S’installer à Wolfheaven ? Me cacher là de Constance ? Qu’elle m’y cherche pas ? Endroit qui la ferait fuir ? Je savais que c’était la chose sensée à faire, me demandez pas pourquoi, mais je le savais. Et je pourrais aller à l’école. A condition que je sorte pas la nuit. Je grimaçais, la tête toujours penchée vers le sol. Roxie pensait-elle vraiment que c’était bien ? Elle savait le mal que j’avais à être prisonnière. Je le serai, là. Elle savait aussi qu’au fond, je m’en fichais de l’école. Même si là, j’aurai pas le choix. Mais j’avais merdé, et je devais réparer… Alors si ça voulait dire ne rien dire à la vampire, je devais dire oui, non ? Je répondais, avec une voix résignée, à fendre l’âme, peut-être attristée. « D’accord, on peut faire ça. »

Our fingers are stuck in the socket

Alexis & Roxane & Charlie

Charlie était excédée par ce qui était en train de se passer. Alexis défendait Constance, Roxane était ailleurs, Alexis semblait penser que vivre chez une vampire et rejoindre la meute n’avait rien de grave… La liste s’allongeait et Charlie commençait à avoir de plus en plus de mal à garder son calme. Elle était peut-être mauvaise en s’en prenant à Alexis alors que cette dernière essayait de bien faire. Mais à force de ne pas agir elle se retrouvait toujours dans des situations incroyables. Elle était l’exact opposée de Charlie sur ce point là. La Louve agissait toujours et finissait dans des merdes phénoménales.

Peut-être que si Charlie n’était pas aussi stressée à l’idée d’être vendue par Cian, inquiète pour ce qui pouvait arriver pour Alexis, angoissée à l’idée que la PES découvre le corps d’Alois avant qu’elle n’ait pu trouvé une personne susceptible de lui fournir un alibi pour cette nuit-là, peut-être qu’elle aurait pu voir la détresse de la jeune fille et arrêter d’être mauvaise juste pour la prendre dans ses bras. Mais elle s’était excusée pour son attitude à de nombreuses reprises et elle ne comprenait toujours pas ce qui avait bien pu la pousser à lui dire tout ça. Lorsqu’elle ouvrit la bouche en se défendant de ne rien y connaître Charlie entendit un grondement qui n’existait que dans sa tête. Elle perdait pied alors que la colère montait par vagues. L’ignorance était une excuse facile et elle ne pouvait pas dire qu’elle n’était pas au courant que Loups et Vampires n’étaient pas compatibles. L’envie de l’étrangler là tout de suite lui fut suggérée par une petite voix mesquine du fond de son esprit. Elle repoussa la proposition avec une boule dans la gorge. Depuis quand avait-elle ce genre d’envie, ce genre d’idées ? C’était Lexie en face d’elle pas n’importe qui !

« Ouais, tu devrais continuer de faire comme tu fais. Soit rien, laisser les choses arriver sans réagir. Ta famille d’adoption te bat tu te caches comme une enfant. Alois te frappe, menace de révéler ta vraie nature mais tu continues à ne rien faire. Constance te suces le sang mais pourquoi agir, hein ? Quand est-ce que tu vas réagir ? Qu’est-ce qu’il te faut. Et pour ton information que tu fasses ou non quelque chose il y aura toujours quelqu’un qui finira par souffrir. »

Charlie parvint à résister à l’envie de hurler, de frapper contre un mur ou de partir. Elle se retourna vers Roxane qui tentait vainement de garder la situation la plus calme possible en parlant doucement. Comme si ça allait calmer quoi que se soit. L’envie de la secouer comme un prunier était plus que tentante. Comment pouvait-elle rester zen ?

« Tu sais quoi laisse tomber l’idée du tube. C’est des histoires de Métamorphe. Qu’est-ce que ça peut me faire que vous soyez une friandise sur patte pour nos amis les sangsues ?! »

C’était petit mais dans le fond elle n’avait pas le temps de mener cette enquête. Ca voudrait dire tomber sur Leslie et lui poser des questions, le menacer de mort ou pire pour qu’il garde le silence. Elle s’adossa au mur, les bras croisés alors que la luciole répondait à sa provocation encore plus violement que ce qu’elle aurait pu imaginer. Son regard la scrutait alors qu’elle baissait la tête honteuse de son coup de colère. Charlie était bien trop énervée pour relever ses états d’âmes. Elle n’entendait que cette fichue voix qui lui disait qu’elle ferait mieux de faire un truc qu’elle aurait du faire il y a longtemps : se barrer et vivre sa vie pour elle. Elle en avait assez de ces histoires de Meute, d’esprit collectif, de protéger tout et n’importe qui. Elle ne le savait pas encore mais elle regretterait cette conversation le lendemain, pour l’heure elle se perdait dans des pensées qui n’étaient pas les siennes.

« C’est le job rêvé pour toi, un truc où tu n’as rien à faire si ce n’est ne pas bouger. Tu devrais y arriver. »

Charlie se serait giflée si elle avait encore conscience de ces actes. Mais là c’était une vraie guerre qui avait lieu dans sa petite caboche : la Louve qui tentait de prendre le contrôle pour laisser échapper toutes les frustrations que Charlie retenait, cette petite voix qui prenait le contrôle quand elle déraillait et qui l’emmenait toujours sur des chemins plus sinueux que les précédents. Charlie les entendit alors parler d’installer Alexis à WolfHeaven sous prétexte que les morsures de Loups étaient toxiques pour les vampires. Elle s’apprêtait à ricaner, certaine que la jeune fille refuserait (encore), mais elle accepta.

* Quand ce n’est pas toi qui propose elle accepte facilement. Pourquoi on se prend la tête avec elle ? Je suis sûre qu’elle t’utilise pour qu’avec ton caractère de chiotte tu la sortes de ses mauvais pas. Comme pour Alois ou avec Philipp. Elle doit bien kiffer d’avoir un gentil loup en laisse. *

La louve se décolla du mur, elle devait partir avant qu’elle finisse par perdre pied. Elle allait finir par lâcher prise c’était un fait mais elle ignorait à quelle partie de son esprit elle laisserait place. La Louve qui deviendrait sans doute menaçante parce qu’elles étaient toutes les deux en colère ? Ou cette part sombre d’elle-même, celle qui avait suivi Alois et lui avait brisé la nuque, celle qui avait pris le relai alors qu’elle était couverte du sang d’Alexei ? Qu’importe c’était la merde l’une comme l’autre.

« Faites comme vous voulez, je me casse. Je passerai le bonjour à Constance de ta part comme je l’ai fait avec Alois. » finit-elle par lui dire en arrivant à son niveau, une main sur la poignée de la porte.

Elle devait se dépêcher de sortir avant de laisser plus de marge de manœuvre à cette tarée qui vivait dans sa tête. Elle ne leur accorda plus le moindre regard et sorti sans demander son reste. Elle était toujours dans le salon au rez-de-chaussée lorsqu’elle commença à retirer ses vêtements. Quelques secondes plus tard elle passait par la porte qu’elle avait ouverte au préalable sous sa forme lupine. Ses idées étaient plus claires, bye petite voix malsaine, elle respira l’air pendant quelques secondes se délectant des différentes odeurs qui lui parvenaient. Elle sentit les traces des deux métamorphes et après un regard triste en direction de la grande bâtisse elle prit juste quelques secondes pour hurler la détresse de l’humaine qui s’était prostrée dans un coin de son esprit, laissant libre court à l’animal pour le reste de la nuit.

Elle s’élança en direction de la forêt, la trace de la Meute était froide maintenant mais pas impossible à tracer. Les odeurs mélangés se poursuivaient sur plusieurs kilomètres ou mètres, elle ne le saurait jamais car elle prit une direction totalement différente.

Je m’énervais et je le regretterais surement, mais il fallait que Charlie comprenne que des fois, je devais faire mes propres choix, et que si je le regrettais, eh ben tant pis pour moi. Elle était désagréable, alors moi aussi, voilà tout. Je m’en voulais déjà, mais je pouvais juste pas me taire. J’aurai du faire quoi ? La mettre en veilleuse, et faire tout ce qu’elles me disaient. Elle croyait quoi, que je voulais rester à vie chez Constance, être son larbin, et pas plus ? Eh ben non. C’était pas mon but, ça le serait pas, mais je voyais pas quoi faire d’autre pour l’instant. Alors peut-être qu’elle avait raison. Peut-être que j’étais une idiote qui faisait rien. Mais ça valait mieux que de laisser les autres être blessés. Et j’avais pas rien fait pour Alois, j’étais partie. Je m’étais enfuie, et j’avais cherché à vivre par moi-même, toute seule. Elle croyait que j’étais de taille à me battre contre elle, contre la famille qui nous accueillait ? Contre la loi, qui avait dit que je devais rester chez eux jusqu’à ce que j’ai dix huit ans au moins, plus s’ils voulaient de moi ? J’étais pas une super héroïne, elle me demandait plus que ce que je pouvais faire. Est-ce que ses paroles ne me blessaient pas pour autant ? Si. Elle me faisait mal, à me voir comme ça. Mais je savais pas quoi faire. Sauf fuir, encore. Aller loin, dans un autre pays. Peut-être que je pourrais aller au Canada. Ou en Australie. Ou en Nouvelle-Zélande. C’était loin, tout ça, non ?

Je relevais la tête, alors qu’elle disait s’en foutre que les vampires veulent nous bouffer. Au final, elle s’en fichait, de nous, c’est ça ? Elle sautait sur l’occasion de nous abandonner à nous-même. Le reste, je pensais qu’elle le disait parce qu’elle était triste, mais là… Là… Elle nous aimait pas, c’est ça ? Et elle avait juste pas osé le dire avant ? Je baissais à nouveau la tête, pour essayer de masquer ma peine. Tant pis. Elle avait choisi. Elle voulait plus de moi, c’était tout. J’aurai du me dire qu’elle m’aimait pas, que c’était trop beau pour être vrai. Personne m’aimait, de toute façon… Mes grands-parents, mes parents biologiques, mes parents adoptifs qui étaient loups et venaient même pas me voir, Charlie… Oui, je n’avais qu’à partir. Et proposer à Roxane de venir avec moi. Elle m’aimait pour de vrai, elle, non ? Savannah, je l’aimais beaucoup, mais je la connaissais pas beaucoup, je lui manquerai pas. Darren… Il était habitué maintenant. Elliott… Je lui écrirais. Ou il viendrait. J’espère. Mais je secouais la tête, alors que Roxane me proposait de rester à Wolfheaven, plutôt que chez la vampire. Non, je devais pas fuir. C’est ce que Charlie attendait. Je resterai, et je lui prouverai que je l’aime, même si elle dit des méchancetés. C’est tout. Alors j’acceptais, tout simplement.

Je grimaçais, en entendant Charlie. Passer le bonjour à Constance ? A Alois ? Elle avait fait quoi, à Alois ? Pas de conneries, j’espère… Je grimaçais encore. Je m’empêchais de la suivre, en l’entendant. Et en sentant qu’elle prenait une odeur plus animale. Elle était allée chasser ? Je reprenais conscience de la pensée de ma renarde préférée en la sentant me prendre dans ses bras. En lui rendant son étreinte, avant qu’elle s’éloigne. En acquiesçant de la tête, alors qu’elle parlait des chefs de meute. Pendant qu’elle prenait son téléphone, je prenais un bout de papier, et griffonnais un message pour Charlie. Roxie m’en voudrait pas, de lui prendre une feuille et un peu d’encre. Je descendais rapidement, le pliais, et le posais dans sa poche, avant de remonter.

« Désolée. J’ai laissé un mot à Charlie… Tu crois que les chefs de meute voudront de moi ? Que je vais pas… gêner ? C’est quoi leur nom officiel ? Je dois faire quelque chose de particulier en les voyant ? Comme… membre de la meute ? Tu sais tout ça ? »

Je me taisais une seconde.

« Charlie a fait quoi à Alois, tu crois ? »

Je courais dans les bois marquant l'extrêmité du domaine de la Meute. Je sentais l'odeur de plusieurs congénères m'ayant accompagné, tout autour de moi. Isadora en tête, comme toujours. J'avais caracolé à ses côtés pendant un bon kilomètre, avant qu''elle ne prenne à nouveau ses distances, toujours en colère des propos qu'ont tenu cette métamorphe à mon encontre. Pour ça et aussi un peu pour le reste. D'un certain côté, je ne pouvais que remercier la changeuse de formes d'avoir pris quelques torpilles à ma place ; elle avait détourné l'attention, suffisamment en tous cas pour que ma propre épouse en oublie quelque peu ses griefs à mon encontre. Rien de formidable, mais rien de désespéré non plus. Je profitais de cette course, m'emplissant les poumons des senteurs de la forêt. Au fur et à mesure, nos congénères nous abandonnaient à leurs occupations. La réunion était terminée, mon pouvoir se retrouvait renforcé par la conclusion des événements du jour alors qu'il avait été terriblement mis à mal en début de réunion... J'avais du mal à me détendre, pourtant. J'avais des tas d'envies diverses. Manger un gros plat de viande, me battre jusqu'au sang ou encore coucher passionnément avec Isadora. N'importe quoi qui soit susceptible de me changer les idées... mais la chasse prit fin, Isadora rentrait avec les enfants et je devais parler avec Mary. Je repoussais ce moment, mais je savais que je me devais d'y faire face. Je suis l'Ulfric, et j'ai des responsabilités.


Je rentre au manoir. Un certain moment a passé depuis la fin de la réunion. Plusieurs heures, puisque la fin gronde dans mon estomac, et que je voyais bien que le jour laissait place à la nuit. Il faisait toujours sombre très tôt, alors que l'hiver nous avait tous étreint dans sa froide accolade. Bref. Je rentrais pour me transformer, et aperçus au loin Isa et les enfants remettre leurs vêtements et partir. Je peinais à retrouver les miens dans la pénombre, parmi le fouillis des autres loups qui venaient récupérer leurs fringues. S'il y avait bien un inconvénient à devoir être à poil pour se transformer, c'était bien celui là. Bref. Je rentrais dans le bâtiment principal et montais directement rejoindre Mary, quand je pensais à regarder mon téléphone dans ma poche. Un message de Roxane. Putain, déjà cette heure là ? La réunion était en fin d'après midi, et on était déjà bien avancé dans la soirée maintenant. Enfin, pour un couche tôt comme moi. Je ne montais pas jusqu'aux appartements des dominants, avant de faire demi tour. Mary avait peut être vu le message plus tôt que moi. Je redescendais donc, pour trouver la rouquine en grande discussion avec la jeune Métamorphe, Alexis, qui avait été durement éprouvée aujourd'hui. Pas de signe de Mary, d'ailleurs...


| J'étais dans le coin depuis la fin de la réunion, je ne suis pas reparti. J'ai vu ton message, qu'est ce qu'il se passe, Roxane? Tout va bien? |


Après une journée comme celle là, je ne m'étonnerais franchement pas que l'on m'annonce un nouveau désastre...

« Elle m’aime plus… Elle m’a peut-être même jamais aimée… Mais tant pis, si elle veut plus de moi, eh ben… Je t’ai encore, toi. Tu m’abandonneras pas, hein ? Même si Monsieur l’Ufric et madame la Lupa veulent pas de moi, tu seras encore là ? Même si je dois… vivre comme avant, ou dans la forêt. Tu m’apprendras à me transformer en louve ? Ou en écureuil, ou en renard beau comme toi, ou en quelque chose qui fasse pas bizarre dans la forêt… S’il te plait ? »

J’essayais de rester forte, mais j’avais très peur de perdre Charlie, comme j’avais perdu tout le monde avant elle. Et j’étais pas forte, je ne leurrais personne. Même pas moi… Mais je le deviendrais. J’espérais en tout cas. J’aurai bien été serrer Roxie dans mes bras, mais ça ferait pas de moi quelqu’un de fort. Et j’allais craquer, je crois, si je faisais ça. Alors je restais là, plantée comme une idiote, à me tortiller les doigts, et à regarder Roxane, puis la porte, puis Roxane, puis la porte, puis Roxane… Et à me sentir bête.

Je soupirai, en l’entendant dire qu’il allait falloir tout leur expliquer. Et que ça allait pas être facile. Mais qu’ils voudraient de moi. Moi j’étais sûre qu’ils allaient me bouffer. Ils me connaissaient pas, déjà. Et puis c’était pas bien, j’allais leur attirer des problèmes. J’aurai jamais du rejoindre la meute, j’aurai du fuir. Peut-être. Mais je voulais pas. Et c’était Charlie qui disait que je faisais que fuir, ou rien faire. Alors j’allais lui prouver que non. Et si je me faisais punir par Hayden et Mary, eh ben… Je baisserai la tête, et laisserai faire. C’était comme ça, non, maintenant que j’étais dans la meute ?

J’acquiesçais silencieusement, uniquement de la tête, en entendant ma renarde me dire de leur montrer du respect, de pas m’énerver. Je voulais pas m’énerver. Ils me faisaient peur en plus. Très, trop peur. J’aurai pu m’agenouiller devant eux, presque, pour pas croiser leurs regards, juste le sentir sur moi, brûlant. Je fixais mon poignet, comme si j’avais une montre que j’avais pas. Il était tort ? Constance était-elle levée ? Me cherchait-elle ? Il commençait à faire nuit, un peu. Je grimaçais – et si elle arrivait à retrouver ma trace ?

« Et si Constance vient me chercher ici ? »

J’espérais pas. Vraiment pas. Mais j’eus pas trop le temps d’y penser. D’abord parce qu’elle me répondit par rapport à Charlie, mais aussi parce que des gens arrivaient. Je me surpris à les sentir, alors que j’étais pas concentrée. D’habitude, je devais faire attention pour percevoir les gens. Je frémissais involontairement, avant qu’ils n’entrent. Et m’efforçais de ne pas sursauter, à leur entrée. Surtout en entendant leurs questions. Je savais pas s’ils pensaient que ça serait grave… Je retenais une nouvelle grimace.

« Bonjour monsieur l’Ulfric, bonjour madame la Lupa. C’est… pour moi que Roxane vous a demandé de venir. Je… Euh… Je sais pas si je peux faire ça comme ça, mais euh, j’ai quelque chose à vous demander. On voulait savoir si je pouvais venir vivre ici. Parce que j’ai des problèmes… Avec une vampire. Je, elle m’a capturée, et elle boit mon sang. »

Je me retenais de dire que s’ils ne voulaient plus de moi, je m’en irai. J’avais peut-être agi sans vraiment savoir en rejoignant la meute, mais je savais que je regrettais pas. Ou je le croyais. Et je voulais pas donner l’impression de regretter, parce que c’était pas le cas. Je baissais la tête, en signe de soumission, sans le vouloir.

« Je me soumets à votre punition, si il faut… »

La Lupa me salue d'un signe de tête en faisant son apparition, Signe de tête auquel je réponds d'un regard attaché au sien pendant quelques secondes, la reconnaissant implicitement comme mon égale. Plus particulièrement d'ailleurs, pour le problème qui semblait nous occuper. Je devais reconnaître qu'elle avait un contact bien meilleur que moi en ce qui concernait les métamorphes, et comme nous étions justement en présence de deux d'entre eux... Je connaissais relativement bien la plus âgée des deux, encore que connaître était peut être un bien grand mot. Nous avions déjà collaboré ensemble sur une affaire de la plus haute importance, vitale et éminemment personnelle en plus d'être collective. J'avais donc appris à connaître ce qu'il y avait de plus important chez Roxane, même si je ne savais pas grand chose de sa vie, de ses goûts, de tout le reste. Je connaissais le plus essentiel de sa personnalité et pour le moment ça me suffisait. Mais pour le reste, tout le reste, c'était Mary qui était la plus compétente, la plus ouverte. Je devais m'appuyer sur ses connaissances. Quant à l'autre métamorphe, la plus jeune des deux, je ne savais rien ou presque. Jeune et naïve, peu au fait des us et coutumes de nous autres changeurs. Elle semblait constamment apeurée par le fait de mal faire les choses. Peut être la jaugeais je mal, mais cela m'importait peu finalement. J'apprendrais avec le temps à mieux la cerner, comme tous les autres. Si la vie nous en laissait le loisir, bien sûr. Je souris en l'entendant m'appeler Monsieur l'Ulfric et Mary Madame la Lupa.


Je me fermais, me concentrais, alors qu'elle demandait pour vivre ici car avait des soucis avec une vampire. Seigneur, qu'est ce qui allait encore nous tomber dessus ? J'avais fait le serment de la protéger, et j'en avais l'obligation morale et lycanthrope. Super quoi, prisonnière et donneuse forcée ? J'allais le faire, j'allais la protéger, mais cela ne m'enchantait pas de connaître déjà de nouveaux problèmes avec les vampires. Roxane m'expliqua grosso modo ce qu'elle attendait de moi et de Mary. J'échangeais un regard de connivence avec Mary. Mary pris les devants.


| Tu seras en sécurité, ici.[/i] |


Je m'approchais de Roxane, la prenant à part en posant ma main sur son bras, l'attirant un peu plus loin et baissant la voix.


| [b]Je vais contacter les vampires ; je vais en discuter après Mary mais je vais régler la question chez eux. Je ne peux pas risquer la paix pour le moment, alors je vais faire fonctionner à plein régime le comité interracial ; c'est à cela qu'il sert. Mais je vais avoir besoin de toi. Besoin de toi pour savoir qui est mêlé à ça, et si c'est une directive officielle. Commencer par remonter la vampire en question et rechercher les ramifications. Tu t'en sens capable, si Mary est d'accord avec ce plan ? J'ai besoin de savoir à quoi je dois faire face. J'ai conscience de laisser reposer beaucoup sur tes épaules... |

Je suis rassurée, par ce que dit Roxane. Je ne sais pas si c’était vrai, si elle pensait tout cela réellement, mais je ne pouvais m’empêcher de m’y accrocher, comme je m’accrochais au fait que je laissais Constance boire mon sang pour qu’elle ne s’attaque pas aux gens que j’aimais, quand j’y étais. Pour faire passer la pilule plus facilement. Je doutais de beaucoup de choses, y compris de son assurance alors qu’elle disait que je n’aurai besoin de rien de tout ça, parce que je vivrais avec elle, parce que je serai à Wolfheaven, de son assurance quand elle affirma que Constance ne viendrait pas. Comment aurait-elle pu en être sûre ? Aucune idée, mais je voyais dans ses yeux qu’elle plongeait dans les miens, contact qu’elle forçait, que pour elle, elle disait la vérité. Et elle s’y connaissait mieux, bien mieux que moi, n’est-ce pas ? Et puis, si je ne lui faisais pas confiance, même si je craignais qu’elle ne se trompe, à qui pourrais-je faire confiance ? Je soupirais, avant d’être interpellée par une odeur, deux en fait, des bruits, des pas… Que j’aurai voulu être Charlie, mais que ça n’était pas. Je m’efforçais de calmer ma panique, ma honte et ma culpabilité, à grand’ peine.

J’étais dans une position délicate, peu enviable. J’apportais à l’instant des ennuis, alors que je n’étais qu’une nouvelle recrue dans la meute. Nouvelle recrue inutile, qui plus est. Je ne savais rien. Rien du tout. Pas me battre, rien. Non, c’était faux. Je savais espionner. Mais je n’en étais pas fière. Pas fière du tout. Je ne voyais de toute façon pas en quoi cela pourrait leur servir. Pas le moins du monde. De toute façon, on ne m’avait pas demandé d’être utile, si ? Mais on me le demanderait surement. J’étais une brebis pour la meute. D’ailleurs, c’est en ça que j’aurai du me transformer, au moins je leur aurai servi à quelque chose. A me manger. Mais ça changeait rien. D’abord, je me transformais pas en brebis, et en plus, je pourrais pas le leur dire. Qu’est-ce que j’allais faire ? Prendre la parole, et balancer que j’avais espionné Ashleigh alors qu’Hayden, le pas Ulfric, l’accusait ? Balancer que j’avais lu tous les documents de Mirah sur les recherches lupines, et écouté quelques fois ce qu’elle disait, même ? Bien sûr, et me faire assassiner ?

Je soupirais, laissant Roxane les saluer, et eux la saluer en retour, et moi les saluer après. Maladroitement. Bêtement. Gênée et anxieuse. Je pris une grande inspiration, parlant sans reprendre mon souffle, sans attendra, sans discontinuer. Je jetais un regard surpris à la Lupa, sans vraiment le vouloir, alors qu’elle relevait mon menton, et me fixait. Je me reteins de trembler, effrayée d’avance de sa réponse. Mais ses yeux semblaient doux. Mais peut-être qu’ils mentaient. Ma tension me quitta, alors qu’elle me disait que j’étais la bienvenue, que je n’avais rien fait de mal. Que ça n’était pas ma faute. J’avais envie de la croire. Alors je souriais, légèrement, très légèrement. J’acquiesçais, en l’entendant me questionner. Bien sûr, j’allais lui dire. Heureusement, Charlie m’avait dit l’avoir avoué à l’Ulfric. Donc la Lupa devait aussi savoir, non ? J’espérais. Je regardais légèrement Roxane, écartée par l’Ulfric, et grimaçait, en n’entendant pas ce qu’ils disaient. Tant pis.

« Elle s’appelle Constance, madame. Je sais rien sur elle, mais elle est riche… Et elle a plein de gardes. Elle a 600 ans. Et elle connaissait Alan et Camille. Elle m’a dit qu’Alan était pas un loup. Je… C’est… Elle a attaqué Charlie, madame. Et elle a lu des messages. Des messages qui trahissaient ce que… je suis. Les métamorphes. Parce que Charlie m’a sauvée de la PES, de Mc Bourough qui a vu une humaine m’attaquer, et me trahir… On lui a dit que j’étais une louve. J’ai dit à Cha que je lui avais dit ça, avant qu’elle nous rejoigne. Et alors Constance m’a forcée à venir, sans quoi elle tuait Charlie. Elle nous cherchait, madame. Elle voulait m’amener à sa Reine. Je sais pas pourquoi… Je baissais la tête. J’étais vraiment inutile. Je vous sers pas à grand chose… Mais je peux vous être utile. Je crois. Je sais que c’est pas bien, mais… Je sais espionner sans me faire remarquer. J’ai vu Hayden Clearwater accuser Ashleigh. J’ai vu Mirah, regarder ses livres d’histoire des loups… Je l’ai écoutée, se parler sur ça. J’ai lu ses recherches, quand elle était pas chez elle… »

Je grimaçais, encore. J’aurai du me taire, peut-être. Surement.