Tu t’éveilles en sursaut, hume l’air et cherches à savoir où tu es.

La forêt.

Les odeurs de la ville ne sont pas loin. Edinburgh. Les souvenirs te reviennent par vagues.

Des odeurs tout d’abord.

Une odeur vide, presque inexistante, une portion de néant dans le canevas olfactif de ta soirée.

Un homme.

C’est à lui qu’appartient cette odeur si particulière de par son absence de particularité. Une odeur … transparente.

Des images.

Son visage est gravé dans ta mémoire désormais. Tu ne l’oublieras pas.

Et enfin des sensations.

Ses mains enserrant ton cou. Non pas ton cou, le sien, celle de l’humaine. Ses mains frappant ses oreilles. Tes dents s’enfonçant dans la chair de son mollet tandis que tu prenais la fuite.

Rentrer.

Tu secoues ton pelage aux reflets roux pour en retirer la poussière, étires tes pattes puis entame la longue marche qui te ramènera à Wolfheaven.

Mary.

Il faut que tu la voies, que tu lui parles. C’est en tous cas ce que veut la part humaine qui commence doucement à reprendre le contrôle tandis que les souvenirs se bousculent dans ta tête.
Tu traces ta route sans te retourner, sans même te laisser distraire par les proies que tu sens non loin. Tu les fais fuir sur ton passage. Tu ne te soucies pas de ta discrétion. Tu n’as plus qu’une envie, rentrer le plus vite possible.

Arrivée à destination tu croises quelques loups, que tu remarques à peine. Tu cours vers la maison de Mary. Tu sais qu’elle est probablement inquiète. Tu devais la retrouver hier soir après ta sortie. Tu griffes sa porte frénétiquement, faisant des huit nerveux sur le sol entre deux séances d’énervement. Pourquoi n’ouvre-t-elle pas ? Tu pourrais changer de forme, la laisser reprendre le contrôle, et ouvrir la porte. Mais tu ne le fais pas, tu es trop perturbée pour ça. Le temps te parait durer une éternité. Pourquoi n’ouvre-t-elle pas ?

Enfin la porte s’ouvre et tu te faufiles dans l’entrebâillement, entre les jambes de celle qui a enfin daigné ouvrir. Tu sautes sur le canapé et tentes de te calmer. Après quelques secondes de concentration tu te calmes enfin et la laisse reprendre le contrôle. Tes oreilles se réduisent pour prendre la forme ronde des oreilles humaines, la fourrure rousse disparait de ton corps qui s’allonge, pour ne rester que sur le crâne de Roxane, et entre ses jambes fines et musclées.

Les mains de la métamorphe sont posées sur ses tempes. Elle ne dit rien. Elle tente de se concentrer, de faire le point. Sa capacité d’analyse est bien plus efficace sous cette forme. C’est comme si elle reprenait conscience de sa soirée de la veille. Les souvenirs ont une saveur différente, un sens différent. Il a fait partie des fils de p*** qui ont tenté de lui faire la peau. Il l’a presque tuée ce soir-là. Il doit payer. Il va payer. La rage commence à prendre possession de la rouquine dont les mains tremblent légèrement. Ses nerfs sont à vifs. Sur son cou on peut deviner les marques de ses mains qui ont tenté de l’étouffer. Des rougeurs sont bien visibles sur son ventre, là où il a frappé. Il va payer.

Elle marchait en rond, le cœur battant à tout rompre, attendant elle ne savait quoi. Ou plutôt si, elle savait pertinemment ce qu’elle attendait. Des nouvelles, un signe. Un simple signe. Un message, quelque chose qui lui permettrait de savoir où elle était. Ce qu’elle faisait. Si elle était en danger. La Lupa errait donc comme un loup en cage, ruminant ses angoisses qui la paralysaient. La soirée était déjà bien entamée à la Lune Bleue et l’ambiance était à la fête. Tout le monde riait et dansait mais Mary, elle, n’avait pas le cœur à rire. Bon Dieu, où est-ce qu’elle avait bien pu aller ! Elle était certainement en danger. Roxane. Sa petite Roxie. Elle la considérait comme sa propre fille, pourtant la jeune femme était une métamorphe, non une lycan. Mary n’en avait cure. Elle s’était attachée à elle et depuis ce jour, elle avait protégée Roxane, l’aidant à mieux maîtriser ses pouvoirs.

Qu’est-ce qu’elle foutait, bon sang ! Mary n’était pas réputée pour sa patience et cette petite jouait franchement avec ses nerfs. En bonne pseudo-mère, la louve imaginait déjà le pire. Et si les vampires étaient dans le coup ? Et si Roxane avait été tué ? Un long frisson lui remonta le long du dos. Non. Elle devait cesser de penser à cela et se concentrer sur autre chose. Plus facile à dire qu’à faire. Elle se demanda un bref instant ce qu’elle pourrait faire pour obtenir des nouvelles, pourquoi pas envoyer Isadora à sa recherche. Mais elle se ravisa immédiatement. Une règle fondamentale voulait que l’intérêt de la meute passe avant l’intérêt personnel. Or, la meute n’avait absolument pas besoin de Roxane, contrairement à Mary.

Décidément, elle n’était absolument bonne à rien ce soir. Elle n’avait pas la tête à travailler. Elle alla prévenir la jeunette au bar qu’elle rentrait chez elle et qu’elle était joignable. Puis, elle sortit de la Lune Bleue et rejoignit son domicile. Elle ne parvenait pas à se concentrer, ses pensées la ramenant irrémédiablement vers Roxane. La meilleure façon de passer à autre chose, c’était de se faire couler un bon bain. Elle retira rapidement ses vêtements qu’elle laissa en vrac dans l’escalier et monta à l’étage. Laissant l’eau couler, elle resta un long moment à dévisager son reflet dans le miroir. Puis, elle glissa dans l’eau brûlante, poussant un soupir de soulagement. Elle resta une bonne demi-heure dans l’eau chaude et cela lui fit du bien. Lorsqu’elle en sortit, elle entendit un bruit sourd à la porte, en bas. Qu’est-ce que c’était ?! Le cœur battant, Mary enfila à toute allure un peignoir de bain et descendit les escaliers quatre à quatre. Elle ouvrit la porte et son cœur rata un battement. Roxane sous sa forme de renard. Elle se faufile rapidement entre les jambes de la louve et saute sur le canapé, l’air paniqué. Mary se contente de la suivre. En quelques secondes, Roxane a repris forme humaine, se tenant la tête entre ses mains. Les traces sur son cou et sur son ventre font frémir Mary. Elle sort de la pièce et revient rapidement avec une robe de chambre bien chaude. La déposant en douceur sur les épaules de la métamorphe, la Lupa murmure :

Qu’est-ce qui s’est passé, Roxie ? Dis-moi ! Ca fait des heures que je me demandais où tu étais.

La métamorphe tente de se calmer, de rassembler ses pensées. Se concentrant sur le battement de son cœur tout d’abord, elle ralentit son rythme trop rapide. Puis elle travaille sur sa respiration.

Inspiration. Expiration. Inspiration. Expiration.
Lentement.

Elle oublie Mary le temps d’arriver à calmer son corps qui s’agite. Elle sent la douceur d’un tissu se poser sur ses épaules. Elle attrape la robe de chambre pour la refermer autour de sa peau nue. Pas par pudeur mais parce que la chaleur du coton contre sa peau fraiche des heures passées dehors lui fait du bien. Et puis il y a l’odeur. L’odeur de Mary.

Inspiration. Expiration. Inspiration. Expiration.

Chaque respiration lui apporte une bouffée de cette odeur qui lui inspire un sentiment de sécurité et de bien-être. L’odeur de Mary.

Mary. La métamorphe reprend doucement le contrôle de son corps et de ses sens. Elle refait surface, reprend contact avec la réalité. La voix de Mary lui parvient. Une voix douce et familière qui la rassurer et la calme. Roxane se sent la force de parler. Laissant encore quelques secondes le silence planer après la question de son amie, elle tente de mettre ses pensées en ordre.

« Un homme … Avec les vampires »

Ses pensées se bousculent tandis qu’elle tente d’expliquer ce qui s’est passé à Mary, et sa voix s’entrecoupe de tentatives d’inspiration incontrôlées. Elle se stoppe, reprend une respiration régulière, et recommence.

« Un homme. Philipp. Mais je pense que c’est un faux nom. Il était avec les vampires la fois où … »

Des larmes de rage viennent à nouveau interrompre son récit. Elle les essuie d’un revers de la main, énervée.

« La fois où j’ai failli mourir »

Les mains de la métamorphe tremblent, non de fatigue mais de colère. Elle s’en veut de n’avoir pas saisi sa chance de le tuer. Elle aurait dû essayer un peu plus. Ne pas fuir. Lui faire payer ce qu’il lui avait infligé.

« Je suis désolée que tu te sois inquiétée pour moi. »

Mary avait ramené une robe de chambre bien chaude à la renarde et l'avait déposé en douceur sur ses épaules. Morte d'inquiétude, elle se demandait ce qui s'était passé et se sentit furieuse lorsqu'elle vit les marques que portait Roxane sur son cou et son ventre. Qui avait eu l'audace ? Elle aurait dépecé vivants les responsables en cet instant. Cette petite était comme son enfant et elle aurait donné sa vie pour elle. Roxane respire à fond, tentant de se calmer. Elle finit apparemment par y arriver et attrapa les bords de la robe de chambre pour les ramener sur elle. Mary se relève et revient quelques secondes plus tard avec une couverture cette fois qu'elle enroule autour de la métamorphe. Elle essaye de ne pas la bousculer même si elle brûle d'envie de savoir ce qui s'est passé.

Au bout de longues minutes, la Lupa finit par n'en plus pouvoir et lui demande avec douceur mais inquiétude ce qui s'est passé. Roxane semble l'entendre de loin, comme si elle était ailleurs. Elle émerge et la regarde. Mary sent son cœur se briser en entendant sa voix retentir dans le silence de la maison. Un homme. Avec les vampires. Le cœur de Mary fait un bond. Serait-ce... Torben ? Impossible de le savoir. Elle se penche sur Roxane et la serre doucement dans ses bras, caressant sa tête comme une enfant qui aurait fait un cauchemar.

Ne t'en fais pas, c'est fini, je suis là.

La voix est sanglotante, entrecoupée de tentatives d'inspirations qui hachent le discours. Elle arrive à reprendre la maîtrise d'elle-même et explique qu'un homme appelé Philipp était présent. Mary continue de caresser doucement la chevelure de la renarde. Elle sait pertinemment ce que Roxane n'arrive pas à évoquer. Mais elle lâche la phrase, comme une bombe. Oui, Mary se souviendra toujours de cette fameuse nuit où la Meute lui ramena le corps de Roxane et où elle hurla sa peine, persuadée que la renarde était sur le point de rendre l'âme. Elle ne l'avait pas accepté et avait demandé à ses loups de la soigner. La rage et la haine s'enflammèrent dans le cœur de la Lupa. Ainsi le responsable était présent.

Tu as essayé de le tuer ? Tu es folle ! Tu sais bien que tu peux me demander ce que tu veux. L'exécuteur est là pour cela, je peux l'envoyer retrouver cet homme et l'éliminer.

Se relevant, elle prépara rapidement un chocolat bien chaud à Roxane qu'elle lui apporta dans une tasse fumante. La métamorphe était en train de s'excuser de l'avoir fait s'inquiéter. Mary fit un geste de la main.

Je ne veux pas que tu t'excuses, je veux que tu me promettes de ne pas recommencer. C'est dangereux. Où tu étais exactement ? Qu'est-ce qui s'est passé réellement?

Les bras de Mary se referment autour de Roxane. Elle sent leur douceur. L'odeur familière et rassurante emplit ses narines. La chaleur de la louve réchauffe le petit cœur de la métamorphe. Bien plus que la couverture qu'elle a déposé avec douceur sur les épaules de Roxane. Elle aimerait la remercier, mais ses pensées se bousculent toujours, s'emmèlent et se chassent. Rassurée par l'étreinte et les mots de la Lupa, elle parvient à reprendre son récit.

Mais le calme rassurant de la louve ne dure pas. La métamorphe la sent se crisper tandis qu'elle raconte. Elle entend le cœur qui bat plus fort, et la louve qui gronde sous la peau de Mary. Elle se sent mal. C'est sa faute. Roxane se sent coupable de se fourrer sans cesse dans les ennuis. Elle voudrait que son amie n'ait pas à s'inquiéter pour elle. Mais elle ne peut pas la laisser dire. Elle est la Lupa. C'est la meute qu'elle doit protéger, pas une métamorphe qui n'y a pas sa place.

Tu n'as pas à mêler Hayden à ça, et tu le sais. Mes problèmes ne sont pas ceux de la Meute.

Roxane réfléchit quelques secondes avant de poursuivre.

Et je ne suis pas folle. Je sais maintenant à quoi m'attendre. Je ne prendrai pas de risque. Même ce soir, je … Je n'en ai as pris. Enfin moins que … Moins que je n'aurai pu en prendre. Une renarde. Je suis une renarde. Mon instinct de survie ne me laissera pas tomber, malgré mes désirs de vengeance.

Mary s'est éloignée dans la cuisine, et Roxane l'entend s'affairer. Une odeur de lait vient emplir ses narines, disparaissant bientôt devant celle plus forte et épicée du chocolat. Le ventre de la métamorphe gronde. Elle meurt de faim. Elle prend la tasse que Mary lui tend. La porcelaine semble brûlante sous les doigts encore glacés de la changeuse de forme. Elle porte la tasse à son visage et souffle dessus. La chaleur du liquide monte sous forme de vapeur à son visage, réchauffant son nez et ses joues encore rouges de froid.

Merci.

La métamorphe ferme les yeux pour profiter de la chaleur qui monte. Elle prend une première gorgée tandis que Mary envoie valser ses excuses d'un revers de la main. Roxane aimerait pouvoir faire ce que son amie lui demande, mais elle sait que ce serait lui mentir que de lui dire qu'elle ne recommencera pas.

Tu me connais, Mary. Tu sais que je ne peux pas te le promettre. Maintenant que je connais son visage, je ne l'oublierai pas. Je ne peux que te promettre d'être prudente, mais je ne peux pas te promettre de ne pas me venger.

La métamorphe se rend compte soudain de la facilité avec laquelle les mots sortent de sa gorge. Elle s'est calmée. Mary est douée. Elle sait quoi faire, et quoi dire. Roxane prend une nouvelle gorgée de lait, prenant le temps de la savourer, de la sentir descendre, réchauffant son corps de l'intérieur. Elle va mieux.

J'étais au Celtic. J'avais prévu subtiliser quelques billets à des piliers de comptoir. La soirée avait plutôt bien commencé. Et puis ce gars m'a aguichée un peu, me proposant un verre. J'ai fait semblant de m'intéresser à lui, pour pouvoir le délester un peu. Rien d'inhabituel. Tout se passait bien, j'ai même réussi à lui subtiliser quelque chose. Pas eu le temps de voir quoi, j'ai tout laissé là-bas lorsque j'ai dû me transformer.

La métamorphe réchauffe le dos de ses mains, une à une, contre la tasse encore fumante. Elle reprend quelques gorgées. Plus petites cette fois.

On est sortis du bar pour prendre l'air, il voulait aller danser. Et c'est en marchant que j'ai compris qu'il n'était pas celui qu'il prétendait être. Lui voulait me tuer depuis qu'il m'avait vu dans ce bar. Il me pensait morte après notre première rencontre en fait. Et surtout il me pensait louve. Une petite erreur de jugement qui lui a presque été fatale.

Un léger sourire vient effleurer ses lèvres au souvenir du coup qu'elle lui avait assené par derrière.

Mais il est fort. Bien plus que ce que je ne pensais. Malgré l'avantage de la surprise que j'ai eu, je n'ai pas réussi à en finir avec lui.

Son sourire disparaît rapidement, chassé par son énervement d'avoir raté sa cible.

Le cœur de la Lupa bat si vite... Faites des enfants tiens ! En cet instant, elle est presque satisfaite de ne pouvoir enfanter. Les gamins sont une telle source d'ennuis et d'inquiétude. Car oui, Roxane est comme une fille pour elle. Sa nature ne change rien, elle fait partie des siens et jamais elle ne la laissera tomber. Mary s'est placée à côté de sa petite protégée et l'a serrée très fort contre elle, comme on consolerait un enfant d'un mauvais rêve. Mais le récit qui reprend n'est absolument pas fait pour rassurer la Lupa. Son cœur accélère douloureusement lorsqu'elle écoute Roxane. Elle voit bien que la renarde ne se sent pas bien et doit s'en vouloir de lui avoir fait tant peur. Mais elle ne peut contenir la louve qui gronde en elle. Pour un peu, elle se transformerait et irait régler leur compte aux agresseurs de la renarde elle-même. Ils ne perdent rien pour attendre. Mais la proposition d'envoyer l'exécuteur reçoit un refus catégorique de la part de la jeune femme. Et Mary sait pertinemment au fond d'elle-même que la renarde a raison. Les intérêts de la Meute devaient toujours primer sur ceux des individus.

Oui, tu as raison. Je m'emporte. Mais tu sais que tu fais partie de la Meute et que tu peux compter sur son soutien.

Le reste des paroles de Roxane ne la rassurait pas outre mesure. Elle répliqua vivement :

Tu sais à quoi t'attendre ?! Tu as agi avec bien peu de prudence ! Pas pris de risque ? Tu as vu les traces que tu as sur le cou ? Tu n'as vraiment pas conscience de ce que tu as risqué au contraire. Ton instinct de survie ne fait pas tout. Surtout face à des hommes déterminés.

Elle avait très peur que la renarde ne se lance à nouveau dans une opération périlleuse. Mais elle la connaissait et savait que tenter de l'en empêcher, c'était ridicule. Cependant, si elle pouvait lui mettre du plomb dans la cervelle, elle ne s'en priverait pas. La Lupa s'était levée, laissant sa protégée un bref instant seule. Elle avait rejoint la cuisine. Elle connaissait un seul remède contre le choc et le froid. Elle avait versé une bonne quantité de lait dans une casserole qu'elle avait ensuite mis sur le feu. Et elle rajouté une fois le lait chaud du chocolat dedans. Apportant la tasse à Roxane, elle vit avec plaisir que cette dernière se jeta dessus, se réchauffant les mains contre la porcelaine. Ses remerciements firent sourire Mary.

Bois, ça te fera du bien.

La Lupa a littéralement balayé les excuses de Roxane. Que peuvent lui apporter des excuses si la renarde se fait tuer dans quelques semaines ? Elle connaît sa fougue et son tempérament têtu. Elle lui ressemble sur ses points-là. Et elle a conscience que, quoiqu'elle dise ou fasse, Roxie n'en fera qu'à sa tête, à son grand désespoir. Les paroles de la métamorphe arrachent un profond soupir à la louve.

Oui, je te connais. Et c'est pour ça que j'ai peur pour toi. Je ne veux pas qu'il t'arrive malheur. Je perdrai tout... Enfin, je suppose qu'avoir déjà ta promesse d'être prudente, c'est déjà pas si mal...

Mary se promet intérieurement de faire surveiller de près la jeune renarde pour éviter qu'elle ne recommence. Après tout, la petite apprentie de l'exécutrice peut s’acquitter de cette mission sans porter préjudice aux intérêts de la Meute. Et la Lupa se sentira plus rassurée ainsi. Le chocolat semble avoir fait l'effet escompté sur la métamorphe. Elle semble aller un peu mieux et sa parole est plus fluide. Elle commence alors le récit détaillé de sa soirée et Mary l'écoute silencieusement. Elle ne se permettrait pas de juger les activités illicites de son amie. Après tout, Mary était loin d'être une sainte et il y avait bon nombre de petits trafics à la Lune Bleue sur lesquels elle fermait les yeux, recevant même une part du magot. La fin des paroles de la renarde montre clairement sa déception de ne pas avoir réussi à tuer l'homme. Mary hoche doucement la tête, répondant alors à la renarde.

Je me demande de qui il peut bien s'agir. L'homme de main de la Reine ? Ou quelqu'un d'autre... Tu penses qu'il était humain ? Ce n'était pas une créature surnaturelle ? Dans tous les cas, tu as eu de la chance, Roxie. Tu aurais pu te faire tuer. Je t'en conjure, oublie l'idée de l'éliminer. Tu l'as déjà bien amoché, c'est suffisant. Et le plus important, tu t'en es tiré. Je ne veux pas qu'on me ramène encore une fois ton corps inconscient, je t'en prie!

Les réprimandes de Mary font rire la renarde. Cependant elle tente de se retenir pour ne pas la vexer. Elle sait que la Louve s’inquiète pour elle, mais sa réaction l’amuse, maintenant que le stress est redescendu. Peut-être même à cause de la descente du stress. Son ton est franchement amusé lorsqu’elle lui répond.

« Allons, ce ne sont pas deux-trois petites marques sur mon corps qui vont me faire peur. Je ne suis plus à ça près »

Reprenant légèrement son sérieux, elle ajoute tout de même.

« Je serai plus prudente la prochaine fois, promis. »

Les questions de Mary lui rappellent un détail qu’elle a omis de lui raconter. Finissant sa tasse d’une traite, elle la pose sur la table basse et tente de mettre des mots sur ce qu’elle a perçu.

« Ce n’était pas un vampire, ça j’en suis sure. Mais j’ai senti quelque chose d’un peu étrange. Enfin pas vraiment senti justement. C’est comme si il manquait quelque chose dans son odeur. Il manquait les petites imperfections qui font de chaque odeur humaine une odeur unique. Je ne sais pas vraiment, c’était vraiment presque rien, et pourtant je suis sure de ce que j’ai ressenti. »

Roxane ferme une nouvelle fois les yeux tandis que Mary tente une nouvelle fois de la convaincre d’abandonner sa vendetta. Elle rejette doucement la tête en arrière pour la laisser reposer sur le canapé. Le stress est en train de redescendre. Sa respiration est calmée, et son corps a repris sa température habituelle. Elle se sent soudain épuisée. Sans rouvrir les yeux, elle s’adresse à Mary, omettant volontairement de lui répondre.

« Je suis complètement morte. Sans mauvais jeu de mots. Ca t’embête si je dors ici ? »

Evidemment, les paroles de Mary n'avaient aucun effet sur la renarde, comme toute bonne maman s'inquiétant pour la santé de son enfant. Mais elle ne s'avouait pas vaincue. Elle savait que Roxane tentait de ne pas la vexer et essayait de détourner la conversation. Mais l'inquiétude de Mary ne fait que grandir. S'il s'avère qu'il s'agit bien de Torben, elle avait tout lieu de redouter les escapades de Roxane. La renarde prit avec beaucoup de légèreté sa remarque.

Tu ne devrais pas être si insouciante. Tu pourrais le regretter, Roxanne. Et je ne veux pas qu'il t'arrive meilleur.

Roxane cesse alors de sourire et lui adresse une réponse encourageante. Naturellement, Mary connaît bien la renarde et sait qu'elle ne peut espérer plus.

Bon, très bien, n'en parlons plus.

La suite des paroles de la jeune femme acheva d'inquiéter Mary. Qui était donc cet homme ? Visiblement pas un vampire d'après ce que lui disait la métamorphe. Cela pouvait parfaitement correspondre à la description du chien de la Reine. La description de son odeur attira l'attention de le Lupa. Oui, ça lui rappelait réellement ce qu'elle avait senti lorsque Torben avait été près d'elle. Depuis sa transformation, son odeur avait changé. Elle hocha la tête.

Je me demande si c'est bien lui... Auquel cas, tu risques gros et tu n'es pas de taille à le tuer. Il peut te détruire, Roxie. Tiens-toi à distance de lui.

Mary n'avait pas précisé qu'elle avait eu une relation particulière avec Torben. Ni que ce dernier était venu la voir dernièrement à la Lune Bleue pour lui confier des éléments inquiétants concernant l'Ulfric. Mary voit Roxane fermer les yeux après avoir rejeté la tête en arrière. Oui, elle doit l'ennuyer avec ses inquiétudes alors que la renarde a eu une rude soirée. Elle semble pourtant se détendre. Mary en profite pour lui adresser un sourire complice. Elle hocha la tête à sa question.

Evidemment que ça ne me gêne pas ! Tu peux dormir ici, je vais te préparer ton lit.

Elle monta à l'étage et sortit les couvertures, bordant le lit pour la jeune femme. Puis, elle redescendit et s'installa avec Roxane dans le canapé.

Qu'est-ce que tu veux manger ? On se commande des pizzas si ça te fait plaisir!

« Il peut me détruire, et je le sais. Je prendrai toutes les précautions nécessaires. Je serai patiente. »

Ce n’est pas un mensonge. La métamorphe ne dit pas à la louve ce qu’elle veut entendre, elle ne lui dit que la vérité. Elle est consciente du danger, et elle en tiendra compte. Mais rien ne se mettra entre sa vengeance et elle. Pas même Mary et ses inquiétudes. C’est aussi pour ça que la Lupa l’apprécie, pour son courage, et sa haine des vampires, et de ceux qui leur sont fidèles.

« Nous nous étions promis qu’ils paieraient. J’ai enfin une piste, je ne la laisserai pas filer. »

La rouquine garde les yeux fermés, laissant la fatigue, après coup du stress, l’envahir. Elle est terriblement fatiguée, et les douleurs de sa soirée se font sentir tandis qu’elle se détend et laisse son corps peser sur le canapé. Mary est d’accord pour qu’elle reste dormir. Tant mieux. La chambre de Roxane n’est pas loin, mais elle n’a pas la force de s’y trainer. Et elle préfère rester près de Mary. Elle a su la calmer, comme elle sait toujours le faire. La rassurer.

Elle écoute les bruits de pas de la Lupa qui monte préparer un lit. Elle se concentre dessus. Elle ne pense plus. Rien que ces pas qui s’éloignent, qui montent les marches. Les bruits des draps qu’elle secoue… Le tissu du costume contre mon bras. Les pas de Phillip. « Sarah »… La voix masculine, maîtrisée. Tu as compris que je jouais, n’est-ce pas ? Que je ne suis pas qui je prétends être. Et toi, qui es-tu ?... Le mouvement du canapé lorsque son amie s’y installe sort la métamorphe de sa rêverie. Elle rouvre les yeux d’un coup, se souvenant d’où elle se trouve.

« Oui des pizzas ce serait bien, avec tout ça j’ai oublié de manger. Je … »

Le reste de ses paroles est brouillé par un bâillement qu’elle tente d’étouffer sans succès. Elle reprend après quelques secondes à se décrocher la mâchoire.

« Pardon. Je prendrai une quatre fromages, comme d’habitude. »

Roxane tourne la tête vers Mary qui est installée non loin. Elle la regarde dans les yeux. Elle lit la tendresse et l’inquiétude que nourrit la Lupa à son égard. Elle est sa famille. Si elle ne fait pas partie intégrante de la meute, elle partage au moins ça avec les loups. Leur affection et leur fidélité envers la Lupa. Mary est là pour elle, et Roxane fera ce qu’elle peut pour être là pour Mary. Elle ne prendra pas de risque inconsidéré, Mary souffrirait trop de la perdre, et Roxane le sait. Elle n’est plus la renarde solitaire qui n’a rien à perdre qu’elle fut. Maintenant elle a Mary.

« Merci »

La métamorphe se penche légèrement pour s’appuyer contre Mary, se blottir dans ses bras, laissant la douceur de son contact la réconforter en attendant que leur repas arrive. Ce ne sera pas long.

Je ne veux pas qu'il t'arrive malheur, Roxane. Je ne le supporterai pas.

Mais Mary connait sa petite renarde. Elle sait qu'elle aura beau la prévenir, Roxane n'en fera qu'à sa tête. Elle ne peut pas la changer et elle l'aime comme elle est. En un sens, elles se ressemblent énormément. Mary doit bien admettre que si elle avait une vengeance à mener, jamais elle ne laisserait quelqu'un se placer en travers de sa route, pas même des gens qu'elle aime. Mary hoche la tête à la remarque de Roxane.

Très bien. Suis cette piste. Mais si tu sens que tu n'es pas de taille seule, je serai là pour t'aider et tu le sais. Nous sommes une meute, une famille.

Oui, Roxane était peut-être une métamorphe, une renarde et non une louve, elle avait une place dans la meute. Tous n'étaient pas de cet avis mais la Lupa s'en moquait éperdument. Tant qu'elle serait à la tête de la Meute, Roxane aurait toujours sa place parmi eux. La pauvre petite avait l'air épuisé et lorsqu'elle demanda si elle pouvait rester dormir, Mary ne tarda pas à lui répondre. Bien sûr qu'elle peut rester. Mary lui adresse un sourire doux avant de monter préparer sa chambre.

Elle secoue les draps pendant que ses pensées défilent à toute allure. Si Torben était là, pour quelle raison ? Que faisait-il ? Elle l'avait revu peu de temps auparavant et cette rencontre l'avait particulièrement troublée. Il lui avait annoncé que l'Ulfric complotait contre elle et elle ne savait toujours pas si elle devait le croire ou pas. Bah, il serait toujours temps de tirer cette affaire au clair plus tard. Pour l'instant, elle devait se concentrer sur Roxane. Elle redescendit et s'installa à nouveau dans le canapé à côté de la renarde qui semblait à moitié assoupie.

Je me disais bien que des pizzas te plairaient.

Mais les paroles de Roxane furent coupées par un bâillement irrépressible. Elle était vraiment crevée et ne devrait pas tarder à aller dormir.

Une quatre fromages, ok. Repose-toi, ma chérie.

Le regard de la louve est restée fixée sur sa petite puce. Oui, elle est comme une fille pour elle. Elle ne la laissera jamais tomber, quoi qu'il puisse se passer. Mary est connue pour sa cruauté mais elle est tout à fait capable d'aimer, d'éprouver de la tendresse pour quelqu'un, la preuve. Roxane est peut-être la seule à la connaître vraiment, ou tout du moins à connaître cette facette d'elle-même. Et elle est ravie qu'elle soit là, bien vivante. Elle sourit au remerciement de Roxane.

C'est normal, ma puce.

La renarde se blottit alors dans ses bras et Mary les referme sur elle, la serrant doucement contre elle. Quelques minutes de quiétude avant que le livreur ne sonne. Mary va chercher les pizzas avant de les installer devant Roxane.

A l'attaque!

Roxane sait que cela coûte à Mary d’accepter le fait qu’elle ne lâchera pas la piste qu’elle a flairé. Mais elle sait aussi qu’elle la comprend, et que même si elle s’inquiète pour elle, elle doit la laisser assouvir sa vengeance. La métamorphe n’aura jamais l’esprit tranquille tant que ce ne sera pas fait. Elle est soulagée par les mots de la louve. Elle sait que pour certains elle fait partie de la meute, mais elle est encore loin de faire l’unanimité. Entendre de la bouche de la Lupa qu’elle fait partie de leur famille lui réchauffe toujours le cœur.

La fatigue la prend et elle perd conscience quelques instants avant d’être réveillée par Mary qui s’était éclipsée pour lui préparer un lit. Elle répond avec enthousiasme tandis que son estomac approuve ses dires. Elle a faim. Mais elle est également épuisée, et de longs bâillements viennent couper ses mots.

Elle profite de la petite attente nécessaire à la livraison des pizzas pour se blottir contre son amie. Les bras chauds et accueillants de la louve lui apportent la quiétude et la chaleur humaine dont elle avait besoin. Elle l’a connue trop tard. Elle était déjà adulte, et le mal était fait. Elle avait grandi seule, et perdue. Elle aurait aimé l’avoir pour mère. La sonnerie de la porte retentit, et la métamorphe pousse un léger soupir avant de se redresser pour laisser la louve se lever et aller ouvrir la porte. Elle se frotte les yeux et secoue la tête, chassant l’engourdissement et la fatigue qui la gagnent de plus en plus. Son ventre, lui ne dort pas, et il le fait savoir en grondant.

Elle prend une part dès que la boîte est posée devant elle, et l’engloutit sans même prendre le temps de la savourer.

« Ca fait sacrément du bien de manger. Merci d’y avoir pensé. »

Le fait de manger la revigore un peu, et quelques détails lui reviennent en mémoire. Des mots de Mary, qu’elle vient seulement de comprendre.

« Qui est cet homme de main que tu as évoqué tout à l’heure ? L’homme de main de la Reine. Tu parlais de Krystel ? Tu as dit que c’était peut-être lui que j’avais vu ce soir. Pourquoi ? Si c’est vraiment lui, alors je dois en savoir un maximum sur lui. »

La métamorphe reprend une bouchée de pizza, avant de continuer.

« Plus j’en sais sur mes adversaires, moins je serai surprise, et moins je risque de les sous-estimer, ou de faire une erreur de jugement qui pourrait me coûter cher. »

Elle sait qu’elle ne devrait pas jouer sur l’inquiétude de Mary pour l’inciter à parler. Mais elle a toujours été guidée par sa curiosité, et la Lupa vient d’éveiller la sienne. Et puisqu’elle a encore plus d’une moitié de pizza à avaler, autant en profiter pendant qu’elle a un regain d’énergie.

Mary connaît bien Roxane. Elle sait que la renarde est têtue et que lorsqu’elle a une idée en tête, rien ni personne ne saurait lui faire changer d’avis. La Lupa en fait son parti même si elle aimerait que son amie l’écoute. Elle souhaite seulement la protéger mais on ne peut protéger les gens contre eux-mêmes. Elle ne pourrait jamais empêcher Roxane d’aller chercher les ennuis. Elle ne pouvait que la faire surveiller et prier pour qu’il ne lui arrive rien. Elle n’osait imaginer ce qui se passerait si Roxane était tuée. Non, rien que d’y penser, les larmes lui montaient aux yeux.

La pauvre renarde semble au bord de l’épuisement, ses yeux fatigués se plissant pour faire la mise au point et sa bouche s’évasant en un bâillement incontrôlable. La changeuse faisait vraiment peine à voir. Mary entendait son estomac crier famine et elle eut la bonne idée de commander des pizzas. Non pas qu’elle ne sache pas cuisiner mais le livreur arriverait plus rapidement.

Durant le temps que met le livreur à arriver, Roxane se niche dans ses bras et Mary la serre fort, nichant son visage dans ses cheveux et s’enivrant de son odeur fauve. Oui, c’est sa petite et jamais elle ne laissera quiconque lui faire du mal, pas même un des siens. Mary n’a jamais eu la chance de connaître la maternité mais son lien avec la renarde est ce qui s’en rapproche le plus. Paradoxal pour un être aussi cruel et sanglant que la louve. Mais Roxane savait toujours désamorcer la colère qui se nichait à l’intérieur de la Lupa et révéler le meilleur d’elle-même. Soudain, la sonnerie retentit et Mary rompit ce moment de quiétude pour aller chercher les pizzas. Une odeur de viande chaude se répandit dans la maison.

A peine a-t-elle posée les boîtes en carton devant la renarde que cette dernière s’empare d’une part de pizza et l’engloutit sans demander son reste. Mary, quant à elle, prend également une part et la mange plus lentement.

J’avoue que je commençais à avoir faim, moi aussi. Je t’en prie, Roxane, c’est normal. Si je ne m’occupe pas de toi, qui le fera ?

Mary mangeait une autre part de pizza quand Roxane rompit le silence qui s’était installée entre elle. Mary déglutit difficilement lorsqu’elle entendit les mots de la jeune femme. Elle resta évasive.

On l’appelle la Mort et il exécute la volonté de la Reine, en effet. Krystel. Je ne sais pas, ce que tu en décris me le rappelle un peu. Mais ce n’était peut-être pas lui. Il y a beaucoup d’hommes cruels et dangereux qui courent les rues.

Elle ne comptait certainement pas lui livrer des informations sur Torben. D’autant que ce dernier lui avait rendu visite il y a peu, l’informant de traîtres parmi la Meute, rien de moins que l’Ulfric en personne. Alors, évidemment, Mary n’était pas fière d’avoir laissé repartir cet ennemi de la Meute. Un sourire joua sur les lèvres de la Lupa. Roxane était loin d’être idiote, même si elle pouvait parfois être tête brûlée. Elle jouait sur son angoisse pour obtenir ce qu’elle désirait. Mary lui ébouriffa les cheveux avant de répondre :

Ne me prends pas pour plus bête que je ne suis, jeune fille. Tu en sais déjà bien trop. Alors, vu que tu as englouti cette pizza à toute allure, je te suggère de monter te coucher et nous reparlerons de tout cela demain matin. Allez, file et bonne nuit, trésor.

Mary déposa un baiser sur la joue de la renarde avant de se lever et de monter elle-même se coucher.

[hj : on clôt du coup ?]

La louve est la mère qu’elle n’a pas eu assez longtemps. Peut-être la seule personne qui se soucie vraiment d’elle. Roxane en a conscience, et la reconnaissance qu’elle ressent envers la Lupa est forte.

« Si je ne m’occupe pas de toi, qui le fera ? »

Bonne question. Si Roxane était prête à donner tout pour sauver sa peau, et à beaucoup pour celle des autres, peu étaient prêts à faire de même pour elle, et elle le savait. Mais c’était mieux ainsi. La métamorphe avait du mal à faire confiance. Mary avait gagné cette confiance qu’elle lui accordait, mais c’était peut-être la seule. Elle n’aurait confié sa vie à personne d’autre qu’elle, et pourtant elle continuait à lui tenir tête, à défendre sa volonté, ses désirs de vengeance, faisant fi des conseils de prudence de la louve, qui n’était pourtant pas la moins téméraire des deux.

« Moi. Comme toujours. Mais pour l’instant la question ne se pose pas, tu ne comptes pas m'abandonner ? »

Un petit regard en coin en direction de la louve qui a elle aussi attaqué la pizza. Elle ne supportait pas que la métamorphe fasse une allusion au fait qu’elle pourrait l’abandonner, et la pique fit encore une fois mouche, ce qui amusa un peu la rouquine, la détendant après toutes ces émotions.

La conversation redevient sérieuse lorsqu’elle tente d’obtenir quelques informations. Elle n’oublie pas l’homme qu’elle a rencontré ce soir, et si Mary sait quelque chose, Roxane le saura un jour ou l’autre. D’ailleurs la louve lui donne quelques détails. Si la Lupa a vu juste (et Roxane la connait mieux que quiconque, son instinct ne la trompe que rarement) alors l’homme qu’elle a vu est à la botte de la Reine. Elle ne doit pas lâcher l’affaire et elle ne la lâchera pas. Elle aura sa peau, par un moyen ou un autre.

Mais la Lupa connaît la métamorphe aussi bien que Roxane connaît Mary. Et elle ne se laisse pas avoir par ses stratagèmes pour obtenir des informations. Elle l’envoie balader gentiment en lui ébouriffant les cheveux. Avec affection elle lui conseille d’aller dormir, et ne tarde pas à y aller elle-même, déposant un dernier baiser sur la joue de Roxane avant de monter. La renarde reste quelques minutes le regard perdu dans le vague, les bras enroulés autour de ses jambes repliées, pensive, avant de faire de même et d’aller se blottir dans les draps amoureusement préparés par Mary.