L'homme en face de moi fit à nouveau couler le liquide ambré comme je lui avais demandé et j'engloutis le tout comme les deux précédents. Ca ne me faisait pas particulièrement du bien mais je ne pouvais plus m'en passer. Juste une petite chaleur quelques instants pour me donner l'illusion que je pouvais oublier sa mort. Et cette fois encore je n'avais pas pu résister. Comme si le but que je m'étais fixé ce soir était impossible à atteindre. Ou tout simplement à envisager. C'était sûrement le cas. J'aurais du attendre, quelques jours, quelques mois... Mais je savais qu'un jour je devrais le recroiser alors autant y aller directement. Me jeter dans la gueule du loup, comme on dit.

Mes congés avait cessés il y a deux jours, nous étions déjà mi novembre. Ils ne pouvaient durer éternellement, je le savais bien, pourtant retourner au boulot avait été une véritable épreuve. Je n'avais toujours pas arrêté l'alcool et j'avais l'impression qu'une masse incalculable de problèmes s'était abattue sur moi depuis cette terrible soirée qui expliquait mon état présent. Il m'avait fallu cacher tout cela aux collègues, paraître aussi chaleureuse que d'habitude tout en m'écroulant dès que j'étais seule. Je n'étais pas prête à reprendre le travail et encore moins à voir Hayden pourtant je le faisais. Pourquoi ? Encore une question sans réponse.

Une fois le troisième verre vidé je me contrains à ne plus en reprendre, juste déposer l'argent sur le comptoir et me tirer. Ce que je fis, non sans mal. Une fois dans ma voiture je restais un long moment assise à contempler le vide, me repassant en boucle les derniers événements dans ma tête. La mort de Jonathan, si brutale, si horrible, si... Dévastatrice... Je n'étais plus la même depuis ce jour. Et puis la rencontre avec Sarah, des mots appaisants mais qui n'avaient rien changé à la situation. Ensuite tout devient plus brouillon : il y avait Alexis, McBrough et le gars que je viens de tuer, Guillemaud aussi, Irving... Je secouais la tête comme pour m'ébrouer et allumais le moteur.

Le trajet jusqu'à Wolfheaven ne fut pas très long, à mon grand désespoir. Personne ne m'imposait d'y aller, je pouvais très bien rentrer chez moi mais je me contraignais à remplir cet objectif, comme s'il pourrait peut être m'aider à avancer. J'avais envie de fuir, courir très loin, être quelqu'un d'autre... Mais j'ai gardé un peu de lucidité, je sais que c'est impossible. En entrant dans le territoire des loups la première chose que je fis fut de me transformer. Puis courir. Bouffer un petit animal qui eut la malchance de passer sous mon nez, courir encore. Pour réapparaitre sous forme humaine une fois épuisée.

Je ne l'avais pas prévenu de ma visite, ainsi nous n'avions pas de point de rendez-vous. Au bout de quelques temps à chercher je décelais enfin son odeur, si familière. Lui aussi avait du me sentir, ainsi j'arrivais derrière lui sans prévenir et pris mon courage à deux mains. Je n'avais pas peur, non, je me demandais juste ce que j'allais lui dire exactement. Que dire à l'assassin d'un père adoptif, quand lui même est comme un frère pour vous ?

"Bonsoir" Je fis quelques pas vers lui avant de reprendre la parole. Le ton de ma voix n'était pas agrresif. Juste neutre, inexpressif. "Alors, qu'est-ce que ca fait d'être Ulfric ?"

Traduction : qu'est ce que ca fait de tuer son père et de prendre sa place ?

Je compulse les papiers de mon père. Chose que je n'aurais imaginé auparavant et que je n'avais pas prémédité : en tuant mon père j'accédais paradoxalement à son héritage. Et que m'avait il légué ? Les comptes de la Meute d'Angleterre, qu'il avait tenu à l'écart de ceux d'Ecosse. Quand je pensais avoir pris possession d'un livret bancaire et que je le versais sur celui qui nous était commun avec Mary, il semblait qu'il y en avait trois de plus de cachés. Les loups garous ont une longue tradition et une expérience énorme de la clandestinité, et dans ces conditions il n'était pas très étonnant que nous en ayons dispersé aux quatre vents, de l'argent. Après tout, depuis que la société s'est ouverte sur le monde et que les échanges se sont multipliés, l'argent a gagné en valeur. Plus que simple monnaie d'échange, elle est devenue source de pouvoir, et garantie pour ceux qui ont besoin de protection. La Lune était témoin que nous autres lycanthropes en avions cruellement besoin, durant tous ces siècles qui avaient précédé. Ceux qui avaient suivi notre extermination quasi-totale des crocs des vampires. Ces créatures honnies qui manipulaient toujours le destin des nôtres, même après tout ce temps. Nous aurions pu croire que nous étions devenus plus matures, plus déterminés à diriger nous mêmes notre destin... Mais tout ceci n'était qu'une illusion cruelle. Les lycanthropes n'avaient pas encore la maturité pour présider pour de bon à leur destin, mais cela viendrait. J'espérais sincèrement que mon règne serait une pierre importante de cet édifice inédit que j'essayais de bâtir.


Je grognais de fatigue. J'avançais très lentement, tant ses casiers à document, détenus dans son coffre personnel, étaient en fouillis. Il m'avait étrangement laissé une lettre chez son avocat de Londres, au cas où il décéderait, afin de me laisser accéder à ses informations les plus précieuses et ses secrets les mieux gardés. L'Ulfric n'avait sans doute pas imaginé que ce serait moi qui le tuerait... Ou peut être que si. Quelque part, il m'avait toujours élevé pour cela, et il y avait bien sûr ces mots que je lisais parfois dans son journal de chef de Meute... Il était plus fier de moi que je ne l'imaginais, tout en m'enviant. Il m'enviait ma jeunesse, il m'enviait ma « popularité », il enviait la « facilité » de ma vie, et aussi ma compagne, qui avait été la seule louve de notre histoire à enfanter naturellement de vrais petits lycanthropes. Je le sentais nostalgique. Lui même aurait voulu détenir ce qu'il considérait comme un pouvoir énorme sur le reste de notre espèce. Lui même aurait voulu tant de choses... Cela ne signifiait pas qu'il nourrissait des regrets. Si c'était le cas, alors il le cachait bien et n'en soufflait mot. Je sentais parfois dans ses notes à quel point l'absence née de la mort de mon jeune frère l'avait impacté. Bien plus que son exécution de son ancienne Lupa, celle qui fut plus ma mère qu'aucune autre femme dans mon existence, événement et personne dont il ne soufflait mot non plus. Pudeur, indifférence ou regrets masqués ? Je n'en avais aucune idée. Même dans la mort, mon propre père restait un mystère pour moi.


Je la sentais arriver. Je perçus son odeur autrefois familière. Fatigué et débraillé, la chemise déboutonnée à moitié et les cheveux en bataille, je descendais les escaliers pour venir à sa rencontre. Elle était nue, et portait les stigmates d'une chasse en pleine nuit. Elle sentait l'alcool à plein nez. Je ne m'offusquais pas de sa tenue, ou plutôt de son absence de tenue. Entre loups garous, la nudité est notre état naturel et nous n'avons pas autant d'hypocrisie que les humains à l'accepter. Je ne sais que lui dire. Elle était très proche de mon père...


| Autant d'ennuis que j'aurais pu l'imaginer. Que fais tu ici et dans cet état, Ashleigh? |

Une odeur... une simple odeur peut représenter tant de choses à la fois. Je ne pus m'empêcher de frémir en sentant celle d'Hayden, en entendant son pas dans les escaliers puis sa silhouette. Tant de souvenirs affluaient dès que je sentais sa présence. A chaque fois je devais tous les écarter. Il n'était pas dans une meilleure tenue que moi, la chemise à moitié ouverte et les cheveux ébouriffés. C'était si étrange de le voir.... Comme s'il était qu'une illusion et que si je me pinçais, je me réveillerais et il n'existerait plus. Un souvenir, pas si vieux que cela mais qui me semblait remonter à des années lumières. Jamais plus nous ne pourrons être ensemble, je ne me berçais pas d'illusions à ce sujet. Pourtant l'attirance était toujours là, tout ce que je pourrais faire pour la détruire serait vain. Ma louve n'oubliait pas. Mais je pensais que peut être en le revoyant, ce soir, en sachant qu'il était le meurtrier de son père, mon père adoptif, toute l'affection que je lui portais disparaitrait. Ce serait le mieux. Le haïr, éprouver l'envie de me jeter sur lui pour venger mon protecteur.... Ce serait si simple, un monde où tout serait noir ou blanc.

Malheureusement les choses ne sont pas ainsi. J'ai beau me répéter son acte horrible, son patricide, j'ai beau me dire que c'est lui, Hayden, qui a tué Jonathan, je n'arrive pas à le haïr totalement. Il y a toujours cette atirance, pas de l'amour, juste du désir, un goût amer de souvenir que j'aimerais remettre à l'ordre du jour. Plus que tout autre loup il était comme un frère, pas un de ces frères biologiques à qui j'avais servie de putching-ball, non, un frère de cœur, de sang, de confiance. Il avait toujours compté pour moi plus que les autres amants. Il ne remplacait pas son père, Jonathan... Lui était tout pour moi, le centre de ma vie, le pillier principal, mais Hayden est un pillier important lui aussi. Je voudrais arriver à me dire que c'est lui le coupable et que je dois le détester. Mais si je n'ai pas pu intervenir le soir du duel, c'est bien parce que la mort de l'un comme de l'autre m'aurait tout autant attristée.

Ce que je comptais lui dire ? Je ne le savais pas. Je n'avais pas prévu de discours, je ne savais même pas comment j'allais réagir en le voyant. Peut être que le silence était la chose la plus éloquente qui puisse arriver entre nous. J'esquissais un sourire quand il me répondit qu'être Ulfric lui apportait autant d'ennuis que ce qu'il s'était imaginé.

« Mon état est si pitoyable que cela ? » dis-je, avec toujours un petit sourire. En revanche, il disparut vite pour mes paroles suivantes. « Ce que je fais ici... J'sais pas trop. J'voulais te voir, te parler... J'me disais que peut être ça pourrait éclaircir le brouillard dans lequel je me trouve. » Je baissais le regard sur mes pieds nus avant de relever la tête. « En plus... j'arrive même pas à te haïr pour... ce que tu as fait »

Bien sûr il m'est arrivé d'avoir envie de me jeter sur lui, de me battre avec lui. Il y a des nuits où je rêvais de le tuer, avant de me réveiller en sursaut et en sueur. Mais j'avais beau faire... Il me restait toujours des sentiments positifs envers lui.

Je dévisageais le loup et je n'arrivais pas vraiment à mettre de mot sur ce que je ressentais. J'étais attirée par lui autant que son patricide m'obligeait à repousser cette attirance. Et puis il y avait l'alcool, cet alcool qui me donnait une vague illusion de chaleur, mais qui, en ce moment, me plongeait dans un brouillard encore plus grand. Je savais que je n'étais pas la même louve qu'avant, je ne me reconnaissais plus moi même. Des fois j'osais espérer qu'en me pinçant je me réveillerais de ce rêve douloureux, que je retrouverais enfin la Ashleigh que j'étais mais ce n'est pas un rêve. C'est ma vie. Ma vie que je suis en train de gacher, comme ma mère a gaché la sienne avant moi... On aurait pu croire que son comportement m'aurait vacciné contre la boisson mais quand on est désespéré on oublie tout. En temps normal j'aurais surmonté cette mort facilement, j'aurais gardé cette douleur au fond de moi et ne l'aurais pas laissé me ronger de toutes parts. Mais ce n'était pas le cas. Tout était arrivé si brutalement, c'était si imprévu ! Il est mort sous mes yeux, sans que j'ose intervenir. Comme je me hais ! Peut être... Peut être que si j'avais agi les choses ne se seraient pas finies ainsi. L'homme en face de moi serait mort mais Jonathan serait en vie. Peut être. Je ne suis qu'une lâche, qu'une imbécile. Mon bon cœur me perdra... Mon bon cœur ? C'est bien la première fois que je pense avoir un cœur... Les lâches n'en n'ont pas. Les traitres non plus. En plus avec McBrough qui m'oblige à être son espionne sous peine de finir en tôle...

Je poussais un nouveau soupir pour me ramener à la réalité. Il ne fallait pas que je m'étale sur d'autres pensées, sinon j'allais péter un câble. Mon attention revint sur le loup. Il soutenait mon regard tout en me faisant une leçon sur mon comportement. Je retins un autre soupir. Oui il était Ulfric... Arriverais-je un jour à m'y faire ? Je ne pense pas. Pas totalement. Ce serait nier Jonathan. Mais il est mort... Alors je ne le nie pas. Mais... Oh je n'en peux plus. Je vais exploser. Je ne suis pas entièrement ivre, mais quand même un petit peu, je dois l'avouer. Et nue... Eh bien je n'y avais même pas fait attention. Non, vraiment, je ne me reconnais plus.

« Merci » Marmonais-je, un peu abattue.

J'avais l'impression que quelqu'un d'autre parlait à ma place, que ce n'était plus moi qui habitait dans ce corps. J'observais depuis un coin reculé de ma tête cet autre moi me faire vivre. Et même si je le voulais, je ne pourrais redevenir moi. Je n'étais pas assez forte, pas encore. Alors je me laissais vivre, regardant ce loup qui occupait une place si importante dans mon cœur et qui venait de me réprimander... Bien entendu ses propos étaient justes, mon comportement était injuste, mais je ne pouvais rien y changer... Je ne le reconnaissais plus, lui non plus. Il était Ulfric et il voulait bien le faire comprendre. Ma solitude n'en n'était que décuplée.

« Tu te hais... » Répétais-je à voix basse, plus pour moi que pour lui. Il se détestait un minimum pour son acte, c'était déjà un maigre réconfort.

« Ce que j'attends ? Rien. Tu ne me dois rien et je n'irais rien te demander. » Je soutenais son regard le mieux que je pouvais. « Seulement... Si. Je... Est-ce que tu pense que j'ai trahi la meute ? »

Je n'avais pas pu empêcher l'émotion de transpercer ma voix. Voilà, nous y étions. La trahison. Jonathan, l'Ulfric traitre, mort. Moi, sa petite protégée ambitieuse.

Je ne savais pas vraiment comment traiter avec Ashleigh. La jeune femme était perdue, déboussolée. Et nue devant moi. Même si c'est naturel pour nous autres lycanthropes, c'est assez symptomatique de l'état dans lequel elle se trouvait ; j'avais bien conscience qu'elle n'aurait jamais osé en temps normal se retrouver dans cette tenue devant son chef. Ou alors, à dessein. Etait ce le cas ? Souhaitait elle un rapprochement entre nous ? Je n'en savais rien, mais alors rien du tout. Je ne l'espérais pas ; pour être honnête je ne savais pas du tout comment je pouvais gérer la situation. Je ne savais pas trop comment me comporter avec cette ancienne maîtresse. Et plus que ça, cette ancienne compagne. Il était temps pourtant que je le sache, alors que j'étais sensé me marier avec Isadora alors que je vivais en théorie proche de Mary. Que je sache comment je devais accueillir et vivre avec cette ancienne compagne. Bon, cela n'avait jamais été très sérieux avec Ashleigh, et la guerre puis la distance nous avaient permis de vivre la fin de notre relation charnelle de manière posée et sereine. Je savais bien que je n'étais pas l'homme le plus courageux qui soit de ce côté là, mais Ashleigh avait toujours incarné la tentation et la répulsion que mon destin de fils d'Ulfric m'avait toujours inspiré. Je la savais capable de douceur, même si je connaissais bien plus son aspect sensuelle et lascive, séductrice. Je savais bien évidemment que la jeune louve était plus complexe que cela sa présence ici et ainsi ce soir en attestait. Je me demandais pourquoi Ashleigh était autant abattue ? Parce que je lui échappais pour de bon, ou parce que mon père était mort ? Peut être un petit mélange des deux ? Ou peut être... Je ne savais rien. J'attendais qu'elle m'en dise plus sur les raisons qui l'avaient amenée ici.


La belle soupirait. Et me remercia, abattue, dévastée par ce qu'elle avait vécu. Et moi, alors ? Elle répéta mes propres paroles comme pour s'en imprégner, avant de me dire qu'elle n'attendait rien de moi. Et là, sa question qui tombe. Je reste bouchée bée. Mais non, pourquoi aurait elle trahi les siens ? Et d'un coup, la suspicion fit son chemin dans mon cœur. Je fronce les sourcils.


| Pourquoi est ce que tu dis ça? |


Ton puissant, autoritaire. Parles moi et réponds moi. Pourquoi penses tu avoir trahi la Meute ; aurais tu quelque chose à confesser à ton dominant?

J'avais posé la question. Cash. Directe. Je ne suis pas du genre à tourner autour du pot dans le genre de situation où je suis. Pas la force, pas l'envie. Il me fallait jouer cartes sur tables. Cartes sur tables... Même si tout ce que je m'apprête à débiter ne sera que mensonges. Mensonges, ou simplement passer sous silence une partie de l'histoire ? Ce ne serait pas vraiment mentir. Mais dans l'état où je suis, ne dire qu'une partie de la vérité revient à mentir. Je m'enlise dans mes propres choix, chaque chose que je fais complique un peu plus mon existence. J'ai l'impression de ne faire que des faux pas. J'ai déjà trahi la meute avec Guillemaud, maintenant je m'apprête à fournir des infos à McBrough pour ne pas finir en tôle... Elle est pas belle la vie ? Hmhm. Je suis sûre que je trouverai un moyen de tourner cette situation à mon avantage -Alexander peut être?- mais pour l'instant j'essayais juste de démêler les fils, de me retrouver moi, la Ashleigh que j'avais pu être avant que la mort de Jonathan ne m'assomme comme un coup de massue. Je me tenais face à Hayden le plus dignement possible, il fallait que je me contrôle, que je paraisse... Présentable. Mais à voir son expression, c'était peine perdue. Alors puisque c'était ainsi, autant foncer dans le tas. Autant poser la question que me trottait dans la tête sans que j'ose me l'avouer. Traitresse ? Hayden me connaissait plus que n'importe quel loup maintenant que son père avait disparu. Il savait mes ambitions. C'est justement ce qui avait causé la fin de notre relation... Bref, il savait bien que je voulais le pouvoir. Mais se doutait-il à quelles extrémités j'étais prête pour y accéder ? J'en doutais. Tant mieux. Jonathan m'avait quand même inculpé cette loyauté pour la meute que tout bon loup se doit d'avoir. Il avait trahi, le bon sens pouvait indiquer que, moi, sa protégée je l'avais suivie... Mais je pouvais citer ses propres paroles à Hayden pour le convaincre du contraire.
Je ravalais ma salive avant de lui répondre :


« Pourquoi ? Parce qu'on m'en a accusé. Parce que tu sais très bien que j'aurais pu le faire. Il est légitime que tu doutes de moi. Mais... Tu te rappelle, la dernière fois qu'on s'est croisé, après l'attaque ? Tu m'as toi même fait remarqué que j'avais coupé les ponts avec la meute. Je n'ai presque pas revu ton père depuis la fin de la guerre, il ne m'a parlé de rien. Je sais qu'en dehors de cela il n'y a pas de preuves tangibles de mon innocence, mais il n'y en a pas non plus de ma culpabilité. Il faut que je sache. Faut que je sache si tu doutes de moi. Si mon Ulfric doute de moi »


Il avait posé sa question d'un ton autoritaire, j'y avais répondu d'un ton sur. J'étais consciente que ma façon directe d'aborder le sujet pouvait le dérouter. Peut être ne s'était-il même pas posé la question. Mais ça m'importait peu, il fallait seulement que j'éclaircisse le chemin devant moi. Chemin que j'allais devoir parcourir sous l'oeil de mes dirigeants.

Je me suis tout de suite braqué sur les dernières paroles de la louve. Que lui est il arrivé et qu'a t'elle fait ? Je n'en ai aucune idée, et j'anticipe déjà le pire. Je ne peux pas être optimiste dans une situation pareille, je ne peux pas l'être dans le sens où jamais j'aurais cru mon père capable de tous nous trahir. Il avait son caractère et son ambition, bien sûr. Il les avait toujours eus. Mais au point de tous nous vendre, ça je n'aurais jamais pu le concevoir. Mon père était bien trop loup garou pour cela... Mais il l'avait quand même fait. Du coup, qu'est ce qui empêchait quiconque de foutre tout en l'air en nous vendant au plus offrant ? Visiblement pas grand chose. Ashleigh ne m'aurait pas avoué une trahison qu'elle n'aurait pas commise... Je la connaissais assez pour pouvoir le dire. Nous avions partagé pas mal de choses dans notre existence, tout de même. Je ne voulais pas que cela en reste là, mais si elle aussi avait trahi les nôtres... Je ne savais pas encore comment je réagirais, mais avec la plus extrême sévérité sans aucun doute. Je ne supporterais pas la présence d'autres Quislings dans la Meute. La jeune femme ravale sa salive avant de me répondre, mettant fin à une attente et une impatience beaucoup trop longue. Je l'écoute, et cela me rassure. Quelqu'un l'a accusée. Je ne sais pas qui, quand et comment, et encore moins pourquoi. Tout ce que je sais, c'est qu'elle même vient m'annoncer ces événements en personne avant que quiconque d'autre ne m'en fasse part. Dois je y voir une preuve de sa culpabilité ou au contraire de son innocence ? Mais c'était vrai. Je savais qu'elle aurait pu le faire. Mon père l'avait formée pour devenir ou ma Lupa ou la sienne, malgré leur différence d'âge. Je l'avais bien vu ; elle était la fille qu'il n'avait jamais pu avoir naturellement, ce qui forcément jouait beaucoup dans la socialisation lupine d'Ashleigh. Elle voulait que je la rassure. Je ne répondais rien, la dévisageant d'un air sombre. Je ne savais pas quoi lui répondre, alors j'inspirais profondément pour lui poser les bonnes questions.


| Tu vas tout m'expliquer. Qui t'accuse, et pourquoi. Et tu vas aussi me convaincre de ta fidélité ; je veux que tu me prouves que jamais tu ne comploteras contre moi ou la Meute. Vas y, je t'écoute. |


J'attends sa réponse. Je suis le Roi, et j'exercerais mon jugement. Il vaut mieux pour elle qu'elle me convainc, bien entendu. Elle risque gros...

Ma situation était critique et j'avais vainement essayé de déméler les pinceanx. En soit, livrer des infos à l'ennemi n'était pas la chose qui me déplaise le plus dans ma vie. Malgré ma loyauté envers ma meute, je me rendais compte que créer le chaos en son sein ne pouvait m'être que bénéfique. Alors non, pactiser avec Guillemaud ne m'avait posé aucun problème. Avec McBrough c'était différent. C'était pour sauver mon cul. Mais encore une fois, au point où j'en étais, un peu plus un peu moins... Non ce n'était pas mes trahisons qui me dérangeaient. C'était celle de Jonathan et ce qu'elle avait engendré. Sa mort, qui m'a précipité vers le fond. Mon lien avec lui, qui désormais me montrait aux yeux de tous comme une comploteuse toute désignée. Ce que j'avais été sotte pour ne pas m'en rendre compte de moi même ! J'avais du attendre de me retrouver dans une grotte avec un loup prêt à me déverser une poche de sang humain sur la gueule pour me jeter à un vampire en cage... Je tremblais encore au souvenir de cette soirée. Je n'avais pas tout de suite flerré le mauvais coup, mais en arrivant près de lui mes sens s'étaient mis en alerte. Hayden Clearwater. Dommage. Il était pas mal. Je l'aurais bien mis sous la couette. Au moins il m'avait permis d'ouvrir les yeux et de rendre compte du m*rdier dans lequel je me trouvais. Un jour ou l'autre, d'autres se mettraient à me soupçonner, ce serait légitime. Un jour ou l'autre, on entendrait parler de ce qui s'est passé dans cette grotte. Il fallait mieux que cela sorte directement de ma bouche, et à celui à qui désormais appartenait le pouvoir. Il fallait bien que je m'y soumette si je voulais garder un minimum d'influence dans cette meute. Garder un espoir. Je n'étais pas particulièrement optimiste, ni pessimiste. J'étais réaliste. Tout n'était pas impossible, je pouvais encore atteindre le pouvoir. Seulement, le chemin serait beaucoup plus long et difficile. Les embûches s'étaient multipliés, c'est tout. Mieux valait donc mettre en lumière mon innocence dès maintenant auprès d'Hayden. S'il lui restait un minimum... d'affection pour moi, on pouvait toujours espérer qu'il me croirait.
Le loup resta stoïque. Il avait changé. Aujourd'hui c'était lui le chef et il me le faisait bien sentir. Soit. J'en étais consciente, de même de la précarité de ma position. Passons donc aux choses sérieuses. Il inspira profondément avant de me parler. Ton autoritaire, bref, concis. Qui m'accuse, pourquoi. Le convaincre de ma fidélité envers lui ou la meute. Je marquais peu d'hésitations : ma conviction ne pourrait que jouer en ma faveur.

« Hayden Clearwater. Il m'a enfermé dans une grotte à Holyrood Park et m'a demandé pourquoi j'ai trahi les miens. Parce que j'étais proche de ton père et que lui a trahi, alors moi aussi. C'est ce qu'il pensais. »

Je me tus, attendant sa réaction, ou au contraire, sa non-réaction, avant de poursuivre. Deuxième sujet, plus délicat. Mais crucial.

« Je n'ai presque revu aucun loup depuis la fin de la guerre. Tu le sais, tu me l'as toi même fait remarqué, qu'on ne me voyait plus à Wolfheaven. Je n'ai pas revu Jonathan plus de deux fois. Il ne m'a parlé de rien. C'est même toi qui m'a confirmé l'attaque faite à l'alliance. Tu dois bien te rappeler de ma réaction. Je ne te mens pas, je ne joue pas la comédie, ce n'est pas dans mon intérêt. Je n'ai rien à me reprocher. Si j'avais trahi, je ne serais pas venue te le dire, je me serrais terrée dans mon coin. Je ne veux pas que mon honneur et ma loyauté envers cette meute et ses dirigeants, peu importe mes sentiments personnels, soit remise en cause. Sache que, comme les autres loups, sa trahison me déchire, même si sa mort me déchire tout autant. Ton père m'a appris la fidélité que je devais à ma Meute. C'est lui qui m'a appris à être une louve, et il ne m'a pas appris la trahison. Lui n'a pas respecté ses serments mais moi je ne suis pas lui. J'aimerais que ce soit clair avant que la rumeur de mon implication dans ce complot ne se répande, car elle est infondée. »

Je pris le temps de lui jeter un coup d'oeil pour voir son expression

« Je peux aussi te dire que cette Meute est ma seule famille, je peux te raconter mon histoire. Mais je ne pense pas ce soit le sentimental qui te convaincra le plus, te connaissant. »

Je fermais enfin la bouche et attendais le verdict. Mon avenir au sein de la meute était peut être bien suspendu à ses lèvres.

Des explications. Ce que j'attends de tout le monde et dont j'ai assez en ce moment. J'ai l'impression qu'effectivement, comme je l'avais imaginé, la Meute s'avère peu ou prou ingouvernable. Les nôtres ont tellement de problèmes individuellement ou en groupe que je passe finalement plus de temps à gérer les leurs plutôt que ceux de la communauté en règle plus générale. J'avais pourtant réussi à commencer par des réformes plutôt générales. Le statut de la Lupa et du couple alpha dans la Meute, les relations qu'ils devaient entretenir avec le reste des loups, le statut et le rôle des exécuteurs, dont j'avais prolongé les nouvelles règles dans nos lois coutumières. Il y avait aussi ces recherches sur la fertilité lupine, et ces premières pistes lancées pour réfléchir à une évolution de notre communauté avaient pour l'instant donné quelques fruits, même s'il était trop tôt pour pouvoir évaluer jusqu'à quel point les choses avaient bougé et surtout comment nous avions pu intégrer et tolérer ces différents changements. Il y avait beaucoup de choses positives à tout ceci. Je marquais quoi qu'il en soit une certaine distance que personne ne saurait nier en m'écoutant parler, avec celle qui pourtant avait été ma compagne pendant un bon moment. Il y avait beaucoup de choses à dire de tous les non-dits de cette conversation, mais je comptais bien profiter de l'occasion pour tout mettre à plat avec Ashleigh. Il était temps de crever les vieux abcès et d'avancer enfin, chacun de son côté.


La jeune louve me dit que l'accusation venait de Clearwater. Ce qui m'étonnait d'un côté, puisque l'anthropologue était d'un tempérament plutôt pacifiste et peu belliqueux. Mais je savais qu'il était aussi l'un de mes soutiens les plus loyaux et qu'il était parfois agressif au possible lorsqu'il sentait un danger sur les nôtres. Ce qui en aurait d'ailleurs fait un très bon exécuteur. J'écoutais Ashleigh continuer, ne désirant pas la couper. Avoir sa version complète des faits me semblait particulièrement important vue la situation. Je comprenais tout ce qu'elle me disait, bien sûr. Que ce soit rapport à son éloignement ou sa proximité avec mon père, en contradiction quelque part avec son dévouement à la Meute. Ce qu'elle me dit ensuite titilla ma curiosité. J'inspirais profondément avant de lui répondre.


| Je discuterais avec Hayden. Il n'a pas à prendre ce genre d'initiative en n'étant ni Ulfric ni éxécuteur. Je te crois quand tu viens ici, soûle et nue et visiblement dévastée, pour me dire que tu es innocente. Je te crois aussi quand tu me dis tout ton amour pour mon père, et ta fidélité envers la Meute. Pourtant, j'ai besoin de savoir. |


Je la dévisage quelques secondes, avant de reprendre.


| Est ce que tu es prête à mourir pour ta Lupa ? Est ce que tu es prête à obéir à tous mes ordres, et à tous les siens ? Je sais que tu convoitais la place, mais celle ci est déjà prise et j'entends qu'il en soit ainsi pour un bon moment. |

Je me sentais vulnérable, incroyablement vulnérable. Comme souvent ces temps-ci. D'abord par la disparition de Jonathan, puis par mes entretiens avec Guillemaud, McBrough... Et Hayden. J'en ai bavé, mais au moins ai-je réalisé ce que certains pouvaient penser de moi dans cette meute. Meute qu'en effet, je trahissais et que je vendais à tout va. Sans véritable remords. Seul le risque d'être découverte par les miens me faisait peur. Du moment que je contrôlais la situation, que mes alliances m'étaient bénéfiques et qu'elles ne me mettaient pas directement en danger, je n'aurais aucun soucis à me faire. Mais le problème est bien là. Peut être suis-je en train de devenir parano, mais en tout cas je me sens de plus en plus vulnérable. Un humain qui me fait chanter et un vampire avec qui je laisse huit cadavre plus une petite mise en scène ridicule derrière moi. Pour l'instant tout va bien, mais je sais au combien les choses peuvent déraper rapidement.



Et tout ce que je trouve à faire, c'est de débarquer chez le chef de meute nue et ivre pour lui déclamer mon innocence.


Est-ce que je pensais parler de ça en me présentant devant lui ? Non. Ou alors inconsciament. Mais c'était la chose la plus évidente qui m'était apparue en le voyant. Puisqu'il était l'Ulfric, puisque tout nous séparait à présent. Trop de sous-entendus, trop de non-dits, le froid entre nous était inquiétant. Une distance, peut être même une tension palpable. Il fallait que je fasse comme lui. Que j'oublie et que j'avance. Que je le regarde enfin comme mon Ulfric, non plus comme Hayden, le fils de Jonathan et mon ancien compagnon. Quant à le présenter nue et saoule, cela ne me posait pas vraiment de problème moral. Je ne m'en étais même pas rendue compte au départ. Au point où j'en étais... Même si je reconnais que l'alcool ne m'aidait pas. Je devais essayer d'y voir clair afin d'organiser mes pensées et de ne faire aucun faux pas. Ca pourrait m'être fatal, ce qui augmentait encore mon sentiment de vulnérabilité. Bien que mes paroles ne soient que mensonges et déformations de la vérité.

A ma grande surprise il eu l'air de me croire. Soulagemnt. Déjà une petite victoire, maigre et incertaine évidament, mais victoire tout de même. Qui fut un peu gachée par ses paroles suivantes. Il me dévisageait, ce qui me mit un peu plus mal à l'aise. Le loup savait mes ambitions, c'est même cela qui avait causé notre perte. Il savait où se trouvait l'épine et il venait d'appuyer dessus. Mary. Tout venait et tout viendrait toujours de là. Tous les problèmes que je pourrais causer à la meute - et à moi même. Le nouvel Ulfric ne voulait pas de moi, je le savais pertinament. Il y avait déjà Isa et maintenant Mary. Les quelques sms que j'avais échangé avec l'ex éxécutrice m'avait certifié que la Lupa resterait Lupa, qu'elles se haïssaient tout autant et qu'Isa avait même peur que Mary lui vole son fiancé. Étonnant qu'elle me dise tout cela étant donné que tout n'était pas rose entre nous mais c'était bien ce que j'avais cru comprendre. De toute manière, moi j'étais hors jeu. Du moins si l'on respectait les règles.

"Je l'avais compris, oui. J'obéirais à tes ordres et je serais prête à mourir pour tes intérêts, pour ceux de la meute, comme j'étais prête à le faire pour ton père. Tu sais que je n'apprécie pas vraiment la Lupa, mais elle aussi, mon devoir et ma loyauté envers ma meute m'ordonne de lui obéir. Je sais mettre mes sentiments personnels de côté. Je ne le fais pas de gaité de coeur mais il le faut bien."

Je marquais une pause.

"Je ne compte accéder au pouvoir qu'en respectant nos règles. Et je ne sais que je suis pas assez forte pour la tuer en duel. Je ne tenterai rien"

Du moins sous ton nez.

Ca me semblait assez convaincant. En tout cas, je ne voyais pas ce que j'aurais pu ajouter d'autre. Autant rester claire et précise. Les dés sont jetés.

On ne peut pas dire que j'y aille avec le dos de la cuillère. Je suis plutôt dur, que ce soit directement dans mes propos mais aussi dans ce qu'ils impliquent. Je ne transigerais pas avec Ashleigh au simple motif que par le passé nous avons pu partager une histoire commune, certes passionnée, enfiévrée. Je ne m'arrêterais pas à ce genre de détail, à ce qui est derrière nous depuis trop longtemps. Attention, je ne dis pas que tout ce que nous avons vécu ensemble compte pour des prunes. Simplement, il ne faut pas s'arrêter à l'attente d'une suite logique, d'une évolution dans la continuité de cette relation depuis longtemps terminée. Nous allons devoir utiliser ceux que nous étions ensemble autrefois pour avancer vers autre chose, vers une relation sur une base inédite. Je ne pouvais pas la reprendre comme maîtresse. Ou plutôt si. En tant qu'Ulfric, je le pouvais très bien. Cela ne voulait pas dire que j'allais le faire. J'avais déjà une compagne officielle que j'aimais, et qui ne manquerait probablement pas de m'assassiner si je la trompais. Et quand bien même Isadora me quitterait, je pourrais sans doute avoir une nouvelle compagne sans trop de souci. Je n'étais pas un type particulièrement repoussant et j'avais pas mal de pouvoir. Et de toute manière, sans Isadora sur sa route, je savais que Mary sauterait sur l'occasion pour me reproposer ce qu'elle voulait que l'on partage ensemble... Donc j'étais bloqué. Sauf catastrophe ou désastre imprévisible, j'espérais le rester pour longtemps. Quoiqu'il en soit, ce n'est pas en débarquant nue et complétement bourrée à Wolfheaven qu'Ashleigh améliorera son sort, vous pouvez me croire. Je suis peut être un homme mais je sais me contrôler, même si c'est parfois horriblement dur quand mon propre loup s'y met et surajoute à la tentation.


Cela dit, voir la jeune femme dans cet état ne me choque pas et ne me fait pas sortir de mes gonds. Notre véritable nudité, honteuse et personnelle, et celle de notre apparence entre nos deux formes, apparence qui nous rend tous horriblement gênés. Nus ou en loups, nous sommes comme nous sommes, et cela facilite d'ordinaire les tractations au sein de notre Meute que de jouer cartes sur table sur ce que nous sommes et sur ce que nous désirons. Son état d'éthylisme avancé fit qu'elle ne sait peut être pas trop me cacher ses réactions ; elle semble vraiment soulagée de ma réaction, ce qui me va très bien. Elle me renouvelle son serment de fidélité, et elle le renouvelle également pour sa Lupa, pour Mary. Je savais selon nos lois et nos règles sociales et culturelles que ce n'était pas suffisant de s'en tenir à ce genre de serment par interposition. Au moins était elle honnête.


| Tu es une louve suffisamment ancienne et expérimentée pour comprendre que je me fiche bien que tu ne le fasses pas de gaité de cœur, et que cela n'importe aucunement dans un serment de féauté. Je suis satisfait d'entendre ces différentes choses, mais il faut quand même avouer que ce n'est pas suffisant. Tu vas devoir redire ces mots devant la principale intéressée. Et ce n'est pas négociable, Ashleigh. |


Je n'utilisais même pas son surnom, quand bien même celui ci était dénué de tout consonance perverse ou romantique. Parce que j'étais l'Ulfric. J'étais un père et plus un frère. Je hoche la tête à ses paroles.


| Je l'espère, dans notre intérêt à tous. As tu encore quelque chose à me dire, avant de rentrer te reposer? |

Plus rien ne m'importait vraiment au final. La meute ? Je n'y avais plus de véritable soutien. Ou peut être si, je sais que je pourrais toujours compter sur James, par exemple, mais jamais il ne pourrait me comprendre malgré ses efforts. Seul Jonathan savait vraiment qui j'étais, qui j'étais devenue car c'était lui qui m'avait forgée. Tous les principes de loyautés me semblaient désormais dérisoires et je répandre un peu plus le chaos parmi les loups ne pourrait que m'être bénéfique, au point où j'en étais. De plus il me fallait des informations, des infos importantes et précises si je voulais rester en position de crédibilité auprès de McBrough. Je n'avais plus aucun scrupule à trahir, à comploter tant que ma sécurité ne serait pas compromise. Je savais évidament que je ne pourrais revenir en arrière, surtout avec la PES. Il me tenait en laisse, comme on dit et moi je devais suivre la cadence si je ne voulais pas me retrouver en tôle et mon espèce discréditée aux yeux de l'humanité. J'essayais d'entretenir la confiance que certains loups pensaient pouvoir avoir en moi, et Hayden en faisait partie. Parce que s'il me restait une chance je ne voulais pas la perdre. Et puis parce qu'il était Ulfric aussi. Et quand on est dévoré, rongé par l'ambition comme je le suis, avoir la confiance des grands est plus que nécessaire. Déjà que Mary se méfiait de moi, il me falait garder en Hayden un certain appui. Et cela semblait bien parti. Oui c'était un jeu dangereux mais un jeu nécessaire pour ma sécurité et ma place au sein de la meute.

Je l'écoutais donc, satisfaite de ce qu'il me disait. Finalement j'avais bien fait de venir le voir, le plus tôt est le mieux, puis les choses n'avaient pas dérapé. Au combien il pouvait être attirant, je restais un minimum maître de moi même, malgré la boisson.

« Je le sais, et je n'y manquerais pas. »

Lui répondis-je quand il m'ordonna de répéter ces mots devant la Lupa. Il n'avait pas besoin de me le rappeller, je savais bien que je devrais jurer ma fidélité devant Mary en personne si je voulais être crédible. Mais je voulais déjà entendre son avis à lui, autant en qualité d' « ami » et frère que d'Ulfric.

« Non. Je ne vois rien à ajouter. Tu as raison, je vais aller me reposer... Je pense que j'en ai bien besoin. Eh bien, au revoir, Ulfric. »

Je le saluais d'un rapide signe de tête, seule marque de respect dont j'étais capable ce soir. Je sortis de la maison, sans me retourner cette fois ci.


Quand je fus totalement seule, je pris forme animale et laissais la nuit m'avaler...