J’étais fatigué… Las de n’avoir rien fait ! Car oui, je n’avais rien fait de ma journée. La galerie était exceptionnellement fermée et je n’avais pris aucun rendez-vous. Quand j’avais décidé de m’octroyer une journée de repos je ne pensais pas qu’elle serait aussi mortellement ennuyeuse ! Mais qu’aurais-je pu faire ? Me balader pour faire des photos plaisir ? J’aurais pu mais je n’avais pas eu la motivation… J’avais pensé à appeler Charlie mais je n’avais pas voulu la déranger, surtout qu’elle devait bosser elle ! Bref, je m’étais retrouvé comme un con à déambuler dans mon appartement vêtu d’un simple pantalon de survêt… Après, n’exagérons pas ! J’avais bien occupé ma matinée. Je n’avais peut-être pas bossé à la galerie mais j’avais fait du classement pour tout ce qui concernait les paperasses administratives et je pouvais dire que j’étais assez content de moi. A vrai dire ce n’était que lorsque l’après-midi avait pointé le bout de son nez que j’avais commencé à m’ennuyer.
J’avais grignoté vite fait le midi car j’avais promis à ma meilleure amie de reprendre du poids. J’avais également fait un peu d’exercice pour garder la forme et après ? Après rien ! Je m’étais posé dans mon canapé pour regarder des feuilletons débiles. J’avais d’ailleurs du sombrer à un moment car j’avais loupé la fin de l’un d’eux et raté le début du suivant.

Poussant soupir sur soupir j’avais ensuite zappé pour tombé sur l’histoire des glaces et crèmes glacées. Miam ! Cette émission m’avait donné faim mais malheureusement pour moi je n’avais pas de desserts glacés dans mon congélateur qui ne manquait pourtant pas de nourriture. Voilà pourquoi j’avais filé sous la douche ! J’avais décidé de sortir uniquement parce que je voulais manger de la glace. Comme je n’en avais pas pour longtemps j’enfilais un jean brut et un t-shirt gris avant de passer rapidement ma main dans mes cheveux pour un effet coiffé décoiffé. Je ne prenais pas mon téléphone mais uniquement mon portefeuille et filais dehors après avoir enfilé mes converses. En passant devant le miroir de l’entrée j’eus un léger sourire en me remémorant les paroles de ma mère. Elle prétendait que j’avais un look d’ado et elle n’avait pas vraiment tort.
Une fois dehors il ne me fallut que quelques minutes pour attendre le glacier au bout de la rue ce qui ne m’avait pas vraiment laissé le temps de réfléchir à ce que j’allais prendre. Voilà pourquoi je passais plusieurs longues minutes à l’intérieur de la boutique Häagen-Dazs. Ne pouvant me décider, j’optais pour plusieurs parfums et repartais en direction de mon appartement de meilleure humeur ; l’air frais m’avait fait du bien. Arrivé à quelques mètres de mon immeuble s’aperçus une silhouette que je connaissais et je prenais sa direction en souriant. Je ne savais pas si elle m’avait vue…


- Salut Ania !


J’arrivais à sa hauteur et la saluais. Il était rare pour nous de nous croiser en dehors de vernissages et autres expositions. Si ma mémoire ne me jouait pas de tour j’aurais même dit qu’il s’agissait de la première fois. Et qui plus est il y avait un moment que je ne l’avais pas vu puisque mes sorties s’étaient faites beaucoup plus rares.


- Comment vas-tu ? Ça faisait un moment qu’on ne s’était pas croiser, déclarais-je en souriant. Tu te balade ?


J’avais beau être quelqu’un d’assez solitaire je pouvais être chaleureux et bavard avec les personnes que je connaissais. Surtout quand ces dernières avaient la même passion que moi.

J’avais retrouvé la forme après m’être motivé à me bouger ! Cela me fit sourire… Si certaines personnes pouvaient passer des journées entières à ne rien faire je n’étais pas de celles là. Au contraire, même lorsque je ne travaillais pas il fallait que je bouge, que je m’occupe sinon je déprimais et je devais bougon. En bref, je perdais carrément une journée ! C’est d’ailleurs ce qui commençait à arriver avant que je ne tombe sur ce reportage qui retraçait l’histoire des crèmes glacées. Ce dernier avait été tellement bien réalisé que je n’avais pu résister à l’envie d’un dessert glacé et donc de sortir.
Prendre l’air m’avait fait du bien, retrouvé le sourire et comme le hasard faisait bien les choses aujourd’hui, je croisais même une personne que je n’avais pas vu depuis un moment. Ania, une photographe avec qui j’adorais échanger nos avis durant les vernissages et autres expositions où nous nous croisions. Voilà pourquoi je n’hésitais pas à l’interpeller avant de la rejoindre. Son sourire me prouva que je n’avais pas du la déranger, du moins si je ne me trompais pas. Alors que j’appuyais son bonjour d’un signe de la main chaleureux et amical je remarquais qu’un léger blanc s’installait avant que la jeune femme ne reprenne la parole…

Peut-être essayait-elle de se rappeler à quand remontait notre dernière rencontre puisqu’elle confirma que cela faisait longtemps. Je n’étais même pas sûre qu’elle soit au courant de l’ouverture de ma galerie ! Enfin si, puisque j’avais invité tous mes contacts à l’ouverture. Cependant je ne me souvenais pas avoir vu Ania lors de cette dernière. Mais il y avait eu tellement de monde ! Mais qu’importe… Je ne devais plus vivre dans le passé et me le ressasser pour des broutilles car cela me faisait perdre le présent.
Je souris à Ania lorsqu’elle indiqua son appareil photo ! Je comprenais parfaitement ce qu’elle venait de dire sans même qu’elle n’ait eu besoin de terminer sa phrase. Moi-même je ne me séparais absolument jamais de mon appareil et seule ma brève sortie d’aujourd’hui faisait exception à la règle. Il en faut bien une !


- Habituellement je suis comme ça aussi… J’ai toujours un des mes deux appareils sur moi ! On ne sait jamais… après tout les plus belles photos sont le fruit du hasard, dis-je avant que Ania ne me demande ce que je faisais ici.


Avec un sourire je lui indiquais le sac rempli de quelques délicieuses crèmes glacées qu’il me tardait de goûter… mais pas assez pour couper court à la discussion.


- J’ai eu besoin urgent de bouger m’acheter ceci après avoir vu un reportage très intéressant que l’histoire de la crème glacée, expliquais-je amusé.


Je haussais ensuite les épaules lorsqu’elle déclara qu’elle ne voulait pas mettre mes glaces en danger en me retardant. Avec un sourire je lui indiquais le hall d’entrée de l’immeuble au pied duquel nous étions.


- Ne t’inquiète pas ! Aucun risque qu’elles ne fondent avant que je monte. J’habite ici, précisais-je alors que c’était clair. Je marquais une pause hésitante. Ça serait sympa que tu me montre tes clichés… Tu pourrais monter boire un verre. Enfin, si t’as rien de prévu et si t’en as envie bien évidemment.


Non, non. Je n’étais vraiment pas doué pour ce genre de truc. Et n’entendez pas là que je la draguais ! J’étais juste empoté avec le reste du monde à force de passer trop de temps en solitaire avec mon appareil photo ou mon carnet de dessins.
Je lui offrais ensuite un léger sourire qui en disant long sur mon manque de pratique concernant ce genre de invitations improvisées.

Je n’hésitais pas et expliquais en toute franchise ce qui m’avait poussé à sortir acheter des glaces… J’aurais très bien pu me contenter de ce que j’avais chez moi mais il fallait reconnaître que j’avais perdu l’appétit depuis quelques mois. Il était donc rare que j’ai envie de quoique ce soit concernant la nourriture. C’est aussi cette exception qui m’avait fait sortir de chez moi et au final le résultat n’en était que mieux puisque cela m’avait permit de croiser une amie. Je souris en voyant la réaction d’Ania face à mes explications mais ses paroles me firent carrément rire.
Elle n’avait pas tort ; bien que je n’avais pas à me plaindre niveau nouvelles technologies et voiture. J’étais assez à la pointe de ce coté là même si je n’étais pas un acheteur compulsif. Enfin, elle le verrait bien par elle-même si elle montait boire un verre.


- Oui, heureusement ! Mais la nourriture et moi c’est toute une histoire, déclarais-je malgré le poids que j’avais perdu depuis décembre. Et puis je suis certain que tu aurais céder à la tentation si tu avais vu l’émission. Il était humainement impossible de résister.


Ania eu ensuite une légère absence alors que je lui indiquais l’entrée de mon immeuble. Cela me semblait logique mais à vrai dire je n’étais finalement pas certain que la jeune femme sache où j’habite. Ok je lui avais envoyé une invitation pour l’inauguration de ma galerie mais cela ne voulait pas dire que je vivais au même endroit. D’ailleurs mon appartement et ma galerie n’étaient absolument pas dans le même quartier. Mais ça, Ania ne pouvait pas le savoir ! Sauf si elle était venue pour l’ouverture mais je ne me souvenais pas l’avoir vu…
Enfin bref, alors que nous discutions je trouvais le fait de rester en bas de chez moi un peu bête et j’invitais la jeune femme à monter boire un verre. Immédiatement en voyant son expression je me demandais si je n’avais pas dit une connerie… Les yeux écarquillés et la bouche en O de surprise ne me disait rien de bon ! Heureusement son comportement suivant me rassura et me fit sourire avec une pointe de gêne… Je n’étais pas doué pour les invitations. Invitation amicale dans le cas présent ! Alors imaginez pour le reste. Ce fut à ce moment que je fus pris dans le piège que je tendais parfois lorsque j’étais armé de mon appareil photos. « Oh non ! J’avais avoir l’air débile à coup sûr ! » Mais je n’en rajoutais pas plus car Ania me parlait des clichés qu’elle avait fait.


- Je ne me moque jamais, répondis-je solennellement mais avec un sourire. Et puis les photos faites au hasard sont parfois de vraies merveilles. Cela m’est arrivé un nombre incalculable de fois de préférer des photos coup de tête à des réfléchies, expliquais-je ensuite. Je souris ensuite en l’entendant accepter ma proposition. Il y a des taxis H24 ici… Et oui, j’ai du vin. J’ai également de quoi manger, dont de la glace, déclarais-je amusé. Je te laisse passer devant, l’ascenseur est en face de l’entrée.


J’en profitais pour récupérer rapidement mon courrier avant de monter dans ascenseur et d’appuyer sur le bouton du dernier étage. Il ne nous fallu que très peu de temps pour arriver. J’ouvrais la porte, allumais la lumière et laissais entrer la jeune femme. Galanterie oblige ! Une fois à l’intérieur je lui indiquais le placard sur la droite…


- Tu peux mettre ta veste là, si tu veux.

Comme tout bon photographe qui se respecte je préférais être derrière l’objectif et non pas devant. N’allez pas croire que je ne m’aimais pas ou un truc dans le genre mais je n’appréciais pas être pris en photo. Était-ce parce que je l’avais trop été en étant enfant ? Peut-être ! Après tout j’étais le premier enfant à avoir agrandi la famille et les parents s’extasient et immortalisent la moindre petite chose que leur premier fait. Cette réflexion me fit de nouveau sourire légèrement alors qu’Ania me maintenait que le cliché serait magnifique et qu’elle était persuadée que j’étais photogénique.
Ses paroles m’amusèrent car je disais exactement la même chose aux personnes que je voulais prendre en photo et qui se montraient réticentes. Enfin, je ne surenchérissais pas à ce sujet et abordais celui des photos qu’elle avait pu faire. De nouveau, on se trouvait des points communs ! Mais c’est assez facile quand on a la même passion qui coule dans nos veines. Visiblement, elle comme moi tombions sous le charmes de nos photos coups de cœur plutôt que les réfléchies.


- La beauté éphémère d’un instant est plus merveilleuse que la perfection, déclarais-je simplement. Pour ma part je ne suis pas fan des photographies architecturales mais je suis obligé d’en faire puisque je travaille souvent pour l’Office du Tourisme.


Bien entendu je préférais les clichés de paysages et d’instants éphémères mais même lorsque sa passion était son métier on ne faisait pas ce qu’on voulait.
Avec un sourire je laissais passer la jeune femme devant tandis qu’elle m’avouait qu’elle ne refuserait pas un verre de vin et de quoi grignoter. Ses désirs seraient assouvis car j’avais tout ce qu’il fallait chez moi. Je ne manquais jamais d’accueillir mes amis, voilà pourquoi mes placards et frigo regorgeaient toujours de boissons, en-cas et autres délices. Puis je devais aussi reconnaître que j’étais assez gourmand dans mon genre même si cela ne se voyait pas. Une chance d’ailleurs !


- Y’a tout ce qu’il faut ! Je suis beaucoup trop gourmand pour que mes placards et mon frigo soient vides.


Arrivés dans mon appartement, j’indiquais le placard à Ania où cette dernière accrocha sa veste. Je fis de même alors qu’elle commençait déjà la visite ! Je souris en la voyant faire car cela me plaisait… Je préférais les invités indépendants à ceux qui, trop timides, restaient dans un coin sans bouger. Je passais donc près d’Ania tandis qu’elle contemplait les photos et j’en profitais pour aller ranger les glaces. Je relevais la tête uniquement lorsqu’elle me demanda si ces superbes clichés étaient de moi et si c’était ma petite amie… Effectivement, je n’avais visiblement pas enlevé toute les images d’Elecktra.


- Merci pour le compliment, commençais par répondre. Et ne sois pas désolée, tu peux faire comme chez toi ! Je marquais une pause et observais la photo de mon ex avant de confirmere. Oui, elle l’était avant de partir.


Je prenais ensuite une bouteille de vin et sortais deux verres avant de regarder ce que j’avais dans mes placards et frigo. Ne connaissant pas les goûts d’Ania je garnissais un plateau apéro de plusieurs en-cas salés mais aussi des sucrés.
Je prenais la bouteille et les deux verres d’une main et le plateau dans l’autre avant de rejoindre mon invitée. Je déposais tout sur la table basse et me postais à coté de la jeune femme pour admirer la vue.


- Merci, c’est vrai que j’ai plutôt bien investi dans cet appartement… Pour rien au monde je ne l’échangerais, avouais-je avec un sourire. J’indiquais ensuite la bouteille… Tu aime le vin français j’espère ? Pour le reste y’a du salé et du sucré comme je ne connais pas tes goûts.

En entendant les paroles d’Ania j’aurais presque pu être jaloux… J’aurais adoré travailler pour le National Géographic mais l’Office du Tourisme avait été plus prompt à me répondre et j’avais donc accepté leur offre. Je souris à la jeune femme alors que nous allions dans mon appartement.


- Pour le National Géographic ! répétais-je. C’est vraiment cool ! C’est vrai que les photos animalières sont super sympa à faire… C’est un peu mes débuts au Canada d’ailleurs, me rappelais-je.


Une fois dans mon appartement je laissais la jeune femme visiter à son aise. Après tout je n’avais rien à cacher et si cela avait été le cas je ne l’aurais tout simplement pas invitée. Mon seul véritable secret concernait une personne qui n’était maintenant plus là. D’ailleurs je dus repenser à Elecktra et en parler puisque Ania venait de me demander si la rouquine sur la photo était ma petite amie. Je lui répondais simplement la vérité tandis que je notais dans un coin de mon cerveau qu’il faudrait que j’enlève cette photographie ainsi que les deux autres qui se trouvaient respectivement dans ma chambre ainsi que dans le bureau de ma galerie.
Je haussais les épaules en souriant à la jeune femme qui s’excusait de s’être montrée indiscrète. De mon point de vu elle ne l’avait pas été et n’avait fait que se montrer curieuse. Et ne dit-on pas que la curiosité est un joli défaut.


- Y’a pas de mal… C’est la vie ! Cela veut sûrement dire que ce n’était pas la bonne, déclarais-je en cherchant à me convaincre moi-même.


Car même si je le cachais, ma sirène me manquait et je ne comprenais toujours pas pourquoi elle avait agi ainsi. Mais le moment était mal venu pour penser à cette rupture et je m’affairais à préparer un joli plateau apéro improvisé avant de rejoindre Ania près de la baie vitrée.
Je ne me lassais pas de la vue, ni même de mon appartement ! Je ne regrettais pas avoir investit dans ce logement que j’avais réussi à transformer en vrai nid douillet. Observant Ania, j’acquiesçais d’un signe de tête pour répondre à sa question alors qu’elle prenait la direction du canapé.


- Oui, il est à moi ! Et oui, je me suis occupé moi-même de la décoration. Obligé puisque j’ai du transformé l’une des chambre à coucher en chambre noire, expliquais-je en souriant. Ce qui est super pratique pour développer les photos à n’importe quelle heure de jour et de la nuit !


Car oui, je n’avais pas de chambre noire dans la galerie et cela était un choix murement réfléchi.
Laissant le canapé pour Ania je m’installais dans le fauteuil alors qu’elle me disait que je n’aurais pas du me donner tant de mal. Je me contentais de sourire ! Pour moi ce que j’avais amené à grignoter était plus que simpliste mais si cela lui plaisait c’était le principal.
Je servais ensuite deux verres de vin tandis que la jeune femme s’excusais de le pas être venue à l’ouverture de ma galerie. Elle voulait également en apprendre plus au sujet de cette dernière. Je lui tendais son verre de vin et levais le mien…


- Pour commencer, trinquons à cette petite soirée inattendue, commençais-je à dire. Après avoir bu une gorgée je reposais mon verre et répondais à Ania. L’ouverture de la galerie s’est très bien passée et je n’aurais jamais pensé qu’autant de monde serait présent. Je n’ai pu que saluer très brièvement certains de mes amis passés en coup de vent, avouais-je. T’es donc toute excusée, c’est à peine si on aurait pu se parler… Pis tu peux passer quand tu veux, tu es la bienvenue ! Je marquais une pause. Après y’a pas grand-chose à dire à part que ça fonctionne plutôt bien… assez pour que j’envisage d’embaucher une personne comme gérant, racontais-je. D’ailleurs si tu connais quelqu’un aimant l’art et cherchant du travail… Fais-moi signe ! Mais toi, tu étais partie ? Pour le boulot ? Enfin, si ce n’est pas indiscret de demander, rajoutais-je en piquant un feuilleté au jambon de Parme.

Je souris à Ania en la voyant arquer un sourcil suite à mes propos. Car oui, je n’avais pas toujours été un photographe sédentaire et quand cela n’était qu’une passion je bougeais beaucoup. Avec l’autorisation de mes parents bien entendu ! Il faut dire qu’à l’époque j’étais mineur. Je souris donc à la jeune femme et lui répondais…


- Il faut dire qu’au Canada il n’y a pas trop de difficultés à faire ce genre de photos… Il y a tellement de réserves et de lieux restés à l’état sauvage qu’on croise aisément des animaux. C’est comme ça que la passion de la photographie m’est venue et j’ai toujours aimé bouger jusqu’à ce que je veuille une galerie ! Je marquais une légère pause. Mais c’est vrai que ça me manque…


Oui ! Partir pour des contrées inconnues durant des semaines, voir plus, avec le minimum d’affaires me manquait. Cela n’avait jamais été le cas après mon installation en Écosse mais depuis le départ d’Elecktra je ressentais parfois un manque. Cela venait sûrement du fait que toutes mes journées se ressemblaient et qu’elles étaient souvent assez tristounettes. Boulot, boulot, un diner devant un film et au dodo ! Un retraité n’aurait pas eu de journées plus monotones. Mais j’en revenais à la discussion et je souriais à Ania lorsqu’elle déclara qu’avoir une chambre noire à domicile était un plus.
C’était en effet un avantage non négligeable surtout quand on savait qu’il m’arrivait parfois de développer mes clichés en pleine nuit. Je me voyais mal retourner au centre ville pour le faire… surtout en pleine nuit ! Je n’étais pas kamikaze.


- Le côté le plus pratique pour moi c’est que l’avoir à domicile peut me permettre de bosser en pleine nuit si je le veux. Et il m’arrive de me relever lorsqu’une idée me vient soudainement pour un montage ou autre projet, avouais-je. Mais je ne suis pas fou ! précisais-je avec un sourire amusé.


Je parlais ensuite rapidement de l’ouverture de ma galerie en ayant l’impression que cela datait d’un siècle alors qu’il n’y avait que quelques mois que l’événement avait eu lieu. Je souris après avoir trinqué et hochais la tête aux paroles d’Ania.


- Pour le moment je suis très souvent à la galerie mais oui, préviens avant. Je ne voudrais pas que tu passe pour rien.


Au fil de la conversation j’en venais à parler du fait que je cherchais quelqu’un pour ma galerie… sous-entendant par là que j’avais envie de bouger. Avant d’avoir ouvert cette dernière le temps que je ne passais pas aux mariages, baptêmes et autres événement je le consacrais à faire des excursions photo plaisir. Maintenant c’était impossible ! Voilà pourquoi je fus ravi d’entendre Ania me dire qu’elle se renseignerait pour moi… Le bouche à oreille aidait beaucoup et j’espérais que cela serait pareil dans mon cas.
Ania répondit ensuite à mes questions et je l’enviais quelques peu. J’en venais même à me demander si elle partait en solitaire ou en groupe comme si j’aurais aimé faire parti d’un de ces voyages.


- Effectivement, tu m’as l’air d’être une sacrée baroudeuse, reconnus-je. J’hésitais quelques secondes, prenant le temps de boire une gorgée et je l’interrogeais. Et quand tu pars comme ça c’est en solitaire ou ce sont des expéditions à plusieurs ?


Moi ? Intéressé ? Non, juste curieux… ou peut-être que… Oui ! Peut-être que j’aurais aimé bouger au moins une fois. Après est-ce que ce désir venait du fait que j’avais du mal à oublier certains souvenirs que j’avais ici ? Je ne le niais pas.

La discussion allait de bon train et nous partagions les débuts de notre passion… Car la photographie, même s’il elle était une passion pour deux personnes, ne devenait pas forcément une vocation de la même façon. Pour certain il s’agissait d’un héritage, pour d’autres elle arrivait en parcourant les œuvres de professionnels et amateurs et parfois, elle se déclarait suite à un cadeau. C’était ce qu’avait vécu Ania et moi aussi. Cela me fit sourire. Le Canada laissé derrière nous en venions à parler de ma galerie qu’elle n’avait pas pu voir. Mais avec des emplois du temps comme ceux qu’Ania semblait avoir il n’y avait rien d’étonnant.
J’acquiesçais d’un signe de tête lorsque la jeune femme me confirma qu’elle me téléphonerait avant de passer. Je venais de l’inviter à visiter ma galerie mais je me rendais compte que je n’étais pas obligé d’être présent non plus. Avec un sourire, je reprenais…


- Après tu n’auras pas besoin que je sois là si j’ai réussi à trouver quelqu’un pour la gérance… J’espère que ce sera assez rapide. La dernière fois ça a été le cas mais mon employée a disparu sans laisser de trace, expliquais-je avec un haussement d’épaule.


Puis je cessais de parler de moi pour m’intéresser à sa vie qui semblait beaucoup plus palpitante que la mienne. Mon pas que la mienne était ennuyeuse mais elle était devenue beaucoup plus sédentaire et il m’arrivait parfois de rêver d’évasion. C’était davantage la cas depuis le départ inexpliqué de celle qui avait ravi mon cœur… Personne que je chassais rapidement de mon esprit pour écouter avec attention Ania.
Au fur et à mesure de ses explications je me rendais compte que j’aurais volontiers tenté l’expérience… mais le moment ne s’y prêtais pas. Cependant cela ne m’empêchait pas d’interroger ma collègue sur sa façon de procédé. Moi ? Est-ce que j’aurais été intéressé pour partir avec elle afin de découvrir sa façon de travailler ? Oui, pourquoi pas. L’apprentissage de toute chose n’a selon moi aucune fin. Je souris face à ses questions et réponses.


- Intéressé, oui ! avouais-je. L’aventure, la découverte… Tout ça me manque en effet. Je m’en suis rendu compte lorsque je suis retourné au Canada pour les fête. J’ai bien fait quelques randonnées mais mon frère avait du mal à suivre… expliquais-je amusé. Et pourtant ce n’est pas lui qui fume ! Je marquais une pause. J’ai du mal à t’imaginer chiante, repris-je en la fixant. Et si ça se fait un jour, dis-toi que je suis patient et absolument pas difficile à vivre… d’après ce que l’on m’a dit !


Je buvais une gorgée de mon vin après avoir grignoter lorsque la demoiselle me demanda les raisons de cette envie d’évasion. Je ne réfléchissais pas à la réponse et ne cherchais pas à dissimuler la vérité. Cela n’aurait servi à rien.
Je souris à sa curiosité qui égalait la mienne.


- Pour faire des photos… et pour me changer les idées. Disons que j’ai ici beaucoup de souvenirs dont il faudrait que je me détache. La photographie m’a toujours aidé et l’évasion en prime n’en serait que plus bénéfique. Je marquais une pause. D’ailleurs, en parlant de photographie je n’oublie pas que tu dois me montrer tes clichés, ajoutais-je avec un clin d’œil.

Hrp:

N’allez pas croire que j’invitais chez moi sur un coup de tête toutes les personnes que je connaissais. Loin de là ! Mais dans ce cas présent c’était différent puisqu’il s’agissait d’Ania. Elle et moi partagions la même passion et même si nous ne nous connaissions pas beaucoup j’avais eu envie de l’inviter. Elle venait de faire des photos et il y avait longtemps que je n’avais pas eu le plaisir de discuter de ma passion avec quelqu’un qui exerçait le même métier que moi. Rien que pour ça ma mentor me manquait et nos rares coups de fil ou messages ne replaçaient pas sa présence. Cependant la vie était ainsi… Elle avait du partir à l’étranger pour son boulot.
Une fois installés chez moi nous avions commencé par parlé de ma galerie et des mes projets. Mais ils paraissaient tellement monotones par rapport à ce qu’Ania faisait que je l’avais interrogé à mon tour en ne cachant nullement mon souhait de faire comme elle. Pourquoi ne pas l’accompagner un de ces quatre ? Il suffisait quelle me donne une date pour que je me libère de tout événements et autres rendez-vous. Cette pensée me fit sourire et me boosta ! J’avais vraiment envie de m’évader… mais dans un endroit que je ne connaissais pas.

Je lui vendais aussi mes qualités sportives histoire qu’elle m’accepte comme compagnon de voyage et je ris légèrement à ces propos concernant mon cadet. J’essayais ensuite de l’imaginer ‘‘chiante’’ mais je ne parvenais pas à le faire… Et de mon point de vue il n’y avait rien de méchant à être autoritaire. Après la rigueur était de mise dans certaines contrées inconnues sinon c’était la mort assurée.
Je souris lorsqu’elle finit par ce décrire comme une personne lunatique et pas vraiment facile à vivre. C’était un peu mon opposé.


- On fera une jolie paire si on voyage ensemble… Je suis plutôt de bonne humeur et ça constamment ! Il faut vraiment faire très fort pour m’énerver, dis-je en réfléchissant. La seule personne qui y est parvenu c’est mon frangin… le jour où il a bousillé tout mon boulot d’une semaine en moins de dix secondes, expliquais-je. J’ai cru que j’avais lui arraché la tête !


Et oui ! J’adorais Zack mais ce jour là je l’avais vraiment détesté ! Bien sûr cela m’avait très vite passé suite à ses nombreuses excuses sincères mais tout de même. Les photos que j’avais perdues figuraient parmi les plus belles que j’avais pu faire et je les regrettais encore… Je n’en avais sauvé qu’une et elle se trouvais sur le mur derrière Ania. D’ailleurs je lui indiquais le cliché* !


- Voici la survivante du massacre de mon frère ! C’était toute une série de photos de cette petite famille d’ursidés. Elle fait parti de mes préférées.


On en revenait ensuite aux motivations qui me poussaient à vouloir partir… Je ne cachais pas à la jeune femme que c’était pour faire de la photographie mais pas seulement. J’avais besoin de m’éloigner de tous les souvenirs que j’avais ici et Ania ne tarda pas à me donner davantage envie de le faire sauf… sauf la fin peut-être ! Enfin, je ne savais pas. J’étais quand même un peu paumé en ce moment même si je ne voulais pas le reconnaitre et la visite chez le psy ne m’avait pas aidée mais juste apportée plus de question.


- A vrai dire je ne veux pas oublier, déclarais-je simplement. Je veux m’éloigner le temps que tout cela s’atténue un peu. Mon séjour au Canada m’a fait du bien alors pourquoi ne pas continuer mais en visitant des endroits que je ne connais pas et que je pourrais aussi faire découvrir aux écossais au travers de ma galerie ? déclarais-je motivé.


Je prenais ensuite l’appareil d’Ania pour admirer son travail… Elle n’aimait pas forcément les photographies d’architecture mais elle se débrouillait très bien. Mais l’une d’elle attira mon attention… Je ne sais pas ce qu’elle avait voulu prendre exactement mais on y voyait en second plan une image très touchante d’une fillette accrochée à son animale de compagnie pendant qu’elle attendait sûrement le bus en compagnie de sa mère.


- Celle-ci est superbe ! dis-je en montrant le cliché** à Ania. C’est le genre de photo que les gens achètent dans ma boutique. Après une légère pause. D’ailleurs si t’es intéressée je peux te la mettre en vente dans ma galerie.


La laissant réfléchir je continuais d’observer les clichés de paysages connus avant d’en voir apparaître d’autres que je ne connaissais pas. Sans m’en rendre compte je fronçais légèrement les sourcils.

cliché*:

cliché**:

Il n’y a pas à dire, une passion commune aide à la conversation et à la bonne entente. Non pas que j’étais quelqu’un de renfermé mais j’aimais la solitude la plupart du temps et je ne parlais pas beaucoup avec les personnes que je ne connaissais pas. Il me fallait du temps ou alors un point commun ! Voilà pourquoi il m’était aussi facile de discuter avec Ania que je ne connaissais pas beaucoup au final. Je venais même de l’inviter chez moi et nous en venions à parler à la photographie survivante accrochée derrière elle !
En la regardant je me souvenais à quel point j’en avais voulu à mon frère… Cela avait été passager, certes, mais je ne lui avais plus adressé la parole durant plusieurs longues journées ce qu’il avait eu du mal à supporter. Nous étions très proches et c’était toujours le cas. Je l’appelais plus souvent lui que mes parents ! Je sortais de mes pensées lorsque Ania me complimenta avant de se rassoir et de reprendre la parole. Je lui souriais, amusé.


- J’ai été tenté, j’avoue ! Mais je n’aie jamais été violent… Je ne le suis toujours pas ! déclarais-je avant qu’elle ne continue.


Elle m’expliqua ce qu’elle avait fait à un certain Andrew et j’écarquillais les yeux. Effectivement, la demoiselle avait le sang chaud ! Jamais je n’aurais osé balancer la console de mon frangin et cela ne me serait pas venu à l’esprit. Je commençais à croire qu’elle pouvait, effectivement, avoir un caractère lunatique… Cependant cela ne chassa pas l’idée qui m’était venue à l’esprit un peu plus tôt.
Je hochais alors la tête.


- Donc tu as fracassé l’ordi de ton… ton coloc’ ? demandais-je en hésitant puisque je ne connaissais ni Andrew, ni Neal. Je vais noter dans un coin de mon cerveau de ne jamais touché à ton travail. Mon appareil photo est trop précieux !


Puis nous en venions à parler de mon envie de partir pour me changer les idées. Ania eut la délicatesse de me dire que les voyages ne permettaient pas d’oublier et cela me motiva davantage. Je ne voulais rien oublié de ce que j’avais vécu avec Elecktra mais simplement faire en sorte que ces souvenirs soient moins présents. Je pourrais, avant de partir, faire un grand ménage et revenir dans un nouvel appartement en quelques sortes.
Je tiquais légèrement lorsqu’elle parla de souvenirs agréables… Ils l’étaient pour la plupart mais les derniers non ! Je ne savais toujours pas réellement pourquoi elle avait fait ce choix et si elle était toujours en vie. Je souris au reste des paroles d’Ania avant de lui répondre.


- Les souvenirs que j’ai sont agréables… tous ! Ce ne sont que les questions auxquelles je n’aurais jamais de réponse qui me gênent. Je marquais une pause. On a parfois besoin de certaines explications mais je sais que je ne les obtiendrais jamais…


A moins de rencontrer quelqu’un comme elle, un ou une métamorphe qui aurait peut-être des réponses. J’avais d’ailleurs pensé à tenter de retrouver cet homme qui c’était transformé en cheval. Au final j’avais laissé tomber. Comment aurais-je pu savoir où il se trouvait ? Je ne connaissais rien de lui et j’avais seulement quelques clichés de lui.
Ce que je voulais oublier c’était les questions. Un voyage à l’étranger m’y aiderait ! Je ne savais pas pourquoi mais j’en étais persuadé. Et puis cela me permettrait d’apporter un peu de rêve dans ma galerie.


- Un peu d’exotisme dans ma galerie pourrait être bénéfique ! Les gens ont besoin de rêver en ce moment, avec tout ce qui se passe.


Je me plongeais ensuite dans l’observation des clichés d’Ania. Ils étaient chouettes mais un en particulier attira mon attention. Il l’attira assez pour que je propose à la photographe de tenter de le vendre dans ma galerie. Je n’avais jamais fait cette proposition même si j’y avais pensé concernant les œuvres de Charlie.
Je fus amusé lorsque la jeune femme me parla des coucous qui lui faisait la petite fille suite à cette photo. J’acquiesçais ensuite d’un signe de tête concernant ma proposition.


- Oui, puisque je te le propose ! D’ailleurs deux ou trois de plus et je pourrais faire une partie à ton nom… Le mieux est d’imprimer ce genre de cliché sur toile. Les clients aiment beaucoup… J’ai tout ce qu’il faut à la galerie pour réalisé de ce genre de développement si ça t’intéresse, expliquais-je.


Puis je continuais à regarder les photos jusqu’à ce que Ania me sorte de mon observation…


- Hein ? Ah non non, je me demandais juste où tu avais pris ces photos ? déclarais-je en me levant pour m’asseoir sur le canapé aussi afin de lui montrer les clichés de paysages inconnus. C’est magnifique !

Je souris en entendant la jeune femme me dire qu’elle ne s’en prendrait jamais à un appareil photo… Sur ce point elle était comme moi ! Mais cela n’était pas rassurant pour autant à bien y réfléchir puisqu’elle avait l’air assez impulsive ! Sur quoi passerait-elle ses nerfs si elle épargnait l’appareil photo ? Sur la personne qui l’ennuyait ? C’était une très bonne question que je ne formulais pas.
J’écoutais plutôt la suite de sa réponse quant à savoir qui étaient Neal et Andrew… De suite je notais qu’elle parlait d’eux au passé et j’affichais une mine plus sérieuse. Je ne savais pas si j’avais bien compris ! Après tout peut-être que Neal n’était plus journaliste et qu’Andrew n’était plus son fiancé ! Mouais, ça paraissait un peu gros. Cependant je n’aimais pas être incertain et risquer de faire des gaffes.


- Tant mieux pour les appareils-photos du monde entier, commençais-je par dire pour chercher quoi dire ensuite. Et je suis désolé… enfin, je suis trop curieux !


Je n’avais pas besoin d’en rajouter plus car cela n’aurait servi à rien et je n’avais pas envie qu’Ania ressasse des souvenirs douloureux par ma faute. J’en revenais donc à moi et mes envies de voyages qui n’étaient pas sans arrières pensées. Je voulais m’éloigner de ce que j’avais vécu avec Elecktra pour calmer la douleur que me provoquaient toutes ces questions sans réponse qui revenaient sans cesse à la charge.
Ania me donna alors quelque conseil avisé… J’aurais pu les suivre, d’ailleurs je l’avais fait mais cela avait été un échec. Tous les chemins m’avaient mené à des culs de sac. Pourquoi ? Parce que les rares personnes, comme elle, qui auraient pu de donner un semblant de réponse étaient mortes. Je soupirais et haussais les épaules.


- Y’a pas de mal… Tu as de très bons conseils, dis-je simplement. Mais… Je sais que ça fait bateau de dire ça mais Elecktra est différente, expliquais-je avec l’ombre d’un sourire. J’ai essayé d’obtenir des réponses auprès de deux de ses amis… ça a été un échec, voir un choc ! J’ai appris que ces deux personnes étaient mortes. J’en suis même venu à me demander si ce n’était pas en rapport avec ce qui l’avait fait fuir. Une question de plus sans réponse !


J’acquiesçais d’un signe de tête lorsqu’elle me proposa de me donner des noms pour mes éventuelles futures expéditions avant de me plonger dans la contemplation de ses photos. Si je ne faisais aucun commentaire sur le cliché qu’elle avait pris de moi je le trouvais assez réussi. Chose rare car je n’aimais pas voir des photos de moi.
J’en admirais plusieurs autres et je proposais même à la jeune femme de tenter de vendre de ses clichés dans ma galerie.


- Cool si t’es d’accord. Je vais noter les numéros de celles qui me plaisent de ton appareil… Je reviendrais sur celle de la fillette et du chien plus tard. Et je suis certain que ce genre de photo va se vendre, ajoutais-je avec un sourire.


Je continuais ensuite mon ‘‘exploration’’ au travers de l’appareil d’Ania pour découvrir de magnifiques paysages inconnus. La photographe m’expliqua qu’il s’agissait de la Mongolie et je notais le numéro d’un cliché avec une horde de chevaux.
Le genre d’image qui vous coupe le souffle la première fois que vous la voyez et qui vous émerveille les fois suivantes.


- C’est magnifique, dis-je en récupérant l’appareil.


Je tombais ensuite sur des paysages différents mais tout aussi enchanteurs avant de bloquer sur une photo de tigres. Léopard, tigre, panthère… Ces animaux me rappelaient celle que j’avis perdu et sans m’en rendre compte je soupirais sans pour autant continuer à faire défiler les photos.
Je me contentais de fixer les félins, le regard légèrement perdu dans le vide.

Je m’excusais même si je n’étais pas obligé de le faire… je prenais cette peine que je ne voulais pas rappeler à Ania un passé douloureux et c’était visiblement ce que je venais de faire. Alors autant dire que je me sentais légèrement mal à l’aise lorsqu’elle m’expliqua que son frère et son fiancé étaient mort dans un accident d’avion. Évidemment cela devait avoir fait naître beaucoup de questions dans l’esprit de la jeune femme. Interrogations auxquelles elle n’aurait jamais de réponse.
Tout d’un coup mon histoire paraissait beaucoup moins tragique ! Du moins elle l’était si je partais du principe qu’Elecktra était toujours en vie. Ce n’était peut-être plus le cas ! Mais ils en auraient parlé non ? Après tout elle faisait pas mal de concerts dans le coin et sa mort aurait attiré l’attention. Du moins si elle n’avait pas été cachée… Ses pensées créant une douleur au niveau de ma poitrine je choisissais de répondre aux paroles d’Ania.


- J’imagine que tu dois te poser des questions sur les circonstances du drame, déclarais-je. Sache que je suis désolé pour toi.


Je n’allais pas plus loin dans cette conversation car je me doutais que la jeune femme n’avait sûrement pas envie d’en parler. Aussi je choisissais de répondre à ses questions et commentaires concernant les interrogations que j’avais et qui n’auraient aucune réponse. Cette diversion ne m’enchantait pas mais elle était toujours mieux que de provoquer la tristesse d’une amie.
Je ne fus pas surpris par sa réaction concernant le décès des personnes ni par la question qui suivit. C’était dans la nature humaine d’être curieux. Mais je tiquais pour le reste, je n’étais pas vraiment certain qu’il s’agisse d’une coïncidence. Deux métas assassinés après que ma petite-amie ait pris la fuite pour me protéger ! J’étais peut-être parano mais ça me semblait louche cette histoire.


- Dans ce cas on est deux curieux… ajoutais-je avec l’ombre d’un sourire. Et pour ce qui est de ces personnes elles ont été tuées mais je n’en sais pas plus. Je ne les connaissais pas non plus ! Sauf un, que j’ai croisé deux – trois fois. Je marquais une pause. C’est peut-être une coïncidence mais c’est bizarre je trouve, finis-je par conclure pensif.


Puis la conversation devint moins triste, plus légère et je m’extasiais devant les clichés d’Ania. Elle avait du talent et c’est avec plaisir que j’allais exposer certaines de ses photographies dans ma galerie. Tout en faisant défiler les captures d’images je notais celles qui m’intéressaient. Mais je bloquais à un moment… Voir des paysages étrangers m’avait ôté de la tête mon ex et tous les mystères qui l’entouraient. Cependant la simple vision de tigres m’avait rappelé à son bon souvenir.
Je ne m’en rendais compte qu’au moment où Ania m’interrogea. Et je remarquais aussi à cet instant à quel point elle avait du être près des félins pour réaliser cette photo. Étant absorber par le cliché je répondais donc sans trop réfléchir à la question de la jeune femme.


- Ce cliché m’a rappelé Elecktra, déclarais-je naturellement.


Dit comme ça c’était bizarre non ? Non ! Je devais encore faire mon parano et je choisissais de ne pas rectifier mes dires pour poursuivre.


- Et oui, je me disais aussi que tu devais être très pour avoir obtenu un tel résultat. Ça a du être génial de voir des tigres de si près. J’ai pu en faire l’expérience avec un léopard il y a à peine quelques mois.


Ah oui ? Et où puisque je n’avais pas bougé d’ici… Les léopards n’étaient pas monnaie courante dans les rues d’Écosse.

Il n’est jamais simple de parler de la mort de quelqu’un et cela doit être d’autant plus difficile lorsqu’il s’agit d’un membre de sa famille ou de son fiancé ! Personnellement mon cas était très différent puisque Elecktra n’était pas morte… du moins elle ne l’était pas lorsqu’elle avait choisi de m’écrire une lettre de rupture et de fuir. Ne pouvant que me montrer compréhensif j’essayais de trouver les mots sans pour autant tomber dans les trucs bateau ou niais.
Je comprenais qu’elle puisse avoir du mal à accepter et à l’entendre, Neal n’aurait jamais pu avoir un accident. Peut-être mais il ne faut jamais dire jamais ! Après il fallait reconnaître que le monde ne tournait plus très rond et qu’il arrivait parfois que les accidents ne soient pas ce qu’ils paraissaient. Mais je n’allais pas lui sortir ça car il était évident que cela ne l’aiderait pas.

Je préférais garder le silence avant de répondre à ses questions. Le sujet qu’abordait Ania n’était pas pour me plaire mais il s’essoufflerait très vite. Je n’avais pas vraiment beaucoup d’éléments en main pour dire que tout était lié mais je ne pouvais m’empêcher de penser que cela était louche.
Cependant je me rendais compte que j’avais peut-être trop parlé. Oui, j’avais dit que ces personnes avaient été tuées et même si j’ignorais pourquoi je savais qu’elles avaient toutes les deux un point commun. Tout comme Elecktra c’étaient des métamorphes. Mais je n’allais pas sortir ça !


- Oui, tuées ! répétais-je. Et pour l’une d’entre elles ce n’était pas un accident. Pour l’autre j’ai juste appris son décès lorsque j’ai cherché à le voir pour essayer d’avoir des nouvelles de mon ex. Je voulais être sûr qu’elle allait bien et au final…


Au final je me retrouvais avec plus de question ! J’avais laissé ma phrase en suspend pour ne pas à avoir à parler du point commun que ces personnes avaient. Mais j’aurais pu me contenter de dire qu’elles étaient amies ! Ania m’aurait pris pour un parano mais mieux valait ça plutôt que de trahir le secret de la jolie rouquine qui avait volé mon cœur. D’ailleurs je repensais à elle en tombant sur une photo et l’expliquais à Ania.
Ce fut elle qui me sortit de ma contemplation lorsqu’elle prononça le prénom de celle que j’avais surnommée ma sirène. Pourquoi Ania avait l’air étonné qu’Elecktra soit mon ex ? Mais cette question fut très vite remplacée par une autre. Je fixais la photographe, surpris et ne parvenant pas à l’interroger de suite.


- Tu connais Elecktra ? T’as de ses nouvelles ?


Est-ce que c’était assez pour rattraper ma gaffe concernant le léopard que j’avais vu de très près il y avait peu ? Non ! Visiblement Ania n’était pas passée à côté de ce fait étrange. Et même si nous avions de ces félins dans nos zoos il était vrai que l’on ne pouvait pas s’en approcher. Il fallait que je réponde quelque chose de plausible à ça et je choisissais la vérité…
Enfin, je n’allais pas dire que mon ex pouvais se transformé en animal mais je n’allais pas mentir non plus, sauf peut-être par omission.


- Oui, j’ai vu un léopard de très près il y a peu… Ce n’est pas courant ici, je te l’accorde ! Il suffit de connaître les bonnes personnes.


Moui ! Pas mal… Ania penserais sûrement que je faisais allusion à une personne travaillant dans un zoo. Mais je n’y pensais pas plus longtemps puisque mon amie capta mon attention lorsqu’elle déclara qu’elle avait pu toucher les tigres. Elle me retourna la question et ma réponse précédente devint moins crédible lorsque je reprenais la parole…


- Non, non, je ne l’ai pas touché. J’étais trop surpris ! Faut dire que je ne m’attendais pas à me retrouver face à face avec un léopard. C’est impressionnant ! Surement moins que des tigres mais quand même…

Je ne savais plus très bien si j’avais bien fait d’aborder le sujet de la disparition d’Elecktra et surtout des morts qui entouraient son départ précipité. Cela faisait légèrement parano même si Ania n’avait pas l’air de me prendre pour un cinglé. Du moins elle n’en avait pas l’air ! Dans un sens cela me rassura même lorsqu’elle me posa des questions et me permit de lui offrir l’esquisse d’un sourire. Si elle ne me regardait pas bouche bée c’est qu’il y avait peut-être des raisons de se poser des questions concernant ce que je venais de raconter.
Je haussais alors les épaules. La seule personne à qui j’en avais parlé avait été mutée et je n’avais plus trop de nouvelle. Après qu’est-ce que j’aurais pu aller dire aux flics ? Que ma petite amie m’avait quitté sans réelle explication et que deux de ses amis étaient décédés ! J’aurais pu… Mais ils m’auraient sûrement posé des questions s’ils ne m’avaient pas envoyé balader et je n’aurais pu y répondre.


- J’y avais pensé… Mais pour dire quoi ? Que ma petite amie m’a quitté et que deux de ses amis sont morts ? Ils ne m’auraient jamais pris au sérieux. Je marquais une pause. J’en ai parlé à une amie de la PES mais elle m’a dit de ne pas chercher, que c’était la vie, un sale coup du destin, rien de plus… Du coup j’ai laissé tomber et j’espère qu’elle va bien.


Puis je me disais qu’elle avait survécu aux Années Sanglantes alors pourquoi serait-ce différent maintenant. C’était une combattante voir même plus vu ces capacités. Alors je me plaisais à croire qu’elle allait bien et qu’elle s’était trouvé un coin reculé où les vampires se faisaient rares.
Puis, j’eus le droit à un faux espoir ! C’est vrai qu’en y réfléchissant bien la question était anodine mais entendre Ania prononcé le prénom de mon ex m’avait donné l’espoir qu’elle la connaissait peut-être. Ce n’était pas du tout le cas. J’adressais alors à la jeune femme un léger sourire gêné.


- Y’a pas de mal… C’est juste que comme elle faisait des concerts un peu partout tu aurais pu la croiser ! Donc soit pas désolée, ajoutais-je avec un clin d’œil.


Je ne voulais pas qu’Ania soit mal à l’aise parce que j’avais mal interprété une question toute simple qu’elle m’avait posée. Puis pour éviter tout malaise j’en venais à parler des photos que je voyais et qui justement me rappelais mon ex. D’ailleurs je dus faire preuve d’une grande concentration pour mentir et ce n’était pas des plus grandioses. J’étais et resterais un piètre menteur. C’est sûrement ça et les questions d’Ania qui me firent oublier la mienne.



- Oui et non ! mentis-je de nouveau. Je savais que j’allais en voir un mais pas d’aussi près. Pis il faut reconnaître que c’est impressionnant !


Puis je l’écoutais parler des tigres et de leur comportement. C’est alors que ma question me revint à l’esprit. Je regardais de nouveau la photo en rallumant l’appareil qui s’était mis en veille. Ces tigres étaient sans nul doute sauvages ! Alors comment avait-elle pu les toucher et comment pouvait-elle dire qu’ils étaient doux ? Je n’eus pas le temps de l’interroger car elle le faisait déjà. Mais cette fois je n’oubliais pas !


- Oui, j’aurais bien aimé mais une fois la surprise passée s’était déjà trop tard. Il était parti d’où il était venu ! C'est-à-dire qu’Elecktra avait reprit forme humaine… Et ces photos m’ont fait penser à Elecktra car elle aussi aime les félins… en particulier les léopards. Je marquais ensuite une pause et lui montrais de nouveau la photo des tigres. Tu vas me dire que se sont ces tigres que tu as caressés ? Mais ils sont sauvages ! Ils auraient du… je ne sais pas… te bouffer. Puis je sortais un truc spontanément. A moins que tu me dises que tu t’es transformée en tigre et que c’est comme ça que tu les as approchés !


Ok ! Elle allait me prendre pour un fou… Mais je pourrais jouer la carte de la plaisanterie.