On m’avait pris pour un con et j’avais horreur de ça, pour autant mon apaisement depuis que je n’étais plus un soldat de Dieu m’aidait à mieux me contrôler. Là où à l’époque j’aurais fait sauté un bâtiment entier ou buter un mec parce qu’il m’avait pris pour un con, aujourd’hui je me contentais de me rappeler à son souvenir en usant des moyens à ma disposition. O’More était l’un de ceux qui m’avait pris pour un con et aujourd’hui je venais à lui pour lui dire le fond de ma pensée. N’étant pas totalement débile je n’étais pas venu seul, accompagné de deux agents – l’un dissimulé pas trop loin de moi – et le second dans nos locaux en contact permanent avec nous. Pourquoi ce procédé ? Parce que nous attentions à l’instant même que le lycan ne finisse sa journée de travail, et il était possible qu’il n’apprécie pas notre conversation. N’ayant pas envie de crever en cette fin de journée j’avais donc pris mes précautions.
Je suivais le loup le plus discrètement possible en dépit de ses capacités de prédateur et comme je le présumais il m’avait débusqué. Je m’avançai ouvertement vers lui après qu’il se fut adressé à moi pour en faire de même et entamer notre conversation.

O’More. dis-je pour me signaler officiellement à lui avant de reprendre. Vous auriez tort d’essayer, d’autant qu’il se dit souvent que je suis plutôt indigeste. dis-je encore d’un ton ironique volontairement appuyé.

Comment vous portez-vous depuis notre dernière rencontre dans nos locaux O’More ? Vous avez des nouvelles de McAllister et de cette gamine louveteau ? Elle n’a tué personne ? Parce que son agresseur, elle a disparu de la circulation, ce qui vous place comme suspects vous et votre collègue. J’estime la môme trop chiasseuse pour s’en être chargée elle-même. L’instinct animal vous pousse vraiment à faire de belles conneries parfois non ?

Avant de lui dire que je savais pour les métamorphes, pour la vraie nature de la jeune fille, je préférais faire monter peu à peu la pression et dire que la nana qui avait agressé la jeune prétendue louve avait disparu. Oui j’aimais jouer avec les gens, surtout les connards qui pensaient pouvoir me la mettre à l’envers.

On avait un accord O’More, et vous m’avez entubé vous et McAllister. lui dis-je simplement pour aborder le sujet mais sans trop lui en dévoiler d’un coup. Je voulais qu’il s’interroge, qu’il comprenne qu’il avait merdé. Du coup on peut oublier notre arrangement, préparez vos gosses à recevoir la visite de nos agents, que ce soit chez vous ou votre ex.

Prendrait-il peu ou croirait-il que je bluffais ? J’étais bien curieux de le voir et ne craignais pas pour ma vie, quoi que j’avais pris sur moi une lame aux bords en argent et mon flingue équipé dans la même idée.

Le loup réagit plutôt calmement à mes paroles et mes provocations ce qui n’était pas pour me surprendre. Les lycans n’étaient pas connus pour leur capacité à garder leur calme facilement, contrairement aux vampires dont leur capacité à jouer avec les apparences elle était légendaire. Le bénéfice de l’âge probablement. Toujours était-il qu’O’More nia être au courant de ce qu’il était arrivé à l’adolescente, mouais. J’étais peu convaincu mais pourquoi pas.

Lorsqu’il réagit à ce que j’avais dit au sujet de notre accord il décida d’en rappeler les termes. Il estimait donc ne pas y avoir manqué, en me mentant à propos d’une espèce cachée. Le sourire mauvais qui s’afficha alors sur mon visage devait lui faire deviner que je n’étais pas d’humeur à me faire enfler une nouvelle fois.

Parce que mentir quant à la nature d’un individu ne peut menacer la paix inter-espèce selon vous O’More ? lui dis-je, cynique et peu avenant avec lui.

Il devait commencer à comprendre que je savais pour la gamine, pour les métamorphes, et se demander comment j’en avais été informé. Cherche le canidé, cherche et torture-toi les méninges pour essayer de trouver la réponse à tes questions.

Vous et McAllister m’avez raconté des conneries, Alexis Lindon n’est pas une loup-garou. Et grâce à votre mensonge nous avons désormais une base de référence pour comparer les prélèvements de sang des prétendus lycans passés par la Brigade.

En revanche ceci n’aidera pas votre espèce à expliquer pourquoi elle a dissimulé une espèce, je comprends mieux la passion de cette scientifique lors du débat télévisé pour affirmer qu’aucune nouvelle espèce capable de se transformer n’existait. « Ce serait trop gros » avait-elle dit.

Tout en lui parlant je repensais à ce fameux débat télévisé et aux différents protagonistes qui s’y étaient exprimés. Des loups, des vampires… Ces derniers étaient-ils aussi au fait de l’existence des métamorphes ? En cachaient-ils aussi parmi eux ? Peu probable selon mon avis car les vampires ne s’encombrent pas à protéger quiconque, à moins d’y trouver un intérêt. Hmm… Avoir le fin mot de l’histoire à ce sujet ne serait pas facile, mais voyons tout d’abord comment O’More allait réagir et me répondre.

O’More semblait décidé à jouer au con et à ce moment-là il était l’égal de tous ceux que la Brigade avait arrêté toute espèce confondu. Face à la vérité ils faisaient tous semblants de l’ignorer, comme si cela pouvait être crédible une seconde. Ceci avait le don de me foutre les glandes aussi laissai-je s’évacuer un peu de ma colère.

Vous voulez vraiment joué à ça ? lui demandai-je en lui jetant un regard noir avant de poursuivre après quelques instants.

Le problème avec les réfractaires c’est qu’en général ils n’en restent pas là. lui dis-je simplement décidé à ne pas tout lui cracher du coup. Il voulait me faire galérer, j’allais en faire de même. Et ça commençait par un mensonge.

Mes paroles devraient lui faire comprendre que je savais pour les métamorphes, pour leur alliance avec les lycans et aussi que certains métamorphes n’y avaient adhéré. Je ne voulais pas qu’il puisse déduire que je tenais mes infos d’une des louves de sa meute, d’où mon plan de faire croire que mon contact était un changeur solitaire.

Vous ne valez pas mieux que les vampires en définitive, vous feriez mieux de vous allier ça serait plus productif. lui dis-je moqueur et avec le désir de le provoquer. Je prenais un sacré risque car s’il le voulait il pouvait me crever comme un chien avec un lapin, l’agent à mes côtés pourrait peut-être le blesser mais pas forcément me sauver les miches. S’il se jetait sur moi, l’agent avec lequel nous étions en liaison pourrait toujours envoyer une équipe pour chercher et arrêter O’More après une éventuelle fuite.

J’estimais avoir pour garantie de ma sécurité le fait qu’il ne voudrait pas causer d’incident diplomatique entre les autorités humaines et leur meute. Mais un individu peut tout foutre en l’air à cause d’un détail, chacun a ses limites.

Je peux vous pourrir la vie O’More, plus que jusqu’à présent. Je veux la liste des métamorphes intégrés au sein de votre meute. lui dis-je soudainement, qu’il comprenne que désormais je n’allais plus me contenter d’attendre qu’il me donne des informations. Je lui avais offert un accord et il l’avait balayé, il allait en payer les conséquences.

J’observais mon interlocuteur sans faillir fasse à ses paroles ou son ton. Il ne m’effrayait pas le moins du monde, j’avais conscience du danger potentiel pour autant cela ne me réduirait pas au silence. Je ne dis rien en réaction à ses premières paroles quant à ses tracas personnels, ce n’était pas moi qui en était à l’origine.

Vous faites bien d’abordé ce sujet. Le scientifique qui était chargé des recherches en la matière à l’origine s’est révélé être l’un des vôtres. Lorsque sa véritable nature a été découverte, il a été établi qu’il biaisait les recherches notamment celles sur l’étude de l’adn lycan. lui dis-je avant de l’écouter et de lui répondre.

Très bien, je vous attends donc demain. Ne commettez pas l’erreur de ne pas venir ni de me mentir. Vos paroles pourront compléter celles de mon contact. lui dis-je vaguement pour tester sa réaction. Quant à l’école de vos enfants je m’en occupe.

Alors qu’il s’apprêtait à partir il s’adressa une dernière fois à moi pour me faire part d’une remarque. Impossible de savoir s’il était franc ou s’il ne s’agissait que d’une mascarade aussi demeurai-je circonspect.

Vous voulez un statut de collaborateur officiel avec la Brigade ? Je n’imaginais pas une telle requête de votre part, surtout vis-à-vis de votre meute. Mais cela pourrait s’arranger. Quant aux informations que j’obtiens elles me permettent de faire ce que je peux pour éviter que les semi-démons ne parviennent à déclencher un nouveau conflit de l’envergure des Années Sanglantes.

Quoi qu’il en soit n’espérez aucune clémence si vous me mentez une nouvelle fois. Autant vous le dire, vous allez être placé sous surveillance dès lors que vous sortirez du territoire de la meute. On ne sait jamais. lui dis-je avant d’indiquer à l’agent à mes côtés que nous en avions terminé avec O More pour ce soir.