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« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]
MessageSujet: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyLun 14 Oct - 12:27




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




Aller prendre un café. Mais bien sûr. Je me demandai encore ce qu’il m’avait pris d’écrire un tel texto. Un moment d’égarement, ou tout simplement j’avais cédé à une envie qui me turlupinait depuis un moment. Je ne comptais pas le nombre de fois que j’avais saisi mon téléphone, tapé quelques mots, cherché le contact et… éteint le téléphone. Je ne me comprenais toujours pas au sujet de Sasha, mais j’avais aussi renoncé à comprendre ce qu’il pouvait se passer dans ma tête lorsque je songeais à elle. J’inspirai calmement. Valentina avait rapidement compris que quelque chose me perturbait cet après-midi, puisqu’elle m’avait forcé à aller regarder un film au cinéma et à nous promener dans Glasgow, à errer dans les rues du centre ville et à franchir le pas de boutiques de vêtements. Quand ma petite sœur avait décrété que je devais me changer les idées, je savais que je devais me faire à l’idée que j’allais devoir la regarder choisir des habits, les essayer, que j’allais devoir donner mon avis à leur sujet – alors que la plupart du temps je n’avais tout simplement pas d’avis sur tout ce qui était goût vestimentaire et artistique. Mais au moins, ça avait eu le mérite de refaire un stock de ma panoplie de chemises, de pantalons, de vestes et de chaussures. J’étais riche, Valentina avait apparemment bon goût et j’avais voulu lui faire plaisir.

Aller prendre un café. Je lui avais indiqué le Adam’s Dancing, parce que j’en avais eu de bons échos, ce mercredi vers dix sept heures pours que nous puissions prendre un café après notre travail. Je ne savais pas vraiment lorsqu’elle sortait de son travail – je ne savais pas vraiment d’ailleurs à quoi elle pouvait occuper ses journées en dehors de filer des mafieux jusqu’en Croatie – et j’avais donné une heure au hasard. Je n’avais plus d’emploi du temps fixe, cherchant par-dessus tout à trouver comment ne pas mourir tué par la Mafia ou autre.

Je me posai devant le miroir de la salle de bain, considérant un moment ma tenue. Une chemise toute simple, une veste pas beaucoup plus originale, un pantalon en lin accordé. Je n’étais pas particulièrement innovant dans mes tenues vestimentaires mais au moins c’était apparemment de bon goût, si je faisais confiance à Valentina lorsqu’elle me disait ça. Mon regard dériva sur mon téléphone, que je reposai tout aussi rapidement sur le meuble le plus proche. Il fallait que je me prépare à me comporter comme un être humain normal. Que j’ignore le pansement, sur ma main, qui résultait de ma dernière rencontre avec un vampire. Que j’oublie le fait que la Mafia commençait à se méfier de moi et m’avait envoyé très clairement des rappels à l’ordre accompagnés de photos de mes neveux et de ma nièce. Je sifflai Vlad, lui accrochai son collier malgré ses grognements mécontents, et attrapai mes affaires avant de sortir de mon appartement. Alea jacta est. Il fallait que je me comporte comme un être humain normal, mais je n’arrivais pas à déterminer si ma légère appréhension était à ignorer ou à considérer. Je ne savais pas si mon léger tremblement était important ou juste un contre coup d’une fatigue, de médicaments, ou autre. Je ne savais pas si… J’inspirai calmement en descendent en trottinant les différents étages de l’immeuble aux côtés de Vlad. En quelques dizaines de minutes, j’arrivai devant le restaurant, une heure à l’avance afin de vérifier si personne n’avait eu vent de ma visite. J’étais d’un naturel prudent, et j’étais en plus ponctuel ce qui n’aidait pas à me détendre tout particulièrement. J’avais déposé entre temps Vlad chez Valentina pour qu’il ne s’ennuie pas, et qu’il ne dérange pas Sasha. Sasha. Je m’appuyai à un muret, sortant avec un calme imperturbable une grammaire espagnole pour affiner ma connaissance de cette langue. Aujourd’hui : pas d’ordinateur, pas de 9mm, pas de poignards, pas de documents sensibles. J’avais décidé de n’être qu’un être humain normal cette fois ci. Je savais que si il s’avérait qu’elle avait un comportement agressif envers moi, je trouverai dans le restaurant de quoi me défendre. Et puis, je n’avais étrangement pas non plus envie que ça dégénère, et mes réflexes de tueur ne pouvaient être bridés que par l’absence immédiate des armes adéquates. Si je n’avais pas mon 9mm sur moi, je n’allais pas avoir le réflexe de le sortir si jamais je me sentais menacé. C’était ainsi que j’avais raisonné, mais j’appréhendais toutefois légèrement la venue de Sasha. Je ne savais pas à quoi m’attendre.



Dernière édition par Alexei R. Ivanov le Sam 22 Fév - 14:46, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyLun 14 Oct - 22:37

Mes recherches n'avançaient guère. Comme disait Riley Bergson, "ça rame fort Oppy !". Bien que ce surnom m’énerve grandement avant les années sanglantes, maintenant je ne pouvais que sourire tristement en pensant à mon collège tué durant la guerre. Même si ce joyeux luron m’agaçait prodigieusement, je regrettais sa présence et pleurais sa mort en silence. Au final, il n’était pas si embêtant que cela, comparé à ce « cher » Alexander Donovan ! Au début envoyé en mission pour le gouvernement pour vérifier nos activités, il avait pris de plus en place dans notre espace, bien trop à mon goût. Et maintenant que la PES souffrait d’attaques à cause de cette exposition qui a mal tourné, il était revenu en force et s’installait durablement dans nos bureaux ! Je ne pouvais vraiment pas le voir en peinture celui-là ! Et malheureusement, alors que je savais masquer mes pensées avec tout le monde – enfin sauf un certain russe – on aurait dit qu’il savait que je le détestais. Et il me le rendait bien ! Je savais qu’il me trouvait incompétente et indigne de travailler pour la brigade. Sauf que je faisais partie des rares épargnés de la coupe sélective, moi ! Peut-être parce que je n’étais pas allée à cette exposition. Je commençais à sentir les effets pervers du présentéisme et de surmenage.

Même si j’aimais l’art, je n’étais donc pas venue et avait passé une soirée à plancher sur mon portrait-robot de la Mort. On pourrait plutôt appeler ça une « ébauche ». Je me suis posée toutes sortes de questions : pourquoi tue t-il indistinctement humains et vampires ? Dans quel but ? Quel est cet homme - ou cette femme ? L’image de Maryana me revint en esprit mais ce n’était pas possible que ce soit elle. Elle contrôlait les fluides corporels, surtout le sang, et tuait surtout de manière théâtrale, en laissant une mare de sang, des cadavres désarticulés et sinistres. Alors que « La Mort » agissait de manière nette et précise, presque chirurgicale. C’était une personne sachant tuer rapidement et sans bavures, et sans laisser de traces. Enfin… Je savais quand elle avait frappé mais je ne partageais pas cette information pour l’instant. Je voulais d’abord être sûre. Concernant Maryana… je ne devrais pas parler d’elle au passé : elle sévit toujours, sauf que je n’entends pas parler d’elle en ce moment. *Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ?*

Prenant conscience que le travail me submergeait, j’avais décidé de m’octroyer des pauses. Ce soir, j’avais rendez-vous avec Alexei. Y a-t-il quelque chose qui cloche dans ma phrase ? Oui, tout à fait. Rendez-vous. Au début, quand je vis son message, je pensai : *Ok, on va parler. S’expliquer. Je n’ai pas le choix, faut que j’y aille.* Cela sonnait comme une corvée, même si le choc de recevoir un texto de sa part était encore très présent. Je restai, comme toujours, diplomate et neutre dans ma réponse. Mais quand je compris où il voulait que nous allions prendre un café, je me sentis défaillir. L’Adams Dancing. Ce restaurant existait toujours. Là où j’avais rencontré Tolin pour la première fois, pour la seconde fois, Tolin, mon amant, mon amour, Tolin tué … Je suis allée pleurer aux toilettes. J’ai compris qu’il voulait qu’on se revoie vraiment.

*Pour apprendre à se connaître vraiment. Pour se rapprocher… pour … Pour faire quoi ?*
« C’est ridicule ! » lançai-je tout en haut en sortant du bureau. Tellement ridicule que je m’étais re-maquillée et recoiffée avant de sortir, et que j’avais troqué mon tailleur pantalon gris contre une jupe plissée noire et un corsage rouge clair. Tellement ridicule que je me sentais comme une jeunette qui attend son … quoi ? Son futur petit copain ? *Tu as quel âge ?* J'avais 34 ans.

Arrivée devant la porte du restaurant, alors que mon instinct me commandait de fuir, je poussais vaillamment la porte. J’étais peut-être tombée dans un piège, moi qui n’avais emporté aucune arme, seulement un sac à main trop étroit pour y dissimuler un pistolet. Je n’avais que mon taser. Oh mon Dieu ! Rien n’avait changé. Au fond, accoudé au bar, ses cheveux noirs en pagaille, sa barbe de trois jours, son odeur masculine entêtante, le loup-garou qui avait emprisonné mon cœur et bouleversé ma vie était là. Non. Illusion. Folie. Il n’y avait personne. Alexei ne surgissait pas pour m’interpeller ; il n’y avait qu’un serveur qui voulait savoir si je mangeais seule.

« Je … J’attends quelqu’un. »
Avait-il réservé ? Devais-je mentionner son nom au risque de faire un faux pas ? Comment ne pas passer pour une idiote en faisant une description physique d’un homme au lieu de tout bêtement donner son nom ?

« Vous pouvez commander au bar, mais pour la table, il n’y a plus de place. » affirma l’autre fermement.
« Je vais dehors, » répondis-je plus énergiquement, retrouvant mes couleurs en sortant de cet endroit dérangeant. Je n’y étais pas retournée depuis que Tolin était mort. Quelle coïncidence navrante ! Pourquoi n’avais-je pas refusé ? J’osais espérer que la page était tournée. Apparemment non. Je fermais les yeux pour me recentrer sur le moment présent. Sa voix troubla mon recueillement.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyMar 15 Oct - 22:15




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




J’observai les passants défiler devant moi, s’arrêter devant le Adam’s Dancing, y entrer, en ressortir, m’ignorer, me considérer du regard sans me voir, me dévisager, s’exciter avec leur téléphone. Pendant toute mon attente, tandis que les minutes s’égrenaient tranquillement pour atteindre les dix-sept heures, j’observai la ville vivre tranquillement. Je suivis l’histoire désastreuse d’une femme qui, si je compris bien tout ce qu’elle hurlait à son téléphone, venait de se faire tromper par son mari. Je vécus avec un homme la perte d’une journée de travail lorsque son attaché-case dispersa un long dossier de feuilles volantes dans les bourrasques d’un vent d’octobre.

Le temps sembla s’être accéléré soudainement, parce que j’aperçus Sasha venir, entrer dans le restaurant. Je me décollai du muret sur lequel j’avais pris appui pour m’approcher du restaurant lorsque je la vis en sortir. Soit elle me cherchait soit… elle avait fermé les yeux, et je laissai éclore un sourire sur mes lèvres et je pris le temps de l’observer. J’avais entendu parler d’un attentat assez meurtrier pour les vampires lors d’une exposition en leur honneur, il n’y avait pas si longtemps, mais étant donné mes relations houleuses avec les nocturnes j’avais préféré me tenir éloigné de tel événement. D’autant plus que la Mafia m’avait contacté ce soir là… Bref. J’avais donc entendu parler de l’attentat, et en observant Sasha, je fus étonné de m’apercevoir qu’elle n’avait rien. Soit elle n’y était pas allée, soit elle avait été épargnée : le principal était ce petit sentiment de soulagement qui me surprenait à présent. Je m’approchai de Sasha sans un bruit, et je me sentis un peu obligé de signaler ma présence d’une petite toux forcée pour ne pas lui faire peur, avant de prononcer d’une voix grave qui m’étonna – comme elle m’étonnait à chaque fois que je parlais après de longues heures de silence :

« Bonjour. Excusez moi, je vous attendais à l’extérieur, je vous ai vu entrer dans le restaurant avant d’avoir pu venir à vous. »

Valentina pouvait être fière de moi : je me concentrais pour ne pas faire de faux pas mais pas seulement. Je me concentrais surtout pour paraître normal sans me trahir ; sembler à mon aise sans jouer un rôle. Un défi que je n’avais pas l’habitude de relever. Avec ma petite sœur j’étais réellement à l’aise, allant maintenant jusqu’à la taquiner, lui faire des compliments ou, plus rarement, me fâcher lorsqu’elle faisait quelque chose qui me déplaisait (comme fouiller dans mon appartement). Je tirai sur les manches de ma chemise pour bien les mettre en place, avant de désigner, un peu embarrassé il fallait se le dire, le restaurant juste derrière. Que me disait Valentina lorsqu’elle me voyait douter quant à l’attitude à avoir devant elle déjà ? Arrête donc de réfléchir, Xei’, tu vas te faire mal. Fais, c’est tout ! Faire ? Oui, mais… ce n’était pas aussi facile. J’avais un peu d’appréhension à l’idée d’intriguer Sasha, de lui faire peur avec mon insensibilité inhumaine.

« Ecoutez, je dois vous dire, je n’ai pas vraiment… l’habitude, de… de frayer avec d’autres personnes. »

La aussi, je me doutais que Valentina aurait tiqué si elle avait été là. Frayer. Que m’avait elle dit à ce sujet ? Que ce n’était pas très… c’est pas très glamour, ça, Xei’ !. J’avais compris de cette expression qu’il ne fallait pas utiliser ce mot si on ne voulait pas avoir l’air hautain. Je me corrigeai :
« Je veux dire, que je n’ai pas l’habitude d’inviter quelqu’un à prendre un café. Donc… N’hésitez pas à me dire si… »

Je pris mon inspiration, me concentrant sur le plus simple et sur ce que je devais dire sans me ridiculiser davantage. Ah, c’était une chose difficile pour moi de gérer un cas où je perdais un peu pied. Je n’avais pas l’habitude que tout soit flou dans mon esprit, habitué comme je l’étais à une clarté de pensée et de logique due à une absence totale ou presque totale d’émotions. Sasha me rendait faible par sa simple présence : j’avais l’impression de ne plus réellement appréhender ce qui m’entourait ; à cet instant. D’un mouvement de bras, je désignai l’entrée du restaurant.

« Nous entrons ? J’ai réservé une table, dans le doute, mais je ne savais pas si tu… si vous…, je passais au russe qui m’était tout de même bien plus aisé, je ne savais pas ce que vous préfériez. »

Je fis une nouvelle petite pause, avant de demander sans savoir si je posais la question pour la forme ou par réel intérêt.

« Vous avez été touchée par les derniers événements ? Avec la PES... »
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyLun 4 Nov - 22:42

En élaborant mon portrait-robot, une idée malsaine et dérangeante m'avait envahie : le personnage que je décrivais là, dans la tête duquel je tentais de m'insérer, ressemblait fortement à un homme que je connaissais. Trop fortement pour que je la laisse de côté. J'étais trop professionnelle et minutieuse pour la rejeter, bien qu'elle me déplaise au plus haut point. J'avais déjà sous mes yeux le protocole "habituel" de la "Grande Faucheuse" : frappes méthodiques, nettes et sans bavures, absence de preuves, portes et fenêtres fermées, aucun témoin aux alentours. Cela démontrait, si la Mort était un humain, une parfaite maîtrise de son corps, des technologies de pointe, et des armes en général. Ensuite, j'avais établi la liste des traits principaux découlant de mes recherches : peu sociable, se considérant comme différent des autres, voire même supérieur - ce qui rejoignait la théorie de l'être surnaturel commettant les meurtres sur sa propre espèce pour des raisons encore obscures - indépendant, solitaire, expert dans l'art de tuer...

J'avais à peine fini de tracer ses mots sur le papier - le traitement de texte étant trop étroit pour me permettre de réfléchir et d'élargir mes idées, au sens propre comme au figuré - que son nom, son visage, me frappèrent littéralement.

*Et si la Mort s'appelait Alexei Ivanov ?*

Cette idée me traversa de part en part. Idée folle ? Pas tant que ça. Je savais si peu de choses sur lui. J’espérais aussi tant de choses… J’espérais, non, je croyais naïvement que ce n’était pas lui. Je ne savais pas quoi faire à son sujet. Comment faire pour enquêter sur lui sans le revoir ? *Si je le recontacte, il se doutera bien de quelque chose*, pensais-je. Je restais quelques jours à ressasser nos rencontres, à chercher d’autres caractéristiques qui annulaient ma théorie du russe. J’en trouvais bien quelques-unes mais pas suffisamment pour repousser cette idée dérangeante.

Finalement, Alexei me fournit une échappatoire imprévue en me contactant lui-même. Après un temps non négligeable d’immobilisme surpris et de cœur battant la chamade – *il me donne rendez-vous !*, j’analysais férocement son texto, regrettant l’époque des lettres. Là, au moins, avec la graphologie, on pouvait déceler les hésitations, les pauses plus ou moins marquées de l’encre sur le papier, les larmes parfois ou tout simplement les sentiments cachés, retenus ou lâchés sur les mots. Face à son message, je ne pouvais plus reculer. Dans ses lignes numériques, il y avait assurément la preuve que je l’intéressais, soit parce qu’il voulait apprendre à me connaître et n’avait pas peur d’une troisième rencontre brutale, soit parce qu’il savait que j’enquêtais sur lui. Pour ma part, je répondis de manière habituelle, en restant neutre.

Avant de quitter le bureau, devant la réserve d’armes, j’hésitais longuement.

Beaucoup plus tard, toute ma théorie sur la Mort s’était envolée et les souvenirs de mes années heureuses avant celles sanglantes m’assaillaient de toutes parts, m’empêchant de sentir qu’Alexei s’était approché de moi. Je tâchais de reprendre le contrôle de moi-même quand sa voix retentit tout près de moi. Je ne pus m’empêcher de reculer, de m’éloigner de lui. Espérant qu’il prendrait cette attitude pour de la timidité. Après tout, nous étions en rendez-vous, non ?

« Oh ! Bonjour Alexei, ce n’est pas grave, je pensais que vous étiez déjà à l’intérieur, » Je lui faisais mon plus beau sourire, celui que j’espérais le plus sincère.
*Es-tu la Mort ?* Je ne pouvais pas contrôler mes pensées ; celle-ci me fit mal. Si j’avais été moins maître de mes émotions, elle m’aurait arraché une grimace.

Il devint soudain tout hésitant devant moi : je retrouvais l’Alexei du Celtic Pub. L’image d’un tueur froid et malfaisant se superposait à celui de l’homme mystérieux mais attentionné qui avait tenté de me faire confiance et qui l’avait vite regretté. J’abandonnais ma distance en m’exclamant d’une voix que je voulais rassurante :

« Je vous le dirai si quelque chose ne va pas. Tiens par exemple, lors d’un… d’un rendez-vous, on peut se demander mutuellement si on a passé une bonne journée, ce genre de choses ? »
J’espérais qu’il ne prendrait pas mal ma tentative pour le détendre. J’avais légèrement hésité sur le mot « rendez-vous » mais j’avais bien fait finalement. Pourquoi vouloir occulter la réalité ? Nous étions deux adultes malhabiles, l’un inexpérimenté et solitaire, et l’autre rouillée et peureuse.

Il me proposa ensuite d’entrer, toujours aussi hésitant, et j’ajoutais, comme pour continuer une leçon laissée en plan :
« Et bien, là, l’homme a l’habitude d’ouvrir la porte pour la femme et de la laisser passer. Tu connais ça en Russie, je suppose ? » Je lui avais aussi répondu en russe pour le mettre à l’aise.

« C’est parfait, une table réservée, oui je suis soulagée. En entrant tout à l’heure, le serveur a dit qu’il n’y avait … plus de place… » Ma voix mourut d’elle-même dans ma gorge devant le décor affreusement familier. Mais je réussis à sortir un « Allons-y donc ! » faussement enjoué et suivis le serveur en compagnie d’Alexei. En chemin – même si le restaurant n’était pas immense, il y avait un escalier à monter car nous étions placés à l’étage – il me demanda toujours en russe si j’avais été touchée par les derniers évènements à la PES. Heureusement que je n’étais pas en talons, sinon j’aurais raté une marche.

« Je n’étais pas présente à l’exposition, donc non, merci, je n’ai rien. Et toi ? Tu n’as pas eu envie d’aller admirer des œuvres d’art ? » Question légère ? Non. Alexei travaillait pour son compte ou le compte de personnes puissantes. En lien ou non avec la Mort. Ce ne fut qu’en m’asseyant en face de lui que je remarquais un détail que je n’avais pas vu auparavant : un bandage recouvrait sa main gauche, pansement récent pour une blessure profonde.

« Oh ! Que t’es-tu fait ? » Toute mon attention de profiler venait de disparaître au profit de celle d’une femme attentive à la santé de son compagnon.
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyVen 8 Nov - 10:13




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




« Oh ! Bonjour Alexei, ce n’est pas grave, je pensais que vous étiez déjà à l’intérieur, »

Son sourire en appela un de mon côté, alors qu’un léger froncement de sourcil répondit à son recul. Timidité ? Surprise ? Je ne connaissais pas suffisamment Sasha pour comprendre en profondeur le moindre de ses mouvements, et je décidai de garder le tout en mémoire sans chercher, pour le moment, à comprendre ce qu’elle faisait et ce que cette prise de distance pouvait réellement signifier. Je préférai, pour le moment, m’excuser pour la maladresse de mes actions et de mes propos, devançant ainsi – ou du moins voulant devancer – de possibles mécompréhensions et quiproquo. Je n’étais pas un habitué de ce genre de rendez-vous, et encore moins une personne tout à fait à son aise dans tout ce qui était relation sociale. La distance établit entre nous s’amoindrit, alors qu’elle essayait de me rassurer en m’aiguillant sur ce qu’il était habituel de faire dans de telles circonstances. « Je vous le dirai si quelque chose ne va pas. Tiens par exemple, lors d’un… d’un rendez-vous, on peut se demander mutuellement si on a passé une bonne journée, ce genre de choses ? » J’acquiesçai, comme l’élève devant le maître qui vient d’avoir une nouvelle leçon. S’intéresser à la journée de l’autre ? Pourquoi donc était-ce si indispensable, si nous n’avions aucun intérêt pour ce que l’autre allait répondre ? L’hypocrisie des personnes que je pouvais rencontrer me perturbait toujours, même si j’avais appris à mentir en usant pour cela de la neutralité naturelle de mon visage. Un rendez-vous. Elle avait hésité sur le terme, alors même qu’il me venait naturellement en pensée. C’était réellement la situation dans laquelle nous étions, sans qu’il n’y ait besoin de jouer impérativement sur les mots. Un chat était un chat, pourquoi le nier ? Je lui proposai d’entrer dans le restaurant, ne sachant pas si elle attendait de moi que je lui demande réellement comment s’était passée sa journée, et entrepris de pousser la porte pour la laisser entrer en première – et se prendre tous les coups à ma place si jamais il y avait eu un quelconque piège – alors qu’elle poursuivait ses conseils – qui corroborèrent étrangement avec mon attitude. « Et bien, là, l’homme a l’habitude d’ouvrir la porte pour la femme et de la laisser passer. Tu connais ça en Russie, je suppose ? » Elle aussi était passée au russe, ce qui me poussa à sourire à nouveau. Notre langue maternelle à tous les deux nous était bien plus facile et finissait toujours par revenir sur le terrain – comme si je commençais à l’associer à nos rencontres. Lorsque je devais communiquer avec la Mafia, j’employais un bas argot de ma ville natale. J’avais à présent la certitude que les Ivanov et la Mafia avaient toujours eu de forts liens, depuis ma mère – qui devait très certainement leur verser un pourcentage de ses revenus, s’ils ne lui prenaient pas tout pour lui redonner en fin de mois un salaire de misère, allez savoir… - jusqu’à mon grand frère qui devait déjà travailler pour eux lorsqu’il nous avait tous placés dans cet orphelinat délabré. Mais là n’était pas la question, il ne fallait pas que je me disperse. Je repris pied en indiquant à Sasha ce que j’avais prévu – une réservation de table – et sa réponse me rassura quelque peu : « C’est parfait, une table réservée, oui je suis soulagée. En entrant tout à l’heure, le serveur a dit qu’il n’y avait … plus de place… Allons-y donc ! » Sa voix enjouée – qui sonnait faux soit dit en passant – apporta un peu d’enthousiasme – ce même enthousiasme qui ne m’était absolument pas familier – et nous suivîmes le serveur après qu’un « J’ai réservé une table, au nom d’Ivanov. Alexei Ivanov. » grave eut franchi mes lèvres. Tandis que nous montions les escaliers – choisir une table à l’étage, accolé à la baie vitrée pour mieux observer la rue, m’avait semblé un choix judicieux. On ne regardait pas les étages, lorsqu’on était dans la rue, et si l’envie nous prenait de le faire, les reflets des vitres masquaient efficacement les traits des visages. Tandis que nous montions les escaliers, donc, j’entrepris de demander de ses nouvelles de façon détournée, en m’intéressant à ce qu’il s’était produit pendant cette exposition nocturne et si elle y avait pris part. Et avait été blessée.

J’étais bien incapable de savoir si ma question était intéressée ou non.

Jamais encore je n’avais été aussi opaque vis-à-vis de moi-même. Jamais, ou presque jamais, le fait était qu’une telle situation était rare, très rare. Et le soulagement que je ressentis à sa réponse – ou du moins à sa première phrase – me sembla tout aussi incompréhensible. « Je n’étais pas présente à l’exposition, donc non, merci, je n’ai rien. Et toi ? Tu n’as pas eu envie d’aller admirer des œuvres d’art ? » Je ne sus pas s’il était malin de sourire, et pourtant mes lèvres s’étirèrent légèrement lorsque je répondis, tirant sa chaise pour qu’elle s’assoit : « J’étais occupé, autre pa… » « Oh ! Que t’es-tu fait ? »

« Pardon ? » je retirai précipitamment ma main du dossier de la chaise, souhaitant par réflexe la retirer de son champ de vision. Ma main. Je détendis artificiellement mes muscles, qui s’étaient crispés sous la surprise, me positionnant instantanément dans une position d’auto-défense, prêt à réagir violemment à une attaque inattendue. « Oh, je… assieds toi. » Je m’assis en face de Sasha, posant ma main bandée sur la table, un peu gêné d’avoir attiré l’attention sur elle – erreur, erreur ! – et sans savoir vraiment ce que je pouvais lui répondre. La vérité me semblait naturelle, mais surtout naturellement stupide. Je ne pouvais pas décemment lui dire « Oh, ce n’est rien, j’ai juste pénétré par effraction dans le bureau d’une vampire. ». Ridicule. J’haussai les épaules, considérant la douleur à peine ressentie – je n’y prêtais aucune attention, et ce n’était clairement pas la première fois que j’avais à supporter une douleur de ce type – qui pulsait de ma blessure, et la tâche sombre que je devinais au creux de ma paume. Le bandage était propre, certes, mais la blessure saignait encore lorsque je sollicitais un peu trop ma main. Et il n’était pas dans mes habitudes de jouer aux infirmes. Je l’utilisais comme si elle était en bonne santé, sans pousser trop loin ses capacités mais en ignorant ouvertement ses récriminations. Je pris le parti de sous entendre des éléments et de lui laisser en deviner d’autres, ne m’avançant pas trop sur ce qu’elle savait de moi, et ce qu’elle ignorait.

« Ce n’est pas grand-chose, ne vous… ne t’inquiète pas. Je fais… je côtoie des milieux risqués, et lorsque je ne suis pas assez prudent… Ce sont des choses qui arrivent. »

Elle faisait partie de la PES, elle avait pisté mon frère, et j’avais ouvertement exposé mes hypothèses quant à ses intentions la dernière fois. Et elle ne les avait pas le moins du monde démenti, les confirmant même par son attitude. Savait-elle que j’étais de la Mafia ? La question était stupide. Sergeï en avait fait partie, j’avais compris au fil des années que c’était une constante dans notre famille – et notre père commun, à Sergeï et à moi, devait en faire partie aussi – et il était clair que je n’étais pas un monsieur-tout-le-monde, malgré tous mes efforts pour le paraître. Je complétai donc, sans savoir pourquoi je lui disais tant de chose si ce n’était pour faire connaissance – et accessoirement la conversation – d’une voix quelque peu teintée d’amusement : « Il y a certaines personnes qu’il ne fait pas bon de vexer, je le saurais maintenant. »

Pour clore plus ou moins ce sujet de conversation, j’ouvris la carte devant moi, mes yeux gris clair parcourant rapidement le menu sans savoir que choisir. « Tu sais ce que tu vas prendre ? » Finalement, je restai au tutoiement. Je ne savais pas qui, entre Sasha et moi, l’avait employé en premier, mais il me semblait évident à présent. M’avoir rencontré par trois fois – quatre même si on comptait notre rapide entrevue en Croatie – était un exploit, surtout que nous avions parlé à chaque fois. Elle rentrait dans le cercle restreint de mes connaissances, et en prenant en compte ce fait, il semblait que le tutoiement devenait évident. Je sentis sur ma nuque un fantôme du regard insistant de Valentina. ’Xei, dis quelque chose, bon sang, ne reste pas muet comme une carpe, tu es aussi censé parler, tu sais ? « Hum… j’imagine que la question est à poser maintenant, si ce n’est pas trop tard, mais tu as passé une bonne journée ? »

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyMar 19 Nov - 22:27

Les émotions se bousculaient en moi, me perturbant plus qu'il ne le fallait. Je n'avais vraiment pas besoin de me confronter aux souvenirs de Tolin et aux hypothèses angoissantes de mon travail pour être perturbée ! Je l'étais déjà bien assez, par la simple présence d'Alexei, présence apparemment amicale et désintéressée, par le fait que nous allions prendre un café ensemble. Quand nous étions entrés dans le restaurant, j'avais espéré que l'effet "souvenir de Tolin" se serait dissipé. Peine perdue ! Encore une fois, je m'interrompis dans ma phrase, percevant je ne sais quelle énergie inassouvie et enfouie flottant dans l'air, qui cherchait vainement à me happer dans un souvenir lointain et triste ... Oui, vainement, car je refusais de me laisser envahir par des pensées chagrines qui m'empêcheraient de me centrer sur le moment présent.

Alexei méritait qu'on s'attarde sur lui et qu'on tente de le comprendre : en tout cas, moi il m'intriguait car il continuait de se montrer imprévisible et presque drôle dans ses hésitations maladroites et sa gaucherie. Puisque j'avais dû le conseiller sur la conduite à tenir ou les paroles à prononcer : ouvrir et tenir la porte, demander si la journée s'était bien passée ... Si on nous entendait, que penserait-on de nous ? Etait-ce pour cela qu'il était passé au russe ? Peu de gens comprenaient cette langue ; cela lui semblait-il plus facile de ne pas passer pour un nigaud, un ignorant des coutumes de la vie en société ? En tout cas, cela ne nous aidait pas à passer inaperçus ! *Ils doivent nous prendre pour des riches russes : les seuls habitants de l'ex-Urss que l'on voit dans les pays occidentaux !* pensais-je. Sauf que nous ne correspondions pas à l'image qu'ont dessinée les médias : pas de manteaux de visons ni de limousine noire, juste un tailleur simple et un costume en lin. Pourtant, chacun de nous tenait assurément une place importante dans son organisation, qu'elle que soit celle d'Alexei, et moins nous étions visibles, mieux cela valait !

Une fois assise, je rassemblai mes esprits - et mon courage - pour combattre ces émotions diverses tout en répondant du mieux que je pouvais à sa question. Cela voulait dire que je restais neutre tout en l'interrogeant innocemment. Mais même cela, je ne le réussis pas. Je n'obtins pas de réponse cohérente sur sa présence ou non à l'exposition d'art. Pour quelle raison ? Je fus détournée de mes intentions premières par la vision d'une blessure recouverte d'un pansement sur la main d'Alexei. S'il réagit brutalement en retirant sa main et en essayant de la cacher, il parut se reprendre ensuite et s'assit tout en m'invitant à m'asseoir et en la posant - négligemment ? - face à moi. Tout de suite après avoir posé cette question sur un ton où je décelais non sans peur des relents d'inquiétude, mon imagination se mit en branle et j'espérais que ce ton soucieux le trompe et l'incite à se confier à moi, comme si j'étais son amie, sa confidente.

Bingo ! J'écoutais ses propos en ouvrant grandes mes oreilles. Parlait-il d'une intervention musclée ? Ou pire, d'une tentative de meurtre qui a échoué ? S'il était la Mort... Comment faisais-je pour rester calme ? Je réussissais à transformer mon adrénaline en de la timidité, de l'inquiétude, de la sympathie ... Enfin bref, je ne comprenais pas comment je faisais pour cacher mes réelles intentions à ce point. Peut-être parce que je n'étais pas totalement hypocrite dans mon intérêt à son égard. C'était tellement compliqué ... Pour le moment, je devais continuer à creuser sans me faire prendre. N'étais-je point profiler ?

"On avait opté pour un café, non ? Je le prendrais avec une bonne dose de lait ; je n'ai pas prévu de travailler tard ce soir."
Puisqu'Alexei me demandait enfin comment s'était passée ma journée, je devais en profiter pour revenir sur le sujet qui m'intéressait au départ, mais finement. Je le fis donc avec un sourire que je voulus ouvert et accueillant, même si le contenu de ma phrase l'était beaucoup moins :
"Oui, je dirais même ... Intéressante. J'avance sur plusieurs dossiers importants et je découvre des choses ... bouleversantes. Je ne peux pas t'en parler, tu le sais bien. Et toi ? As-tu vexé d'autres personnes ces jours-ci ?" demandais-je toujours avec le sourire. Et décidant de le troubler un peu, j'ajoutai, malicieuse :

"D'ici, je ne vois pas d'autres cicatrices mais je n'ai pas encore tout découvert sur toi."

hrp: j'espère que ça te va, sinon n'hésite pas à commenter!
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyVen 22 Nov - 12:27

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« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




Sasha était une personne intrigante, je devais l'admettre. Je n'étais pas un anthropologue analyse ou une quelconque personne ayant des capacités pour estimer les gens au jugé, loin, très loin de là même, mais elle dépassait de très loin mes capacités d'étude des gens. Du point de vue psychologique, bien sûr. J'avais conscience de la balance des poids, des capacités physiques qui existait entre elle et moi, je savais où la frapper pour l'immobiliser, je savais où appuyer pour la faire souffrir et lui faire avouer ce que je voulais, j'avais remarqué sa tenue vestimentaire, qui l'empêchait de cacher l'absence évidente d'arme – au moins nous étions à jeu égal – mais j'étais incapable de deviner ce qu'elle pensait à cet instant, son avis sur ma personne et ce qu'elle cherchait en me posant de telles questions. L'avantage, c'était que je savais qu'elle savait pour qui je bossais, ou peu s'en fallait. Elle avait une idée sur ma situation, du moins, et je répondis à moitié en sous entendu, et à moitié explicitement, à sa question concernant ma main bandée. Avant de lui demander ce qu'elle comptait prendre, et si sa journée s'était bien passée. "On avait opté pour un café, non ? Je le prendrais avec une bonne dose de lait ; je n'ai pas prévu de travailler tard ce soir." J'esquissai l'ombre d'un sourire. « Je prendrais un café, aussi. Serré, sans sucre. » Le serveur nota le tout sur son calepin et nous laissa.  « Oui, je dirais même ... Intéressante. J'avance sur plusieurs dossiers importants et je découvre des choses ... bouleversantes. Je ne peux pas t'en parler, tu le sais bien. Et toi ? As-tu vexé d'autres personnes ces jours-ci ? D'ici, je ne vois pas d'autres cicatrices mais je n'ai pas encore tout découvert sur toi. » J'arquai un sourcil interrogatif. Je sentais qu'il y avait quelque chose à comprendre sans totalement le percevoir intégralement. Si elle ne pouvait pas m'en parler, pourquoi le disait elle? Il était la plupart du temps stupide et inconscient d'agiter un morceau de viande devant un loup – ou si on voulait être plus actuel, une blessure ouverte devant un vampire affamé, sachant que les nocturnes étaient toujours affamés. Pourquoi m'agiter devant les yeux ce sur quoi elle travaillait, si elle ne pouvait pas m'en dire plus ? Mon côté méthodique classa rapidement toutes les possibilités et la plus évidente fut que le dossier sur lequel elle travaillait, et qu'elle avait qualifié d'important, me concernait de près ou de loin. Sergeï ? Ne m'avait-elle pas dit qu'il était hors jeu à présent ? Travaillait-elle sur la Mafia et sur ses dirigeants ? C'était bien plus probable. Et le fait qu'elle me demande si je n'avais pas vexé d'autres personnes pouvait corroborer cette hypothèse. Je choisis ne de pas en dire trop, tout en jouant avec elle comme elle jouait avec moi. Agiter devant elle un morceau de viande, lui infliger à elle aussi un dérivé du supplice de Tantale. « Et bien, c'est une bonne nouvelle pour vous, si vous avez de nouveaux... éléments. Pour ma part, j'évite de vexer plus d'une personne par mois. J'ai tendance à vexer des personnes qui ont la rancune tenace, et une longue espérance de vie, aussi. Je pensais à Philipp. Elle devait le connaître. Savait-elle ma position dans la PES ? Je pris soin de ne pas aborder le sujet, et dérivai calmement vers mon métier officiel « Sinon, de mon côté, c'est bien moins palpitant que ce que vous pouvez croire. S'il m'arrive de vexer des clients, le métier de traducteur ne mène que rarement sur le terrain, sauf quand ceux qui m'ont permis de venir en Ecosse ont besoin de mes services. » Qu'elle comprenne ce qu'elle pouvait comprendre, mais j'étais bien en train de lui dire que la Mafia m'avait fait venir en Ecosse, et qu'elle réclamait certains de mes services – et pas que la traduction – par moment. Que pouvais-je lui dire d'autre ? Je n'étais pas habitué à parler de moi Et je ne savais pas trop vers où orienter la conversation. L'arrivée du serveur – le service était rapide dans ce restaurant ! - me laissa un peu de répit, et dès son départ, je conclus rapidement : « Ces dernières semaines, je me suis mis à l'apprentissage de l'espagnol. Il est étonnant de voir que les personnes multilingues sont recherchées dans de nombreux domaines. J'imagine que c'est votre maîtrise du russe qui vous avait amenée à être désignée pour m'approcher, il y a... sept ans, déjà. » Je fis une pause. Mes sourcils se froncèrent. Qu'est ce qui m'avait amené à songer à cela ? Le fait qu'elle avait cherché Sergeï. Sauf que la PES n'existait pas, à cette époque. Pour qui travaillait-elle donc lorsqu'elle était venue dans ma chambre d'hôtel se renseigner sur Sergeï. J'étais parti du principe qu'elle s'était mise à la poursuite de mon frère, parce qu'il était un mafieux de premier ordre, et un vampire – l'ensemble des deux n'était pas rassurant, assurément. Mais la PES n'avait été formée que plus tard. Peut être existait-elle avant, mais ça me semblait peu probable. Pourquoi faire une police pour gérer les créâtures surnaturelles, alors qu'il n'y avait à l'époque que les vampires de connus ? Ca n'avait pas de sens. Si ce n'était pas la PES, quel organisme avait pu enquêter sur Sergeï ? Je n'en avais aucune idée. L'armée, sûrement. « Je ne crois pas te l'avoir déjà demandé, mais en quoi consiste ton travail au fait ? Des dossiers... j'imagine que tu dois avoir des clients, ou des cas à traiter. » J'essayai de ne pas sembler méfiant. Ou sur les nerfs. Ce n'était pas le plus facile, mais j'avais un contrôle presque parfait – même si ce contrôle s'était détérioré avec la découverte des émotions humaiens – sur mon corps, et je pouvais presque toujours simuler la nonchalance alors que j'étais sur mes gardes. Il était dangereux qu'elle en sache plus sur moi que moi sur elle, et pourtant nous étions dans cette situation. Je me sentais étrangement vulnérable, et notai dans un coin de ma tête d'aller chercher par le biais de tous les contacts que j'avais au sein de la mafia des renseignements sur elle. Si elle refusait de me les donner.

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyDim 1 Déc - 22:27

Je prenais des risques en l’interrogeant ainsi et j’en avais conscience. Il haussa un sourcil quand je mentionnais mes recherches sur la Mort qui avançaient pas à pas. Je n’en avais pas trop dit, j’étais restée volontairement vague et c’était bien normal que ça l’étonne et qu’il cherche à en savoir plus. Irait-il jusqu’à me mettre un couteau sous la gorge pour me faire parler ? S’il était la Mort, il me tuerait cette nuit, d’une manière ou d’une autre, à un moment ou à un autre. Sinon, je pouvais soit continuer sur cette voie, soit rester énigmatique et changer habilement de sujet !

Alexei finalement répondit en restant lui aussi évasif, en décrivant le type de personnes qu’il avait récemment vexé : celles avec une longue espérance de vie : autrement dit, des vampires ! Je me sentis aussitôt soulagée qu’il ne lui soit rien arrivé de plus fâcheux qu’une blessure à la main. *Et si on l’avait transformé en vampire ?* C’était une possibilité mais je ne voyais pas encore comment la vérifier sans ajouter de bizarrerie à mon comportement.

Je souris par réflexe mais le ton du russe n’était pas joyeux. Quand il parla de son travail et ses vrais employeurs, j’optai pour un prudent « Je comprends » qui voulait tout et rien dire en même temps.

Le serveur choisit ce moment pour apporter nos cafés et je plaçais mes mains aussitôt autour de la tasse, pour assurer une prise ferme à mes gestes et à mes idées.

Alexei me raconta qu’il apprenait l’espagnol pour les besoins de son métier. Je ne connaissais pas cette langue pour ma part. Il embraya sur un tout autre thème subitement, revenant à moi, notre première rencontre, motivée par mes compétences linguistiques ? *Bien sûr que nous nous sommes rencontrés à cause de mon russe !* Il me suffisait de lui répondre cela, naturellement. Mais sa réflexion me prit prendre conscience que cela faisait déjà sept ans que nous nous « connaissions ». Sept ans à se « chercher » sans se trouver réellement ! Il était donc normal que je veuille en apprendre plus sur lui, d’ajouter des informations à ma fiche sur Alexei. *Et si je n’avais pas parlé russe, m’aurait-on tout de même choisie ? La réponse est oui, je pense : je suis profiler et j’ai une culture internationale. *

« Oui c’est exact » répondis-je simplement. Vint enfin la question qui le turlupinait forcément vu la manière dont j’étais restée discrète et mystérieuse, et dont il avait froncé les sourcils, geste involontaire de sa part, geste réflexe qui prouvait qu’il était en train de réfléchir intensément. Bien qu’Alexei paraisse très insensible et impassible, il se trahissait par ce geste machinal.

« Oui, en tant qu’enquêteuse. Je parlerais plutôt de cas ; car souvent ils nécessitent de nombreuses heures de recherches et ils ou elles ne sont pas des clients, dans le sens où notre but n'est pas vraiment de les satisfaire ! »
Je ne pensais pas l'aider beaucoup avec ma tirade ; je n'avais pas envie de parler de moi mais qu'il parle de lui, chose qui allait être difficile à réaliser !

"Et sinon en dehors du boulot, à quoi occupes-tu tes soirées ? Ou tes jours de congés ?"
Toute information était bonne à prendre. Et puis, étais-je vraiment désintéressée en posant cette question?

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyDim 22 Déc - 18:28




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




Elle comprenait, me disait-elle. Certes. Je comprenais bien qu’elle comprenait, je l’escomptais même, alors que le serveur venait nous apporter nos cafés. J’observai un instant Sasha placer ses mains autour de la tasse, comme pour se réchauffer. Je notai ça dans mes pensées, avant d’expliquer que j’avais entrepris depuis un petit moment d’apprendre l’espagnol, pour conclure ce que j’étais en train de dire, avant de la questionner. J’avais besoin d’en savoir plus sur elle. Qu’avions nous dit ? Donnant-donnant ? C’était ainsi que moi, du moins, j’avais interprété notre précédente conversation. « Oui c’est exact » J’arquai un sourcil, les fronçai même, encore. Pour réfléchir, en tenant compte de sa réponse. Elle était russophone, c’était donc pour cela qu’elle avait été mise sur ma piste, c’était logique. C’était même exact comme elle venait si bien de me le dire. J’enquêtai davantage sur son métier. Curieux ? Non, pas spécialement. Ou alors, une curiosité qui était calculatrice. Avec un unique but : en connaître autant de Sasha qu’elle pouvait en savoir sur moi. « Oui, en tant qu’enquêteuse. Je parlerais plutôt de cas ; car souvent ils nécessitent de nombreuses heures de recherches et ils ou elles ne sont pas des clients, dans le sens où notre but n'est pas vraiment de les satisfaire ! » D’accord. Bien. J’essayai de m’imaginer ce que tout cela pouvait vouloir signifier. Lorsqu’on lui avait donné le « cas » Ivanov, quand le lui avait-on donné d’ailleurs ?, qu’avait-elle du faire ? Enquêter, interroger, se renseigner… Je fronçai un peu plus les sourcils. Que savait-elle sûr moi ? Quelles informations pouvait-elle avoir sur moi ? Pas grand-chose, assurément, parce que pour creuser jusqu’à Iaboutsk et les dossiers très certainement inexistants de l’orphelinat… C’était impossible. Je commençai à faire le compte de tout ce qu’elle avait pu recouper sur les Ivanov, en se concentrant sur Sergeï ce qui m’épargnait pas mal. Elle me coupa dans ma réflexion, en essayant d’obtenir des informations supplémentaires à mon propos. C’était ainsi, du moins, que j’interprétai ses questions lorsqu’elle les posa : "Et sinon en dehors du boulot, à quoi occupes-tu tes soirées ? Ou tes jours de congés ?" Jour de congé ? « Jour de congé ? Je ne crois pas en avoir. Et mes soirées… J’ai un emploi qui m’amène à travailler tard. » Cet emploi se résumait en un mot : Mafia. J’étais son exécuteur dans la région, c’était à moi de me salir les mains et ça ne me dérangeait pas le moins du monde, d’autant plus que je pouvais leur demander ce que je voulais dans la limite de la décence, en contre partie. Je pris le parti de boire un peu de café pour m’éviter de devoir continuer de parler. Et de parler de Valentina, qui m’amenait une fois par semaine à visiter des expositions, à aller au cinéma ou tout simplement à faire une sortie au restaurant. Mon portable vibra dans ma poche.

Mon portable vibrait.
Je n’avais que rarement des coups de fil, et encore moi en journée.

Je posai la tasse, en m’excusant en russe auprès de Sasha, avant de me lever, et de sortir mon téléphone. Je fis quelques pas en direction de la vitre la plus proche, pour ne pas trop m’éloigner, ni être très à portée d’écoute de la jeune femme. Dès que je décrochai, je me fis agresser par une injonction en russe. Ma surprise dut se lire un instant sur mes sourcils écarquillés. Comment ? Ils me surveillaient, ils doutaient de moi, ils… Je pensai le plus rapidement possible à ces derniers jours : l’échec de la négociation auprès de la vampire, ma discussion avec Philipp, et maintenant mon entrevue avec Sasha. J’oubliai un instant que je n’étais pas le seul russophone de la pièce, lorsque je leur demandai d’une voix agacée : « J’ai le droit d’avoir une vie privée, et avec qui je veux ! Quoi ? Qu’est ce que vous savez d’elle ? Compromettre ? Pardon ? » Mes yeux gris se posèrent sur Sasha. Elle avait œuvré pour retrouver Sergeï, et j’ignorai si elle avait cherché à intercepter un vampire, ou si elle avait cherché un membre de la mafia russe. Ce que j’étais désormais. J’inspirai profondément, en jetant un nouveau coup d’œil à Sasha. Une menace ? Je susurrai en accentuant au maximum mon accent sibérien dans l’illusion de rendre mes propos intelligibles. « Oui, si elle me menace, je l’élimine. Pour le moment, laissez-moi. Je fais mon job, remplissez votre… » Apparemment ils voulaient l’assurance que mon impartialité et mon indifférence n’étaient pas mis en jeu à cause de Sasha. J’eus envie de rire : bien sûr que non. Si elle devenait une menace, j’ai prouvé à plusieurs reprises que je n’aurai aucun scrupule à l’immobiliser, non ? Je me fis la remarque que si elle était encore en vie… Je fermai les yeux et achevai brutalement la discussion dans une tirade russe visant à leur prouver que, comme le soir où j’avais vu Philipp, ma loyauté n’était pas à mettre en doute. Dans tous les cas, j’étais déloyal, indépendant et vénal, rien n’avait changé sur ce plan là. Ils n’avaient pas à s’inquiéter. En retournant m’asseoir auprès de Sasha, je me surpris à chercher une arme à ma portée, si jamais… Si jamais quoi, Alexei ? La voix de Valentina me fit tiquer. Si jamais elle devenait menaçante. Sauf que là, c’était moi qui risquais de la menacer. J’étais déjà plus tendu. « Excuse moi, un coup de fil… hum… professionnel. » Qui m’intimait de couper court à notre entrevue et à sa vie accessoirement. Je fis tourner la cuillère entre mes doigts, hésitant entre réfléchir et reprendre la conversation où on en était. « Je n’ai pas vraiment de vie sociale en dehors de mon travail, c’est vrai. Ma… » Ma sœur ? « Malgré tout, on m’a conseillé quelques expositions que je suis allé voir, mais en général, lorsque je ne travaille pas, soit je me promène, soit je reste chez moi à lire. » Et à m’entraîner, accessoirement, au maniement des armes et à ma concentration pour le tir à distance. « Et toi ? Tu dois bien connaître l’Ecosse, non ? Que me conseillerais-tu ? » J’avais envie qu’elle me dévoile une par de ses occupations. Et aussi, qu’elle ne me menace pas. J’étais prêt à réagir au quart de tour. La Mafia n’était pas très heureuse de voir que je communiquais avec une membre de la PES qu’elle n’avait pas – encore – corrompue.

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyLun 6 Jan - 22:49

Je me sentais comme sur le fil d'un rasoir, un rasoir très fin et très coupant. Je me demandais si j'avais bien fait d'accepter ce rendez-vous, si tout cela n'allait pas tourner au désastre, comme la dernière fois ... *Non, rectification : la dernière fois était un pur hasard ; ce n'était pas calculé. En tout cas, c'est ce que je lui ai assuré. Et si ça avait été orchestré par ses employeurs ?* L'horrible pensée se faufila en moi, tout comme ce blocage persistant. Je me refusais à nommer son employeur, à mettre des mots sur ce qu'il était : un tueur froid et sans scrupules. *Rends-toi à l'évidence : que cherches-tu près de lui ? A déterminer si oui ou non il est la Mort.* Notre discussion amicale n'était qu'une mascarade, un leurre pour occuper le temps et trouver des failles, des pistes sur lesquelles travailler. Pour autant, je ne voulais pas qu'il croie que j'avais étudié son cas en 2010. J'étais tombée sur lui en cherchant son frère, par un pur hasard. *Encore ! A croire que je le les collectionne ! C'est un gag !*

Je sentis cela quand le silence s'appesantit, juste après avoir expliqué mon boulot sur des "clients" particuliers. Je croyais deviner ce qu'il pensait : croyait-il que je parlais de lui ? D'une certaine manière, oui. Si Alexei était la Mort, alors oui je l'étudiais en ce moment-même. Mais il fallait remettre les choses à plat sur le passé :

"Quand mes employeurs m'ont demandée d'enquêter sur Sergeï, ils ne m'ont pas parlé de toi. Tu n'existais pas à leurs yeux, avant que je ne tombe sur toi. C'est un hasard... tout comme l'autre fois au Celtic Pub, je n'ai pas cherché à te retrouver. Je cherchais... plutôt à t'oublier..."

J'en disais trop et je me tus brusquement, changeant de sujet au vol, abordant le thème banal des passe-temps. Mais il ne me fournit aucune matière intéressante. J'étais soulagée qu'il ne relève pas ma dernière phrase, car je ne la comprenais pas moi-même ! Un coup de fil sur son téléphone nous interrompit et il parut surpris puis presque énervé. Dérangé. Il s'excusa et sortit sur le balcon, vierge de tables et de convives. Le vent froid de cet automne devait dissuader même les fumeurs de s'aventurer au-dehors. Curieuse, je le suivis des yeux. Il était trop loin de moi pour que je perçoive ses paroles. J'inspectais la chaise en face de moi mais rien n'y restait pour que je l'analyse. Restait la tâche de sang sur la nappe en papier. Fine mais présente. Que m'apporterait un échantillon de sang d'Alexei ? Apprendre s'il était manipulé par des créatures surnaturelles. N'ayant aucun matériel sur moi, je découpais le petit carré au couteau, le rangeait dans ma poche soigneusement et poussais le culot jusqu'à demander à un serveur si je pouvais retirer la nappe, "elle est moche et il y a plein de taches !".

Quand Alexei revint, je m'attendais à ce qu'il remarque l'absence de la nappe et m'en touche un mot. Comme il n'en fit rien et paraissait troublé par son appel, je pris les devants :

"Ne sois pas étonné que la nappe ait disparu. Elle était sale de mon côté et je supporte mal la saleté."
*Tu es d'une curiosité morbide : chercher le sang de quelqu'un ! Si la Mort laisse un peu de son sang quelque part, ce sera utile de comparer.*
Il s'excusa pour son départ :

"Pas de problèmes : le boulot n'attend pas, surtout dans notre domaine d'activité." dis-je, trop amèrement à mon goût.
Je me demandais s'il allait m'annoncer qu'il devait partir. Mais il revint sur les passe-temps et je compris qu'il était réservé, peu sociable. Encore des points qui confirmaient mes hypothèses.

Il me retourna ma propre question et ainsi je pus meubler de paroles une situation que je sentais de plus en plus tendue. Il était tendu. Qu'avait-il appris ? Que s'étaient-ils dit ? Je déglutis tout en faisant mon possible pour être naturelle :

"Tout dépend des activités. Il y a de nombreuses balades en bord de mer, pour ceux qui aiment la nature ou l'effort physique. Pour l'art, la liste des musées et monuments est longue : le patrimoine culturel de ce pays est important, quoi qu'on puisse en penser ! Il y a aussi des festivals, des rencontres internationales ... Tout dépend de ce que tu aimes faire. Il y a des même des salons de livres !"

"La Russie aussi est un beau pays : tu n'y es jamais retourné ?" continuai-je d'une voix plus apaisée. Allait-il consentir à me répondre ou se braquer ? Avec lui, je marchais sur des oeufs, je ne savais jamais comment il allait réagir. Quand j'avais gaffé en lui parlant de son chien, j'ai cru qu'il allait s'énerver. Et maintenant ?

hrp:
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyMer 15 Jan - 11:04




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




Ma discussion avec mon contact mafieux m’avait agacé. Enervé. Inquiété, peut être même. J’essayai d’être clair avoir moi-même, alors que la cuillère tournoyait entre mes doigts sans échapper à mon contrôle. Ce que je faisais en dehors de mon travail ? C’était à cette question que j’essayais de répondre alors que mes pensées m’entraînaient bien loin, à la dérive. Si jamais elle venait à me menacer, allais-je, comme j’en avais assuré mon contact, pouvoir l’éliminer sans scrupule, sans souci, sans le moindre remord ni une once d’hésitation ? J’en doutais, et je ne pouvais pas supporter d’envisager ce doute. Parce que ça ne m’était jamais arrivé de douter d’être capable d’éliminer un témoin, même si j’avais sympathisé avant avec. Parce qu’avant, tu ne savais pas sympathiser, Lexei… Peut être. Un silence. J’avais été suffisamment troublé par l’appel pour ne pas remarquer quelque chose d’aussi évident qu’un changement de nappe, et encore plus pour ne pas interroger Sasha, et répondre à ses questions comme si rien n’était passé. Que m’arrivait-il ? Voilà qui était une bonne question. J’inspirai, essayant de retrouver confiance en mes capacités. Je me savais un excellent tireur, mais plus encore un excellent tueur. Lorsque je rentrais dans une pièce, un instinct e survie développé depuis mon plus jeune âge me poussait à repérer les entrées, les sorties, les difficultés d’accès et de déplacement. Lorsqu’une personne me faisait face, mes yeux la décortiquaient en termes de dangerosité et de risque. Je savais où étaient ses points faibles, je savais où je devais frapper pour détruire. Je me souvins de l’orphelinat, ou des combats avec d’autres pensionnaires me permettaient de gagner de l’argent – déjà. Je me souvins plus particulièrement d’un combat contre Steban. Il avait beau être mon frère, je n’avais pas hésité une seule seconde à lui porter un coup violent à la trachée pour le mettre à terre et l’étouffer suffisamment longtemps pour lui asséner d’autres coups. Notre combat n’avait pas duré plus de dix minutes, et il avait mis deux jours à s’en remettre. Et c’était mon frère. Et je n’avais que huit ans. Alors pourquoi donc, à plus de trente et un ans, émettais-je des doutes sur mon aptitude à éliminer une personne que je ne connaissais pas tant que ça ? L’am… La voix de Sasha me sortit de mes pensées, et je mis quelques secondes à comprendre qu’elle répondait à ma question concernant les activités possibles à faire en Ecosse. "Tout dépend des activités. Il y a de nombreuses balades en bord de mer, pour ceux qui aiment la nature ou l'effort physique. Pour l'art, la liste des musées et monuments est longue : le patrimoine culturel de ce pays est important, quoi qu'on puisse en penser ! Il y a aussi des festivals, des rencontres internationales ... Tout dépend de ce que tu aimes faire. Il y a des même des salons de livres !" Des salons du livre ? J’essayai de comprendre ce dont elle voulait parler. En tant que traducteur, il me semblait évident que cette lacune n’était pas acceptable. Avant que je ne puisse lui demander de plus amples précisions, cependant, elle m’avait posé une nouvelle question. "La Russie aussi est un beau pays : tu n'y es jamais retourné ?" Une nouvelle question. Piège ? Que lui dire donc ? Je ne savais pas exactement si sa question était sincère ou si elle souhaitait en savoir plus. La Russie. Maison mère de mon employeur. Là où j’avais retrouvé ma famille, et donc mon point faible. Là où j’avais pleinement reçu mes fonctions. La où se trouvait un bon pourcentage des Ivanov. Que savait-elle sur nous, d’ailleurs ? Si ses employeurs à elle l’avaient chargée d’enquêter sur mon frère, je pouvais être certain qu’elle ne devait pas savoir grand-chose sur les Ivanov. Il avait vingt trois ans environ lorsqu’il nous avait déposé à l’orphelinat en nous disant que nous n’avions pas intérêt à avoir besoin de lui, parce qu’il comptait bien se barrer et nous oublier. Et que nous avions intérêt à en fait autant. En revanche, si après elle avait enquêté à mon sujet… Le hasard, disait elle. Devais-je la croire ? Je pris le parti de répondre le plus simplement du monde, sans trop réfléchir. « Et bien… je suis né en Russie. Pourquoi n’y serais-je pas retourné ? J’imagine que toi aussi, tu as du faire plusieurs voyages là bas… » J’haussai les épaules. « En revanche, je ne saurais dire si c’est un beau pays. Je dois avouer que je n’en ai vu que la crasse et la noirceur de la neige souillée par la pollution et la pauvreté. Rien d’extrêmement agréable à la vue. » La cuillère qui tournait entre mes doigts sans s’arrêter, comme un couteau avec lequel j’avais l’habitude de jouer, depuis plusieurs minutes dérapa et tomba sur la table dans un bruit qui me fit sursauter. Comment m’avait elle échappée ? Un bref instant d’inattention alors que je repensais à la Russie. Je n’étais pas capable de voir la beauté d’un lieu, c’était une certitude. Je n’en voyais que la réalité plate et immuable. Il m’était bien plus simple de voir l’impact de l’homme sur un paysage que celle de la nature, quand bien même j’étais conscient de louper quelque chose. Je conclus. « Et rien de bien différent d’Ecosse, selon moi. Hormis la langue, assurément. » Et encore. Et encore, puisque je parlais à présent les deux langues – et même plus – sans hésitation. Un avantage certain de ne pas avoir la même pensée que les êtres humains, selon moi.

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyLun 17 Fév - 22:27

*Au concours de la nervosité, qui allait gagner ?* Bonne question.

Avant qu'Alexei ne revienne à table après sa conversation téléphonique, je me sentais tellement rongée de l'intérieur par mes sentiments compliqués que j'imaginais que les autres convives pouvaient lire sur mon visage mes émotions. Alors qu'il se rasseyait face à moi, je croyais qu'il y lirait sans hésiter mes sentiments atrocement mêlés : j'étais partagée entre l'envie de savoir s'il était potentiellement un ennemi à neutraliser d'urgence, la culpabilité de le trahir une fois encore, le désir de le connaître davantage, qu'il se livre et me dise ce qu'il avait sur le coeur, qu'il me dise ce qu'il pense de moi au fond, que suis-je pour lui, qu'est-ce que je représente ? Une "collègue", une ennemie, une fille intéressante, jolie ? A quoi rimaient toutes mes questions ? Ce n'étaient pas des interrogations innocentes qu'on pose à son potentiel futur "ami" lors d'un dîner en-tête-à-tête, si ? Je creusais mais je ne remuais que la terre ; je ne trouvais aucun trésor enfoui, sale comme du pétrole ou pur comme de l'or. *Pour les comparaisons foireuses, tu repasseras.*

Mais quand il me regarda, je compris que son appel s'était mal déroulé, ou que quelque chose l'avait chiffonné car il semblait aussi mal que moi en ce moment. Heureusement, j'avais eu le temps de penser à quelques autres questions en son absence et je ne lui laissa pas le temps de réfléchir plus, de se rendre compte qu'il y avait aussi quelque chose qui clochait chez moi, comme un sourire forcé, une nappe disparue ou un pli sur mon visage !

Je meublais en déballant mes connaissances sur le tourisme en Ecosse, comme un vrai guide du routard, en espérant éveiller son intérêt sur tel ou tel sujet : le sport, les musées, les livres ... Mais il ne réagissait pas ou peu, alors je décidais de lui demander de manière détournée s'il était déjà retourné en Russie. Peut-être que parler de l'Ecosse ne l'intéressait que moyennement et que tout ce qu'il voulait, c'était évoquer avec moi son pays natal, qui devait représenter tant pour lui, là où il avait du vivre avec ses parents et son frère, et sûrement d'autres membres de sa famille. J'étais curieuse de son passé, sa vie antérieure à celle chaotique qu'il menait actuellement. Elle devait être plus sereine et plus belle, m'imaginais-je en attendant sa réponse.

Encore une fois, il me déroutait : je ne m'attendais pas à cette réponse. On aurait dit qu'il refusait de se dévoiler même sur un sujet aussi banal. J'aurais du imaginer toutes les options possibles pour ne pas paraître désarçonnée, mais si j'avais agi ainsi, j'aurais perdu le peu de sincérité qui me restait encore. Cette spontanéité qui devait caractériser toute rencontre amicale. Ma question et sa réponse durent aussi le brusquer dans les méandres de ses pensées puisque la cuillère avec laquelle il jouait - nerveusement ? - depuis son retour tomba brutalement et l'interrompit. Voilà une preuve sérieuse de sa tension intérieure !

"Oui j'y suis allée, surtout pour parfaire la langue et pour accompagner mes parents." répondis-je d'abord à sa première question.

"C'est.. étrange, je pensais, enfin je me disais que tu devais aimer ton pays, puisque tu .... "
Oh, pente glissante ! Puisque tu .. quoi ? Tu accomplis de drôles de missions pour les russes depuis l'Ecosse ?
"Puisque tu aimes tant parler la langue ; tu me semblais un amoureux de ta terre," me rattrapais-je tant bien que mal.

"Si on aime son pays tel qu'il est, malgré ses défauts, sa misère ou sa crasse comme tu dis, alors oui l'Ecosse et la Russie sont comparables. Sauf que je ne considère pas l'Ecosse comme mon pays. Bien que je sois née aux Pays-Bas, j'ai tellement voyagé que je n'ai pas l'impression d'avoir un port d'attache." avouais-je dans un souffle. Je venais de le réaliser. Ce que je venais de lui confier, je ne l'avais jamais dit à personne et surtout pas à moi-même. Etait-ce pour cela qu'il me manquait quelque chose pour être heureuse ? Pas un homme, pas à un travail mais une patrie, une maison, un endroit où je me sente moi-même ? L'appartement dans lequel je vivais ne représentait pas toute la portée du mot "foyer".

J'avais baissé les yeux tout en parlant et je relevais timidement la tête pour le regarder. Encore une fois, je ne savais rien de lui mais il devinait tout de moi.
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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyMar 18 Fév - 12:43




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




Si elle devient gênant, il te faudra l’éliminer tout de suite, Ivanov Les mots de mon employeurs résonnaient dans ma mémoire, m’empêchant de ne pas considérer sans y penser toutes les moyens de la tuer, à cet instant. Serais-je capable d’appuyer sur la gachette ou de l’étrangler si la situation l’exiger ? Sans nul doute. Non, c’était faux : le doute était bel et bien là, je ne pouvais qu’en convenir. Et c’était cela qui m’inquiétait, et traçait sur mon visage des plis soucieux, alors que je m’entendais parler de la Russie uniquement en terme de crasse et de pollution. Sincérité et franchise ? Oui, oh que oui, me concernant. Je terminais mon portrait si réaliste et peu flatteur de mon pays natal en lui retournant la question. Après tout, n’était-elle pas, comme moi, de Russie ? "Oui j'y suis allée, surtout pour parfaire la langue et pour accompagner mes parents. C'est… étrange, je pensais, enfin je me disais que tu devais aimer ton pays, puisque tu .... " Puisque je ? Je ne voyais pas ce qu’il y avait d’étrange au fait de ne pas forcément aimer plus que ça le pays qui m’avait hébergé mes premières années. Puisque je faisais partie de la Mafia Russe ? Ridicule. Elle aurait pu se nommer la Mafia Ouzbek, en dehors du fait que je n’aurai pas été plongé dedans depuis mon plus jeune âge, ça n’aurait rien changé. Je l’invitai à poursuivre, d’une voix de laquelle suintait un peu de méfiance. « Puisque… ? » "Puisque tu aimes tant parler la langue ; tu me semblais un amoureux de ta terre," J’arquai un sourcil, peu convaincu, mais m’en contentant pour le moment puisqu’elle reprenait déjà. "Si on aime son pays tel qu'il est, malgré ses défauts, sa misère ou sa crasse comme tu dis, alors oui l'Ecosse et la Russie sont comparables. Sauf que je ne considère pas l'Ecosse comme mon pays. Bien que je sois née aux Pays-Bas, j'ai tellement voyagé que je n'ai pas l'impression d'avoir un port d'attache." Je me figeai. Pourquoi ? Oh, ça n’avait aucun rapport avec ses propos, loin de là. Ce qui venait de me surprendre avant tout, c’était… sa fragilité qui m’avait explosé au visage alors qu’elle avait baissé les yeux. Je fronçai les sourcils, en posant la cuillère qui avait recommencé sa course entre mes doigts nerveux. « Tu veux donc dire que… tu considères la Russie comme ton pays ? » Est-ce mon cas ? En même temps, je ne peux pas vraiment considérer un autre pays comme le mien. L’Ecosse ? Non. Certes non. « Mais est ce réellement important, Sasha ? Ca semble vous… » Je cherche le mot adéquat en anglais – puisque j’oscille entre l’anglais et le russe depuis le début de notre conversation – avant de rendre les armes et de poursuivre dans notre langue maternelle. « préoccuper. Alors que ça ne sera à rien de s’en faire pour cela. Quelle importance d’avoir un port d’attache tant que vous êtes en vie ? » Vie qui peut vous être enlevée à tout moment, rappelons le. Et par la personne devant vous. Quelle certitude, Alexei, et le doute que tu émettais un peu plus tôt ? Je l’ai éteint, parce que je n’ai pas le choix. Je laissai la cuillère se reposer lorsque ma main alla chercher celle de Sasha, sans réellement savoir pourquoi. « Ce n’est pas une question qu’il faut considérer, je pense. Enfin… la véritable question c’est A quel pays te sens tu le plus loyale non ? » Excellente question, à laquelle la réponse que je pourrais donner ne me convient pas plus que cela. Je le lui confiai, d’ailleurs, en rétractant ma main pour recommencer à jouer avec la cuillère. « Par exemple, dans mon cas, ma… loyauté… ira toujours par défaut à la Russie, si on ne me promet pas un marché plus alléchant ailleurs. J’imagine que pour vous ce sera l’Ecosse. Vu votre… travail. » Je la fixai sans ciller, en attendant une réaction de sa part. Et en notant aussi ce qu’elle avait pu dire avant, concernant son pays natal. « Mais excusez moi, vous dites que vous êtes née en Hollande ? Pas en Russie donc ? » J’avais du mal à suivre, et même si en soi ce n’était pas l’important du tout. Ce que je lui fis remarquer, d’ailleurs. « Enfin… cela importe peu. Tu habites en Ecosse maintenant. Essaye de considérer le pays comme le tient si ça te préoccupe à ce point. Ou pars vivre en Russie. » J’étais perturbé par sa fragilité à laquelle je ne m’attendais pas. Une fragilité humaine que je ne comprenais pas. C’était déroutant. Si elle devient gênante, tu l’élimines, Ivanov. Et sans tarder. J’étouffai un soupir. Chaque seconde supplémentaire risquait de la classer dans la catégorie ennemis. Et chaque seconde risquait de lui coûter la vie. Est-ce que je pourrais le faire ? Oui.

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptyVen 21 Fév - 0:07

Peut-être que j’entrais sur un terrain glissant en creusant le thème de l’appartenance, de la loyauté, à une terre, à une famille, à une cause ! Mais il m’avait paru important de lui en parler, de communiquer avec un autre déraciné sur ses sujets-là, qui sont difficiles à aborder avec des « écossais pure souche » ou des branchés du melting-pot. Je m’étais confiée à lui sur un malaise en moi qui venait d’éclore au moment où je l’avouais : le sentiment d’être apatride. Bien que je sois née aux Pays-Bas, le fait d’avoir suivi mes parents de par le monde m’avait en quelque sorte arrachée au sens du mot « foyer ». C’était cette notion que je développais devant lui, timidement, presque en rougissant. Comme une gosse. Parce que j’étais renvoyée à mon enfance tourmentée. Comme si je n’avais pas su m’en extirper et que je la trimbalais encore aujourd’hui comme un boulet. Alors qu’avant je n’avais pas su l’identifier ou mettre des mots sur ce mal-être, maintenant je voyais plus clair dans mon passé et ses conséquences sur mon présent.

Alexei essayait de me comprendre, je le voyais à ces hésitations et à son silence mais est-ce que mes mots éveillaient quelque chose en lui ? Ou était-ce de la pure et simple politesse ? Est-ce qu’ils le touchaient au moins un peu ? J’espérais que oui. Alexei ne comprenait pas, il butait, oscillait sur les mots : j’avais envie soudain de le secouer. Pourquoi ne répondait-il tout simplement pas qu’il pigeait, qu’on était sur la même longueur d’onde ? Cela nous aurait permis de quitter ce sujet et de parler d’autre chose ! Le fait qu’il pouvait être la Mort ne m’arrachait plus qu’un sourire cynique. Je m’en voulais de changer d’humeur aussi vite, mais la tension accumulée par notre rendez-vous surgissait : le lieu, les discussions, les interruptions, le doute horrible qu’il soit mon ennemi et que je doive le faire arrêter comme j’ai arrêté son frère, tout cela s’agglutinait et je me maudissais d’avoir abordé une question aussi personnelle avec lui. D’une voix un peu énervée, je rebondissais sur sa réponse sur le peu d’importance d’un port d’attache par rapport au fait d’être en vie :

« Tu ne comprends pas la notion de port d’attache. Je parlais d’un foyer, d’une maison, une famille aimante … C’est important car ça vous soutient dans la vie, ça apporte autre chose qui nourrit et fait vibrer ! »

J’avais l’impression de parler à un mur. Est-ce qu’il connaissait au moins tout ce que je lui décrivais avec force ressentiment ?
Il ne laissait pas démonter par mes paroles. Non j’avais tort, il cherchait vraiment à me comprendre. Mieux connaître ses ennemis pour les tuer ensuite ? Je l’écoutais me parler de la Russie, pays vers lequel il se sentait loyal, de par son travail. C’était clair. Et moi ? Devrais-je me sentir rattaché à l’Ecosse car c’est elle qui m’emploie ? Je ne sais pas. Je ne sais plus.

« Je ne sais pas. Je suis comme toi ; l’Ecosse m’emploie mais je n’ai pas d’attaches particulières ici. »
*J’ai beaucoup perdu durant les Années Sanglantes.*

Sa conclusion me cingla : elle montrait soudain bien comme il en avait assez de discuter sur ce sujet mineur. Voulait-il me rassurer en prononçant ces mots ? Ou me faire ouvrir les yeux pour me faire sortir de questions creuses et vaines ? Je décidai de couper court à cette discussion avant qu’elle ne me blesse plus avant.

« Ok. Merci pour le café. Je réglerai en bas les deux consos. »

Je me levais brusquement, trop pour qu’il ne remarque pas qu’il m’avait blessée. *Faible tu es devenue.* Cette pensée me minait et je ne supportais plus de rester près de lui. Je ne pouvais même pas le regarder dans les yeux. Pourquoi ce sujet me tenait-il tant à cœur ? Je l’ignorais mais la manière dont il l’avait pris m’avait déplu fortement.

« Alexei, ça ne servira à rien de me recontacter. Pour un café ou autre chose. Je crois qu’on doit se voir seulement au niveau professionnel. » J’avais mal tourné ma phrase, qu’il comprenne ce qu’il voudra. Si je devais un jour l’éliminer, mieux valait couper les ponts maintenant.

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] EmptySam 22 Fév - 14:45




« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. »




Je n’avais jusqu’ici jamais rencontré cette Sasha Oppenheimer là. Comment la considérer, comment essayer même de la comprendre alors que… elle m’échappait. Qu’attendait elle comme réponse ? J’essayais de concilier entre ce que je pensais, ce que je pensais qu’elle voulait que je pense, ce que je pensais qu’elle voulait que je lui dise… Elle me fit remarquer que je ne comprenais pas ce qu’elle entendait par port d’attache. Oui, c’était tout à fait ça : je ne comprenais pas. Je n’étais pas un homme comme les autres, mon cerveau refusait de me permettre d’absorber ce genre de ressenti aussi facilement que le sien. Je n’étais pas normal sur ce plan là, certes. Alors voila. Un foyer, une famille aimante… Mon foyer avait été la rue, les locaux militaires, mon appartement. Ma famille aimante ? Je l’avais frappée, tabassée pour de l’argent. Elle m’avait poignardé, elle avait voulu me tuer et boire mon sang. Alors non, je ne pouvais comprendre ce dont elle parlait. Mes yeux la fixaient, impassibles. Je ne pouvais réagir autrement, puisque je ne connaissais rien de tout cela. Seule Valentina commençait à m’ouvrir à d’autres. Mes neveux et ma nièce, aussi. Mais je ne les avais vu que deux ans, et on faisait pression sur moi par leur biais. J’essayai d’expliquer au mieux ce que je concevais, les réponses que je pouvais lui offrir, en sachant pertinemment que ça n’avait rien de suffisant. « Je ne sais pas. Je suis comme toi ; l’Ecosse m’emploie mais je n’ai pas d’attaches particulières ici. » Peut être. Dans tous les cas, je ne savais rien sur le sujet, alors pourquoi nous étendre davantage là-dessus ? Ma conclusion, abrupte sans le vouloir la fit réagir de manière inattendue. Je fronçai les sourcils. « Ok. Merci pour le café. Je réglerai en bas les deux consos. » Je n’esquissai pas un geste autre que celui de m’adosser au dossier du fauteuil, en l’observant reprendre ses affaires. La retenir ? Non. Pourquoi la retiendrais-je ? Elle faisait ce qu’elle voulait, et si elle voulait partir… et bien, au moins les chances pour que je doive la tuer allaient arrêter de croître un instant. « Alexei, ça ne servira à rien de me recontacter. Pour un café ou autre chose. Je crois qu’on doit se voir seulement au niveau professionnel. » Seulement au niveau professionnel ? Je me levai, considérant cela comme une menace. « Soit, je ne te recontacterai pas. Visiblement, c’était idiot de notre part que de chercher à faire connaissance, sur ce point je suis d’accord avec toi. » Elle m’attirait d’une manière que je ne connaissais pas. Ou que je n’avais pas l’impression de connaître. Etait-ce parce qu’elle m’était inaccessible de toute évidence ? Ou parce que je ne comprenais rien à sa manière de fonctionner, à ces pensées qui traversaient ses yeux en restant hors de ma portée ? « En revanche, j’espère que nous ne nous verrons pas de manière professionnelle. Généralement mes…clients ne me revoient pas vraiment après ma visite. » Petite provocation ? Peut être. Colère d’avoir été… écarté de cette manière ? Peut être. J’allais avoir besoin de temps pour comprendre exactement tous les tenants et aboutissants de notre discussion. Dans tous les cas, je ne voulais pas avoir à la descendre, tout en sachant que je n’hésiterais pas une seconde sur la gâchette si c’était nécessaire. Ma survie avant toute autre chose.

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MessageSujet: Re: « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]   « Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé] Empty

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« Une bonne communication est aussi stimulante qu'une tasse de café et empêche aussi bien de dormir après. » [Livre II - Terminé]
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